Pas un magasin en France qui ne compte un label ou un rayon « conso responsable ». Et on voit chaque semaine des pubs et des nouveautés – parfois étonnantes – sur les étals. Auchan va ainsi vendre des légumes frais à proximité d’un drive ; E.Leclerc teste des rayons 100 % made in France ; Carrefour a ouvert un magasin où tous les produits viennent de « moins de 80 km ».
Alors, remarquable, la distribution française ? Lionel Bobot, chercheur à l’Inra (Institut national de la recherche agronomique), rappelle que « plus de la moitié des produits bios et près de 70 % des produits équitables vendus en France » passent par les chariots des grandes enseignes. Avant de préciser : « La grande distribution est une machine à innover. Cela dit, elle garde sa stratégie de prix et son rapport de force avec les producteurs. » Sauveur Fernandez, consultant en marketing écolo, renchérit : « Les distributeurs sont des épiciers qui se sont enrichis. Ils gardent leur réflexe d’origine, qui est de se dire : “ Si trois clients me demandent un produit, je dois en vendre, parce qu’un quatrième client viendra et il y aura de l’argent à y gagner ”. »
La faute est en partie à rejeter sur le consommateur. L’alimentation représentait 25 % des budgets en 1960, contre 12 % aujourd’hui. « Le consommateur veut payer moins cher des produits plus responsables. La distribution répond donc à ces attentes avec des stratégies bourrées d’anomalies », estime Sauveur Fernandez. Mais vouloir être responsable sans y réfléchir, ça finit par se voir. En juillet 2010, la Fédération nationale de l’agriculture bio s’inquiétait car les enseignes françaises faisaient la course au bio à prix cassés (voir Terra eco n °24, avril 2011). Ce qui menaçait de « fragiliser la filière dans son ensemble ». L’expert Alexandre Pasche appelle donc à la cohérence : « On ne doit plus trouver dans le même magasin du bio et du Roundup (herbicide, ndlr), ni trouver un cartable labélisé et un cartable peut-être fabriqué par un enfant. »
Les exemples sont sans doute à trouver à l’étranger. La fondatrice du site Mescoursespourlaplanète.com, Elisabeth Laville, cite notamment en modèle Marks & Spencer, qui s’est engagé à ce que les produits labélisés représentent 50 % de ses ventes d’ici à 2015 et 100 % d’ici à 2020. « Les enseignes doivent annoncer comment elles vont opérer une transition majeure de leur offre. Aucun distributeur français n’a franchi ce pas. » —
Et moi, je fais quoi ?
Commencez par réfléchir à la part que représente l’alimentation dans votre budget. Ensuite, tentez de récompenser le distributeur le plus vertueux près de chez vous.
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