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Le docu d’environnement fait-il recette ?

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Le docu d'environnement fait-il recette ?
(Crédit photo : « Freedom, le film »)
 
Fini, le film catastrophe ! La planète se meurt, on le sait déjà. Place aux solutions. Alors que se tient le Festival international du film d'environnement, les professionnels analysent la petite cuisine des films qui marchent.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Pour la soirée d’inauguration du Festival international du film d’environnement (Fife), mardi 3 février, à Paris, le grand spectacle était au rendez-vous. Le film d’ouverture, Freedom, l’envol d’un aigle, est de ceux qui vous donne des frissons. Rien que la bande-annonce de ce documentaire-fiction de quatre-vingt-dix minutes, réalisé par Muriel Barra et Jacques-Olivier Travers, vous noue la gorge d’émotion. L’histoire de la rencontre de Roï, dernier aigle pêcheur en liberté, avec Kaaba, une femelle de la même espèce, captive depuis des années, c’est de la dynamite pour le grand public, petits et grands, intellos et prolos compris. Produit par Lato Sensu Productions pour Ushuaïa TV, qui fête ses dix ans, le film, avant même sa diffusion, a déjà fait l’objet de centaines d’articles dans la presse internationale. Le documentaire d’environnement aurait-il le vent en poupe ?

Découvrez la bande-annonce de Freedom, l’envol d’un aigle

Si tous n’ont pas le potentiel pour triompher au box-office, les docus verts sont en tout cas dans la place. Pour établir la sélection de la 32e édition du Fife, Myriam Gast-Loup, la directrice de la programmation, et ses équipes en ont visionné plus de 2 000, venus des quatre coins du globe, en particulier grâce aux liens noués à travers le Green Film Network, un réseau international qui regroupe une trentaine de festivals dédiés aux thématiques environnementales. Au bout de ces longues heures de projection, une centaine de films sont présentés gratuitement au public et aux professionnels du milieu. Pour ces longs, moyens ou courts métrages, le festival sert souvent de premier contact avec la population cinéphile, de rampe de lancement médiatique… et d’attrape-diffuseur. Car sur l’ensemble de la programmation 2015, seuls une quarantaine disposent d’ores et déjà d’un diffuseur. Beaucoup d’appelés donc, pour peu d’élus.

Si les films dans la lignée des célèbres Cauchemar de Darwin (2005), We Feed The World (2007), et Gasland (2011), à message d’alerte, restent d’actualité, pour Myriam Gast-Loup, aux manettes du festival depuis plus de dix ans, le documentaire d’environnement est bel et bien passé à l’étape d’après la catastrophe. « Les réalisateurs eux-mêmes sont de moins en moins dans le constat et de plus en plus dans la proposition. Ils mettent en lumière de nouvelles pratiques », note-t-elle. L’évolution d’une réalisatrice comme Marie-Monique Robin est à ce titre exemplaire. Après deux enquêtes tonitruantes, l’une sur la firme Monsanto, et l’autre sur les pesticides, la réalisatrice a successivement sorti deux films, Les moissons du futur, sur l’agroécologie, et Sacrée croissance, sur des communautés porteuses d’initiatives de tous horizons.

Découvrez la bande-annonce de Les moissons du futur

Bande annonce "Les Moissons du Futur" from M2R Films on Vimeo.


Découvrez la bande-annonce de Sacrée croissance

SACRÉE CROISSANCE ! (Bande annonce) from M2R Films on Vimeo.


Mais les outils de tournage et de diffusion à peu de frais ont également ouvert la porte à de plus jeunes auteurs, ainsi qu’à des tournages plus spontanés. « Ce qui a réellement changé, ce sont les possibilités offertes par l’allégement des moyens de production et de diffusion, grâce à Internet. Sur une économie aussi fragile que celle d’un documentaire, cela permet aux gens d’être plus libres dans leur prise de parole, remarque Myriam Gast-Loup. Par ailleurs, certains films se fabriquent et évoluent en parallèle d’initiatives collectives ou participatives : tout va dans le même sens ! » Le destin d’Anaïs s’en va-t-en guerre, un film de quarante-six minutes de Marion Gervais, projeté ce dimanche 8 février au Fife, en est un merveilleux exemple. Réalisé avec un minuscule budget, diffusé une première fois sur TV Rennes, l’histoire d’Anaïs, une jeune femme farouchement déterminée à devenir agricultrice, a été vu plus d’un demi-million de fois en quelques semaines sur le Net. La société Quark Productions a alors lancé une souscription sur la plateforme de crowdfunding Ulule pour financer l’achat de terres par la jeune femme, et récolté près de 20 000 euros, quand elle en demandait 4 000 !

Découvrez la bande-annonce de Anaïs s’en va-t-en guerre

ANAÏS S’EN VA-T-EN GUERRE _ Extrait from Quark Productions on Vimeo.


Avec Sovereignty Dreaming, la réalisatrice Vanessa Escalante est, elle, venue, seule, à bout d’un film de quarante-sept minutes sur la révolte de femmes aborigènes d’Australie qui décident de se battre contre l’enfouissement de déchets nucléaires. Commencé en 2011, le film a d’abord bénéficié d’une campagne de crowdfunding sur Touscoprod, puis la réalisatrice, soutenue par une association, Initiatives dionysiennes, a complété de sa poche. Au final, Sovereignty Dreaming, qui a coûté 40 000 euros, a été acheté par la chaîne France Ô et commence, avec le Fife, une tournée de festivals. Vanessa Escalante n’a pour l’instant pu se rembourser que d’un tiers de son investissement. « Je n’avais rien anticipé. J’y suis allée en toute naïveté, et heureusement ! », lance-t-elle, satisfaite d’avoir mené son projet jusqu’à sa diffusion.

Découvrez la bande-annonce de Sovereignty Dreaming

Car lorsqu’Arte ouvre grand ses grilles à des Marie-Monique Robin, toutes les chaînes ne se montrent pas aussi accueillantes avec le documentaire tendance écolo. Le film d’investigation Climatosceptiques : la guerre du climat, de Laure Noualhat (collaboratrice de Terra eco) et Franck Guérin, a certes trouvé en France 5 un diffuseur de service public, mais pour sa productrice, Fanny Glissant, il s’agit là d’une exception.

Découvrez la bande-annonce de Climatosceptiques : la guerre du climat

« Le public attend désormais des films à thèse, qui offrent une vision, et il est vrai que nous n’avons eu aucun mal à vendre ce sujet qui donne des clés de compréhension politique sur le sujet du changement climatique, explique la productrice exécutive de la Compagnie des phares et balises. Mais il faut pourtant reconnaître que peu de films sont financés par les chaînes de télévision : la question écologique est passée depuis quelques années au second plan médiatique. L’intérêt des téléspectateurs – qui perçoivent ces questions comme des entraves à leur quotidien – a décliné. En conséquence, les sujets écologiques sont plus difficilement défendables dans les médias de masse. »

En matière de docu écolo, quelle est donc la recette du succès ? « Il faut qu’une communauté de gens s’empare du sujet porté par le film et débatte ! », répondent Sarah Chazelle et Etienne Ollagnier, cogérants de la société de diffusion de Jour2Fête. En 2013, ils ont piloté la diffusion du film Des abeilles et des hommes, lancé cette année-là au Fife, qui a totalisé, en fin de carrière, plus de 150 000 entrées, explosant les scores habituels des réseaux d’art et essai.

Découvrez la bande-annonce de Des abeilles et des hommes

« D’abord, c’est un grand film documentaire, avec un gros travail d’enquête et des images très fortes, analyse Etienne Ollagnier. Mais ce qui a marché, c’est la mobilisation autour du film : les plus grosses fréquentations sont venues, par exemple, de petites villes où le cinéma faisait venir des intervenants et réunissait les spectateurs pour discuter le temps d’une soirée. » Le beau documentaire de Markus Imhoof sur la disparition des abeilles, mais aussi leur incroyable capacité d’adaptation, a ainsi tourné dans 860 salles. Belle fortune également que celle des Chèvres de ma mère, de Sophie Audier, une autre pépite de Jour2Fête, sur la transmission du troupeau de Maguy – qui prend sa retraite – à la jeune Anne-Sophie. Grâce à la participation de la réalisatrice à la tournée du film, plus d’une centaine de débats ont été organisés. Avec ses 50 000 entrées au compteur, le film a été nommé pour le César du meilleur documentaire, qui sera décerné le 20 février prochain. « Le succès du film est lié à son sujet : l’agriculture, certes, mais aussi la transmission », analyse Etienne Ollagnier. « Ce qui est sûr, c’est que parler d’environnement ne suffit pas à assurer un succès en salles, note Sarah Chazelle. Le public est de plus en plus exigeant sur la qualité des documentaires. »

Découvrez la bande-annonce de Les Chèvres de ma mère

Pour ces professionnels, le Fife sert de test grandeur nature. C’est souvent la première fois qu’un film est projeté. On y prend le pouls des spectateurs, on y sonde le goût et l’envie du public avant de prendre le risque de lancer un documentaire dans la nature. Un moment précieux pour en prédire la destinée. En miroir, le public se laisse bousculer ou bercer par les images dures, époustouflantes, émouvantes ou poétiques, avec bonheur et nécessité. « Ce que les gens cherchent, c’est la possibilité de prendre le temps, lance Myriam Gast-Loup. Aujourd’hui, plus personne ne remet en cause les problèmes de la planète, mais les gens ont besoin d’avoir le temps d’y réfléchir, et c’est ce que leur offre le documentaire. »

A lire aussi sur Terraeco.net :
- « Huit jours de cinéma d’environnement : les choix de Terra eco »
- L’intégralité de notre rubrique « Culture »

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