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6-01-2005
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Finance

Le compte n’est pas si bon

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Les normes comptables sont le cadet de vos soucis ? Pourtant, leur évolution en dit long sur l'évolution du monde des affaires, et comporte bien des enjeux sociétaux. Explications.
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C’est un univers aride, fait de tableaux incompréhensibles par le commun des mortels. Il est pourtant lui aussi porteur d’enjeux de société. Depuis le 1er janvier, le petit monde des comptables dispose de nouvelles règles. Auparavant, chacun vivait dans son coin et les comptes des entreprises étaient présentés en fonction de règles nationales.

Ces règles se nomment International Financial Reporting Standards (IFRS). Elles constituent une étape sur le parcours vers un vieux rêve de financier : la normalisation planétaire de la comptabilité d’entreprise. Les IFRS, imposées par Bruxelles aux comptes consolidés des sociétés européennes cotées en Bourse [1] ont pour finalité de faciliter la lecture des comptes par les actionnaires.

Yo-yo

En France, les IFRS sont une révolution, car elles imposent une vision financière plutôt qu’industrielle de la valeur de l’entreprise. Le concept de "juste valeur" est la colonne vertébrale des IFRS, impliquant de tout comptabiliser à la valeur du marché. Celle du jour. Exit, donc, les ficelles comptables comme celle consistant à "amortir" l’acquisition d’un actif - un bien immobilier par exemple - sur plusieurs années. Conséquence : la valeur de l’entreprise sera plus volatile. Par réaction en chaîne, les cours de Bourse risquent de jouer au yo-yo.

Cette volatilité est problématique car elle risque de faire de l’emploi l’ultime variable d’ajustement aux mains des directions. Qui plus est, elle atteint son paroxysme dans le secteur financier (banque et assurance), où l’argent des clients permet de financer des produits "exotiques" hautement sophistiqués, et où l’équilibre financier ne se fait que sur le fil. C’est pourquoi le lobby bancaire s’est fortement mobilisé dans plusieurs Etats - France en tête - et a réussi à faire bloquer à Bruxelles certaines dispositions des IFRS 32 et 39, le concernant directement.

Comptabilité créative

Autre sujet de préoccupation, les IFRS permettent d’interpréter plus largement les comptes. La règle étant plus souple, la responsabilité de la tenue des comptes pèsera davantage sur les frêles épaules de l’auditeur. Ce dernier risque de se trouver bien seul face aux éventuelles pressions des dirigeants de l’entreprise - accessoirement sa cliente - dont il tient les comptes.

Les inquiétudes que suscitent les IFRS n’ont pas empêché la Commission européenne de leur donner un vernis de légitimité, en assurant que ces règles devaient "répondre à l’intérêt public européen". Mais la Commission s’est le plus souvent contentée de valider les positions de l’International Accounting Standards Board (IASB), concepteur des IFRS qui travaille de façon empirique et autarcique.

Né au milieu des années 1990 en prolongement d’un groupe de réflexion commun aux normalisateurs comptables australien, britannique, canadien et américain, l’IASB n’a aucune légitimité démocratique, siège a Londres et prend la forme juridique d’une fondation basée dans le Delaware (Etats-Unis). Composée de dix anglo-saxons sur quatorze membres, l’IASB rappelle souvent qu’elle n’est aux ordres d’aucune institution, quelle qu’elle soit.

"Les Etats subissent"

En fait, si Bruxelles a validé l’essentiel des règles IFRS, c’est parce que ces normes lui permettent de se débarrasser d’une mosaïque de systèmes comptables nationaux. Cette harmonisation lui sert au passage de Cheval de Troie pour avancer sur la chatouilleuse question de la fiscalité, un des derniers pans de souveraineté des Etats membres. De fait, l’avènement d’un système comptable unifié facilite la mise en place d’une fiscalité pan-européenne. "On a l’impression que les Etats subissent plus qu’ils ne canalisent ces processus d’intégration", s’alarmait ainsi au dernier Congrès des experts-comptables Guy Gest, professeur de droit fiscal à Paris II-Assas. "Il y a une très forte pression pour une intrusion, sous une forme ou sous une autre, des IFRS dans toute l’économie", ajoutait Antoine Bracchi, président du Conseil national de la Comptabilité (CNC). Pour lui, les IFRS auront tout conquis en quelques années.

Mais ce n’est pas tout. L’Europe prépare une adaptation des normes pour les Petites et Moyennes entreprises. On ne voit guère, pourtant, l’intérêt des PME de disposer d’une comptabilité tournée vers les nvestisseurs, puisqu’elles font rarement appel à l’épargne publique.

De leur côté, l’IASB et le FASB, son homologue américain, ont déjà entamé l’harmonisation entre les IFRS et les règles américaines (US Gaap). Un pas de plus vers l’unification planétaire des normes comptables, prévue pour 2008.

[1] Règlement de juillet 2002 concernant environ 7000 sociétés officiellement, mais en réalité ce sont près de 30000 entités qui sont concernées.

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