La Turquie, terre d’histoire et de golf

Partir en congés sans mettre sa conscience en vacances : ce n’est pas si simple. Tous les quinze jours, l’association Echoway nous plonge dans les petites et grandes histoires de l’industrie mondiale du tourisme. Coups de cœur et des coups de gueule pour découvrir un "autre voyage". Cette semaine, plongée dans les nids de poule de la station balnéaire de Cancun.

« Dis Maman, c’est quoi la Turquie ? »

« Un pays sans traditions ni culture, ma chérie, mais un pays où les pelouses sont vertes et où papa jouera au golf ».

Une maman pourrait ainsi à sa fille en découvrant la toute nouvelle campagne de publicité de la Turquie pour vendre son pays. Que pouvez-vous faire en Turquie ? Eh bien... du golf. La Turquie n’aurait donc rien de mieux à mettre en avant que ses vertes pelouses : les 10000 ans d’histoire et d’archéologie, l’architecture, la gastronomie, l’artisanat du peuple turc, n’intéressent pas le touriste moderne. Le golf en revanche, le met en extase, si l’on s’en tient à l’affiche publicitaire.

Notez que si notre premier touriste est jeune et mince, au second plan, les têtes pensantes de la vente ont placé un cinquantenaire bedonnant en short. Tout cela pour nous dire qu’il n’y a pas d’âge ni de condition physique requise pour être heureux et bien dans sa peau en Turquie.

Le touriste a également un air insouciant : ce sont les vacances, de quoi va-t-il se préoccuper ? Un décor où il fait bon respirer, des arbres en nombre au loin et un plan d’eau. Le golf, le luxe, la nature et vous pourrez alors crier : "TURQUIE !"

Eau et fertilisants

Si vous êtes ce touriste, en passe de partir dans un hôtel de luxe en Turquie pour jouer au golf, et que vous voulez vivre la sérénité, ne lisez pas ces lignes. Car la première des choses que peut faire un touriste un brin responsable, c’est d’arrêter de jouer au golf sous toutes les latitudes.

Ces milliers de golfs construits dans les années 90 consomment des millions de mètres cubes d’eau et des tonnes de fertilisants. Alors on peut imaginer que les futurs projets touristiques n’incluent plus dans tous leurs plans, « l’inévitable golf », si les touristes les délaissent. On pourrait proposer que le golf, noble sport à n’en pas douter, retrouve ses terres d’origine, l’Ecosse. Les Écossais, en effet, revendiquent l’invention de ce sport, qui serait même mentionné dans deux lois du XIVe siècle. Toujours selon eux, un golf construit sur des terres pluvieuses et ombragées ne nécessite presque pas d’arrosage ni de produits chimiques. L’herbe y est naturellement verte et souple. Si le touriste veut respirer l’air du vrai golf, c’est à n’en pas douter en Ecosse qu’il doit aller.

Malheureusement, les promoteurs touristiques ont créé « une moyenne de 350 golf par an dans les années 90 » selon l’ONG anglaise Tourism Concern. C’est seulement la crise économique asiatique, à la fin de la décennie, qui a mis un terme à ce boom. Dans le rapport sur les effets du tourisme sur l’environnement, le PNUE (Programme des Nations Unies pour l’environnement) estime que « les golfs consomment chaque jour au moins 525,000 gallons d’eau soit la consommation de 100 paysans locaux. Ils nécessitent également une tonne et demie de fertilisants et de produits chimiques par an pour l’entretien [d’un golf] ».

En Turquie, il fait chaud, très chaud. Derrière l’affiche exhibant notre touriste heureux muni de sa canne de golf, il faut bel et bien visualiser des hectolitres entiers d’eau consommés.