Poulets, vos papiers !

Un jour, vous ne mangerez peut-être plus une côte d’agneau sans rien savoir de la bête dont elle provient. Ni de l’étable où elle est née, ni du pré où elle a grandi, ni de l’abattoir où elle a fini sa vie. Ce mercredi, le Parlement européen a voté pour la mention obligatoire de l’origine géographique de tous les produits laitiers et de toutes les viandes sur les étiquettes. Un règlement déjà obligatoire en Europe pour le bœuf non transformé – vache folle oblige –, le poisson, les fruits et légumes frais, les œufs, le miel et le vin. Reste désormais aux gouvernements européens à amender le texte qui devra ensuite être voté en deuxième lecture. L’industrie alimentaire aura alors trois à cinq ans pour s’y plier.

Mais nous, à Terra eco, on est un peu pressés. Car au bout du compte, que risque-t-on d’apprendre avec cette mesure ? Que notre pot de yaourt a fait le tour de la terre ? Que notre escalope de veau est française jusqu’au bout des os ? Levons donc un petit bout du voile du côté du rayon boucherie.

 Le porc : s’il n’est pas français, il est espagnol

Le porc, c’est la viande préférée des Français. En côte, en jambonneau, en sauciflard, on se l’arrache. Plus que l’entrecôte, plus que le blanc de poulet. Mais votre « Babe » en tranches est-il franco-français ? Sur les 1,88 millions de tonnes équivalent carcasse (tec) avalés sur le territoire français en 2008 (cette unité très « poétique » sert à comparer à la fois des animaux vivants et de la viande sous formes diverses), 1,28 million viennent de porcs français, soit 68%. Et pour le reste ? Il a grandi dans les champs ou les étables de nos voisins européens. Premier fournisseur de l’Hexagone : l’Espagne, qui remplit 64% de son cahier d’importation en viande fraîche ou congelée.

 Le mouton, la brebis et l’agneau : à 13% néo-zélandais

C’est le temps des grillades. La côte d’agneau vous fait de l’œil. Et vous n’êtes pas le seul. Chaque année, les Français en consomment 3,64 kilos chacun. Soit un festin de 234 000 tec à l’échelle de la France. Serions-nous trop gourmands ? En tout cas, avec 100 900 tec produits sur nos terres, nous ne sommes qu’à moitié satisfaits. Du coup, on importe 131 000 tec d’ovins dont 98 000 de viande fraîche chaque année. Certains agneaux n’ont qu’à s’offrir une gentille brasse depuis le Royaume-Uni (44%) ou l’Irlande (17%). D’autres se tapent quelques milliers de kilomètres avant de rejoindre nos assiettes. 24% de la viande ovine que nous importons provient en effet de Nouvelle-Zélande. 13% de celle que nous consommons.

 Les volailles : européennes presque à tous les coups

Poulets, dindes et canards ne restent pas sur le carreau. Les Français boulottent chaque année 1,6 million tec de ces bêtes à plumes. Soit 25 kilos par habitant. Mais cette fois-ci, les Français ont les yeux plus gros que le ventre. Car de la viande de volatile, ils en produisent encore plus qu’ils n’en mangent : 1,8 millions tec en tout (dont 54% de poulets et 24% de dindes). Seulement voilà… l’Hexagone se plaît aussi à exporter de la volaille sous toutes ses formes. Du coup, elle doit importer 378 000 tec chaque année. En tendant la main vers une bête à plumes vous avez donc quasiment une chance sur quatre de tomber sur une étrangère. Mais rassurez-vous, dans la quasi-totalité des cas, ce sera une ressortissante de l’UE.

 Le veau : français et parfois néerlandais

Les Français avalent 254 800 tec de ce jeune bovin chaque année. L’Hexagone en produit 216 100 tout compris et en exporte… pas. Ou presque. Du coup en achetant du veau, vous avez de grandes chances de tomber sur un Français. Sinon, eh bien vous mangerez néerlandais dans 92% des cas.

 Le cheval : du canasson canadien

Et bien oui, il y a encore des gens qui mangent du cheval. 21 000 tec sont ainsi consommés en France chaque année. Si elle produit peu (seulement 5 620 tec), la France se paye quand même le luxe d’exporter plus qu’elle ne produit. Pour combler les amateurs de bifteck version canasson, nous importons 25 000 tec de viande chevaline. Résultat : vous mangerez du cheval étranger à coup quasi-sûr. Et la plupart du temps, il aura traversé l’océan, après avoir grandi du côté du Canada (46% de la viande importée).