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Ma Jun : « notre rapport met la pression sur Apple »

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Ma Jun : « notre rapport met la pression sur Apple »
(Photo : Ma Jun. Crédit : www.raulvasquez.com)
 
Dans un récent rapport, un consortium d'ONG chinoises relègue la marque en bon dernier en terme de responsabilité et de transparence environnementales et sociales. Questions à Ma Jun, l'écolo chinois qui a osé tacler le géant californien.
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Terra eco : L’Institut pour les affaires publiques et l’environnement (IPE), l’ONG chinoise que vous dirigez, a publié en janvier dernier un rapport épinglant les pratiques environnementales et sociales des fournisseurs d’Apple en Chine. Qu’est-ce qui vous a lancé sur la piste de cette investigation ?

Ma Jun  : Ce rapport est en fait la 4ème partie de l’investigation que nous menons depuis fin 2009 sur les pollutions engendrées par l’industrie des technologies de l’information en Chine. Nous avons commencé celle-ci suite aux cas de pollutions qui apparaissaient alors et à cause desquels des centaines de Chinois, dont des enfants, ont été affectés par des métaux lourds. Depuis avril 2010, quand nous avons publié la première partie de notre travail, de nombreuses marques se sont rapprochées des ONG ayant pris part à cette enquête afin d’essayer de résoudre les problèmes touchant leurs fournisseurs locaux. Apple est la seule à être restée silencieuse à nos appels, et c’est ce qui nous a conduit à les placer à la 29ème place de notre classement.

Le 15 février dernier, Apple a publié son audit de responsabilité annuel dans lequel l’entreprise reconnait certaines dérives chez ses sous-traitants. Qu’en dites-vous ?

Apple c’est toujours le « culte du secret ». L’entreprise n’a pas souhaité par exemple répondre sur le fait que les fournisseurs incriminés étaient ou non liés à leur société. Mais je suis assez satisfait car dans leur document annuel, ils mentionnent des cas d’empoisonnement ou de suicide que nous avons dénoncés dans nos rapports, comme les 137 employés de Wintek, qui ont été gravement exposés au n-hexane en 2010, ou les 12 suicides de travailleurs survenus en 2009 chez Foxconn, le plus gros fournisseur chinois d’Apple. Je reste malgré tout prudent. Nous avons également signalé beaucoup d’autres problèmes, notamment liés à la pollution... et ceux-là ont été oubliés. Ce qui est sûr, c’est que l’importante reprise médiatique de notre rapport, en Chine et à l’international, a positivement mis la pression sur Apple, ce qui a très certainement amené ce premier pas de leur part.

Et en Chine, quelles ont été les réactions suite à votre travail ?

Ce n’est jamais très facile de travailler en tant qu’ONG ici. Nous n’avons pas une longue histoire de transparence et de participation publique et cela prendra du temps de faire parler ensemble gouvernement, industriels et ONG. Publier ce genre de documents, qui met en cause des entreprises chinoises, n’est de fait jamais bon pour l’économie : on a ainsi pu observer une certaine tendance des politiques locaux à essayer de protéger les pollueurs ! Nous n’avons par contre pas eu de réactions directes du gouvernement chinois. Mais des chercheurs affiliés ou les journaux des agences gouvernementales, comme celles spécialisées en environnement ou en santé, sont venues nous voir pour essayer de mieux comprendre le problème. Tout cela va dans le sens de réduire le fossé qui sépare l’administration et la réalité sur le terrain, et le message ne peut qu’en être amélioré. C’est plutôt positif.

Une façon de prolonger l’effort de transparence dont a déjà fait preuve l’administration chinoise en publiant les données gouvernementales sur la qualité de l’air et de l’eau ?

Les ONG environnementalistes ont effectivement récemment acquis une meilleure place en Chine, et nous pouvons aussi désormais avoir accès aux bases d’informations du gouvernement. Depuis 2006, nous avons ainsi collecté 75 000 enregistrements sur la qualité de l’air ou de l’eau, tirées des statistiques officielles, ce qui nous a permis de dresser des cartes de la pollution région par région. Vérifier la qualité et la validité de ces données reste bien évidemment une priorité... Pour cela, nous confrontons entre elles les informations issues de différences agences gouvernementales, afin de déceler d’éventuelles anomalies et de les signaler. Nous menons aussi parfois nos propres investigations, comme pour certains cas d’empoisonnement dénoncés dans le rapport visant Apple. Mais utiliser les données officielles a un avantage : les pollueurs ne peuvent pas nous envoyer leurs avocats, puisque ce n’est pas nous qui disons cela, mais les statistiques gouvernementales !

Comment situez-vous les combats menés par les ONG chinoises, au regard des campagnes lancées par les grandes ONG occidentales, comme Greenpeace ou le WWF ?

Notre travail est important et complémentaire. Dans la situation actuelle de globalisation économique, nous sommes devenus l’atelier du monde. En Occident, vous vous préoccupez surtout des problèmes qui surviennent sur les produits finis, qui vous sont exportés, comme de savoir si ils contiennent des produits toxiques ou s’ils sont sûrs d’utilisation. Mais ici, nous sommes aux premières loges pour dénoncer les méthodes de fabrication et s’assurer qu’elles ont un impact environnemental faible et ne rejettent pas, par exemple, des métaux lourds ou d’autres toxiques. Et c’est malheureusement le cas pour l’industrie des technologies de l’information. C’est dans l’intérêt de la Chine de reconnaître enfin cela, car si ces problèmes s’aggravent, elle ne s’en relèvera pas, environnementalement mais aussi économiquement.

A lire aussi sur Terra eco :
- Ma Jun, l’empêcheur de polluer en douce
- Un militant écologiste chinois raconte son calvaire
- Apple : une marque « cool » ? Qu’en pensez-vous ?

Sources de cet article

- "La face cachée d’Apple" : le rapport de l’ONG chinoise IPE
- Le rapport annuel d’Apple sur la responsabilité sociale

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Une enfance en pleine nature jurassienne, des études de biologie et de géologie, l’envie de transmettre cette passion pour le monde vivant, et le monde tout court, et un goût sans limite pour les nouvelles contrées. Alice est journaliste scientifique.

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