C’est bien d’écouter la radio, ça donne des idées. Un matin fiévreux, me voilà pendue à France Inter, en train d’écouter Isabelle Giordano interviewer Gérard Bapt. Gérard Bapt ? Député socialiste de Haute-Garonne. D’habitude, les députés, je m’en méfie mais lui, ce n’est pas pareil, c’est le meilleur spécialiste de la santé environnementale sur les bancs de l’Assemblée nationale. Il venait causer du scandale Médiator. Et voilà qu’il lâche une bombe : « Si vous voulez faire bouger les choses, allez voir votre député, interpellez-le. Faites pression, demandez-lui de se positionner. Dites-lui que vous avez envie de connaître son point de vue et que vous souhaiteriez qu’il entende le vôtre. » Pas bête ça. Mon député ne répondra jamais aux questions que la citoyenne qui sommeille en moi ne lui pose pas. Me voilà donc déterminée à le harceler de questions sur tous les dossiers qui m’intéressent.
Un petit tsunami émotionnel
D’abord, je vous explique : un député, ça a des horaires. Une permanence, ça ouvre quand ça veut, en moyenne six heures par semaine. Et, bien sûr, pile poil pendant les horaires de travail. Mardi 10h-12h30, vendredi 15h-17h… Le mieux, c’est de débarquer à l’improviste, le matin de préférence et souriante, si possible. Les assistants classent le courrier, lisent le journal, accueillent les administrés avec courtoisie. Je vis à la Goutte-d’Or à Paris, un XVIIIe populaire, plein de vie et de nationalités. On y trouve des vendeurs de crack, des familles congolaises, des bistrots bigarrés, du bobo à la pelle, des arracheurs de téléphone portable et un intérêt très très limité vis-à-vis de la question environnementale. Du coup, mon député, Daniel Vaillant (PS), n’est guère sollicité pour ces questions et il n’est pas souvent là. La première fois, je suis passée un matin de grand froid. Il était en rendez-vous à l’extérieur. La seconde, c’était un après-midi. Absent là encore. Comme il n’est pas commun de voir entrer un citoyen qui n’a aucun service à demander, je crois pouvoir écrire que mon arrivée a déclenché un petit tsunami émotionnel. Evidemment, j’étais là incognito. J’ai finalement réussi à le croiser mais vite fait. Il a pris note de mes questions et m’a promis de me répondre dans les plus brefs délais.Moi, je voulais juste savoir ce qu’on va faire avec le bisphénol A. Pourquoi est-il interdit dans les biberons et pas dans les emballages alimentaires ? Ne veut-on réellement sauver que les enfants ? A propos du dossier nucléaire, quand est-ce qu’on ferme la centrale de Fessenheim, dans le Haut-Rhin ? Puis-je réclamer, par l’entremise de mon député, que la France cesse de financer le réacteur Iter – au passage, plusieurs dizaines de milliards d’euros pour un résultat hypothétique – ? « Envoyez-moi un e-mail », m’a-t-il répondu. Chose faite. L’histoire ne dit pas si c’est lui qui répond. Mais apparemment, celui qui le fait est compétent. « Je vous remercie de tant vous intéresser à la vie de la cité. » Il m’a rappelé avoir voté pour la proposition de loi visant à suspendre la commercialisation de biberons produits à partir de bisphénol A, comme l’ensemble du groupe socialiste. « Je fais également partie du groupe de liaison et d’échanges de la gauche et des écologistes », a-t-il précisé, visiblement intrigué par mes questions. Au passage, il milite pour la légalisation contrôlée du cannabis. Concernant le nucléaire, c’est plus délicat. Il s’aligne désormais sur la formule mi-figue mi-raisin de Martine Aubry : on doit pouvoir sortir du « tout nucléaire » dans les vingt-cinq ans qui viennent.
Affichage : Voir tout | Réduire les discussions