Logement : « Ils ont signé le contrat, on ne les lâchera pas »

Patrick Doutreligne est délégué général de la fondation Abbé Pierre.

Terra eco : Nous arrivons au terme de la campagne. Que regrettez-vous ?

Patrick Doutreligne : On pensait en fin d’année dernière que le pouvoir d’achat serait un thème majeur de la campagne mais ça n’a pas été le cas, alors que c’est une préoccupation majeure des Français. On n’a pas parlé de l’augmentation des charges, du prix du gaz, du fioul, de l’électricité… Il n’y pas eu de grand débat de société.

Sur notre thématique, celle du logement, on est partagé. Au mois de janvier, on a vu la campagne démarrer sur le logement et ça nous a plutôt satisfait. On y a largement participé avec la fausse vraie candidature d’Eric Cantona, l’interpellation des citoyens à travers une pétition. Pendant quinze jours - trois semaines, le logement est devenu un thème majeur, alors que ce n’avait pas été le cas il y a cinq ou dix ans. Puis un thème a chassé l’autre. On a parlé de la viande halal, des professeurs (plus précisément de leur temps de travail de l’insécurité, ndlr)… Mais bon disons qu’en général, nous n’avons pas été les parents pauvres de cette campagne.

Pensez-vous justement qu’il y a quelque chose à sauver dans cette campagne ?

Il y a eu un vrai engagement des candidats avec la signature de notre contrat social sur le logement. 6 candidats sur 10 l’ont signé. Si on enlève le Front national - que nous n’avons pas sollicité - seuls 3 candidats (Nicolas Sarkozy, Nathalie Arthaud, Nicolas Dupont-Aignan, ndlr) ne l’ont pas fait. Le contrat social s’est signé autour de 4 grands axes. D’abord la production de logements. A part du côté du FN, il y a une unanimité autour du besoin impérieux de construire même si le curseur n’est pas toujours le même sur le nombre de logements sociaux. Le deuxième axe – l’encadrement des loyers – était plus clivant. A l’UMP, on disait que c’était une hérésie jusqu’à ce que le Président ne reprenne l’idée. Là aussi, les avis ont fini par converger. Sur le troisième axe – comment garder un élément de solidarité fort –, dans le discours, personne n’est contre. Même si dans les actes, il y a de forts clivages. La gauche et l’extrême gauche accentue la défense des plus modestes, la droite rappelle la distinction qu’il faut faire entre assistance et assistanat. Enfin, sur le quatrième axe, celui de la mixité sociale, tout le monde s’accorde sur le fait qu’il faut augmenter de 20% à 25% la part des logements sociaux dans les villes. Même si l’UMP dit que dans certaines zones moins tendues il faut plutôt un taux de 15%. Aujourd’hui, tout le monde s’accorde au moins sur le constat du mal-logement.

Quel est à votre sens le ou les défis du prochain quinquennat en matière de logement ?

C’est le contexte économique ! Est-ce que la crise sera prétexte à dire, « Je l’aurais bien fait mais on n’a pas les moyens » ? C’est notre crainte majeure. Mais, à la différence de 2007, ils ne pourront pas nous dire que ça leur est tombé dessus. La crise, on sait qu’elle existe. On n’acceptera pas cette excuse. Maintenant qu’ils ont signé le contrat, on se prépare à devenir un comité de vigilance de ces engagements. Et on va commencer ça dès le 5 mai et le 17 juin. Les promesses qu’on a fait signer vont loin dans la sophistication, ça va nous aider. Chaque année, la fondation publie un rapport sur le mal-logement. On a déjà prévu qu’en 2013, il comporte une grosse partie sur « voilà où nous en sommes des promesses évoquées. Voilà quelles sont celles qui ont été tenues, partiellement ou pas ». On ne les lâchera pas.

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