Début septembre, sa campagne de promos a fait l’effet d’une bombe. Plus que cinq jours pour tenter d’arracher des billets de Paris vers Barcelone à moins de 10 euros le trajet ! Pas de miracle : les tarifs d’Easyjet ont bel et bien une explication. Cette compagnie, on le sait, est une "lowcost". Elle affiche des coûts bas, qui l’autorisent à pratiquer des prix modiques, "moins chers que le simple acheminement en taxi jusqu’à l’aéroport", ironise dans un rapport Gille Bordea-Pagés, le directeur du développement du concurrent Air France.
Un sou est un sou
La compagnie au sigle orange et blanc ne se contente pas de comprimer ses coûts. Elle communique aussi sur le sujet. "Pourquoi sommes-nous moins chers", lance EasyJet sur son site Internet, en fournissant, grand prince, une réponse - partielle - à la question. Tout d’abord, le transporteur britannique n’embarque ses passagers qu’à bord d’un seul type d’appareil. Des Boeing 737 qui seront toutefois bientôt rejoints par des Airbus A319. L’avantage ? "Cela permet de faire des économies sur les pièces de rechange ainsi que sur la formation du personnel", explique la société. Et puis, à compagnie jeune - EasyJet est née en 1995 - correspondent des équipes jeunes. Or dans le transport aérien, le salaire, notamment celui des pilotes, est calculé sur la base de l’ancienneté...
Services minimum
Les avions d’EasyJet ne restent pas cloués plus d’une demi-heure au sol, contre au minimum le double pour les grandes compagnies. La raison : ces appareils effectuent seulement des liaisons de point à point, sans escale ni correspondance. De telles "économies d’échelle" premettent d’affréter davantage de vols chaque jour. La productivité est maximale. Autre explication : l’inexistence de la classe affaire, avec un double avantage. D’abord, le transporteur gagne en nombre de sièges. Et comme les passagers ne boudent pas la compagnie pour autant, le taux de remplissage dépasse 88% (août 2004). Second avantage : avec l’élimination de la classe affaires, les chances pour qu’à bord se trouvent des hommes d’affaires sont plus minces, un facteur qui est retenu dans le calcul des primes d’assurances. Dans le jargon des assureurs, on dit qu’à bord d’EasyJet, il y a davantage de "passagers à non haute contribution".
A bord, règne une ambiance de chasse au gaspi. C’est la règle du service minimum. Pas de sandwichs, ni de boissons gratuites, toute collation est payante. Pas plus de journaux distribués gracieusement. Là encore, on serre la ceinture. Trois hôtesses de l’air seulement - contre cinq à sept habituellement - assurent elles-même le ménage. Du coup, les frais de nettoyage sont considérablement réduits. Enfin, les vols sont vendus directement par Internet ou par téléphone. Pas de billets émis, donc pas de papier, et puis surtout, pas d’intermédiaire, donc pas de commission à verser à quelque agence que ce soit.
Les coups bas du marketing
Qu’en pense la concurrence ? A modèle économique différent, clientèle distincte, claironne-t-on chez Air France. "Nous n’avons rien à dire sur EasyJet, même s’il est vrai que certaines publicités mensongères nous agacent", lâche le service de presse. En guise de représailles, la campagne de pub d’Air France, il y a quelques mois, présentait le siège en toile (d’un passager d’une compagnie à bas prix) éventré par les genoux du voyageur installé derrière lui.
L’agacement effleurera peut-être également le client potentiel, persuadé de décrocher la bonne affaire. Car les prix affichés par EasyJet en 4 par 3 sont parfois bien loin de la réalité. A l’aller-retour Paris-Barcelone à 22 euros, il faut ajouter deux ou trois petits riens... Les frais de transaction bancaire (6,50 euros). Les taxes d’aéroport (15 euros). 7 euros supplémentaires par vol pour une réservation par téléphone. Enfin, gare à qui voudrait modifier son vol : 15 euros de pénalité, prévient EasyJet. Le magazine 60 millions de consommateurs s’est livré dans son édition de février dernier à un test sur les compagnies low cost. Pour ce qui concerne EasyJet, la conclusion est sans appel : "le pourcentage d’obtention du prix d’appel n’est que de 7%". Compagnie à bas coûts ou coup bas du marketing ?
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