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29-11-2007
Mots clés
Finance
France

Donner, c’est dépenser

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La fin d’année constitue un pic pour toutes les associations qui font appel à la générosité du public. Si les missions des ONG sont assez médiatisées, l’impact économique qu’elles génèrent reste peu connu.
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"Alors, ça rapporte l’humanitaire  ?" Voilà une question à ne jamais poser à une ONG. En cette période de Noël, alors que les associations multiplient les appels à la générosité, difficile de les faire causer gros sous. Les ONG créent-elles une économie ? « C’est un raccourci que nous ne ferons pas », répond-on prudent, aux Restos du coeur. Les chiffres parlent pourtant d’eux-mêmes. En 2005, en grande partie grâce à l’effet tsunami, les Français ont sorti 1,8 milliard d’euros de leurs poches pour les offrir à l’ensemble du monde associatif [1].

Ce grouillant milieu compte plus d’un million de structures et emploie 1 050 000 équivalents temps plein, soit 5 % des salariés du privé en France. Selon le Centre d’études et de recherche sur la philanthropie (Cerphi), le nombre de salariés y a progressé de 20 % entre 1999 et 2005. François Rubio, secrétaire national de l’Union nationale des organismes faisant appel à la générosité du public (Unogep), estime que le secteur non lucratif représentait 3,4 % du PIB en 2005. Les ONG, elles, « constituent l’un des secteurs où la hausse d’emploi a été la plus forte ces dix dernières années », affirme Marc- Antoine Pérouse de Montclos, fondateur de l’Observatoire de l’action humanitaire. Mais elles ne représentent qu’une goutte d’eau dans cet océan associatif, avec seulement 4 400 salariés [2].

Noël est une période cruciale pour toutes ces associations. Exemple avec la Fondation de France dont le spot a été diffusé pendant un mois à la radio et sur la Toile. Son but : mobiliser d’éventuels donateurs en mettant en scène des personnes peu enclines à mettre la main au portefeuille. L’opération n’a rien d’anodin. La Fondation de France récolte 70 % de ses dons à l’entrée de l’hiver. Et elle n’est pas la seule. Dynamique et porteur, l’humanitaire crée donc des richesses. « Ce n’est pas notre vocation première, déclare-t-on malgré tout au sein de Médecins du monde. Les dons nous servent avant tout à ouvrir de nouvelles missions. » Pourtant, les voitures et les tentes qui hébergent bénévoles et salariés ont un coût. Idem pour les soins délivrés aux plus défavorisés. En 2006, Médecins du monde a ainsi consacré plus de 3,5 millions d’euros au matériel médical.

Barres d’arachide et 4x4

Les entreprises ont, elles, vite compris comment exploiter le filon. Car tout comme l’automobile ou le chocolat, le secteur non lucratif possède ses grands rendez-vous : les salons de l’humanitaire. A Londres, Genève ou Paris, les fabricants dévoilent leurs dernières trouvailles face à un public ciblé. Cartons du moment : la lampe et le réfrigérateur à énergie solaire, ou bien la caisse de transport en aluminium. « Il existe un marché spécifique dédié aux ONG », reconnaît Marc-Antoine Pérouse de Montclos. Démonstration avec le Plumpy’nut. Commercialisé uniquement dans le cadre de programmes humanitaires, cet aliment à base d’arachide permet de soigner les cas de malnutrition sévère. Son atout principal tient dans la simplicité de sa préparation. Nul besoin d’eau en effet pour le transformer en barre nutritive.

Les filières automobiles ne sont pas en reste. Les ONG sont ainsi nombreuses à s’équiper de 4x4 Toyota. Car la marque nippone a eu le nez creux. Elle a créé une division spécialisée, qui compte parmi ses clients, Médecins sans frontières, l’organisation britannique Oxfam et les Nations unies. Ceux-ci peuvent passer commande d’un modèle muni de deux réservoirs d’essence, de renforts métalliques ou de parechocs élargis. Il suffit pour cela de sortir le carnet de chèques. Les modèles sont facturés de 10 000 à 40 000 euros pièce. Générosité à l’américaine Sur un quart des associations faisant appel à la générosité du public, seulement 4 % affichent des budgets majoritairement alimentés par les dons, explique Viviane Tchernonog, chercheuse au laboratoire d’économie sociale du CNRS.

La plupart recourent donc à d’autres types de financements qui leur laissent alors moins de latitude dans le choix de leurs fournisseurs. L’Union européenne fait partie de ces bailleurs de fonds. En contrepartie, les ONG s’engagent à s’approvisionner dans leur pays d’origine ou sur le territoire européen. Mais si les Français restent discrets sur le sujet, les Anglo-Saxons, eux, assument sans complexe le gain économique engendré par l’aide aux plus démunis. Et la méthode semble convaincre. Un citoyen américain donne sept fois plus qu’un Français. En 2005, l’association de solidarité américaine World Vision a ainsi récolté près de 1,3 milliard d’euros. « Le don fait partie intégrante de la mentalité américaine, souligne François Rubio. Un club très fermé, appelé “ Fifty-fifty ” a même été créé là-bas. Les membres s’engagent à reverser la moitié de leur salaire au secteur non lucratif. Il y règne une véritable compétition pour être celui qui donne le plus. » La France n’en est pas encore là. —


Les pros de la collecte « Savez-vous combien de personnes décèdent du sida chaque année ? » On pensait éviter les jeunes gens aux K-way rouges aujourd’hui, mais ils ont changé de trottoir. Hier, ces étudiants à la tchatche bien rôdée collectaient pour Médecins du monde, demain ce sera sans doute pour WWF ou la Ligue contre le cancer. Bénévole acharné ? Non, ce jeune homme est salarié d’ONG Conseil. Créée en mars 2004, cette SARL collecte des dons pour les associations. Pour 10 euros brut de l’heure, ses salariés battent le pavé huit heures par jour, à la recherche de donateurs réguliers. Avec 5,45 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2005, le business est florissant. L’entreprise travaille avec une dizaine d’associations.


Les 4 plus grosses ONG françaises

- Médecins sans frontières-France 146,8 millions d’euros de budget, 60 projets dans 32 pays (rapport financier 2006)

- Médecins du monde 53,2 millions d’euros de budget, 350 missions de suivi et d’appui technique (rapport moral 2006)

- Handicap International 72,8 millions d’euros, actions dans une soixantaine de pays (rapport moral 2006)

- Action contre la faim 48,5 millions d’euros, missions dans 25 pays (rapport financier 2006)

[1] Contre 1,1 milliard en 2002.

[2] Source : Commission coopération et développement du ministère des Affaires étrangères (hors personnel local).

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  • J’aimerais quant à moi davantage de synergie entre associations d’aide aux plus démunis en local et à l’international.
    C’est ce que j’ai exprimé récemment à MSF ; en effet leur campagne de mobilisation par téléphone (1 euro par semaine) est faite à partir du maroc pour des raisons de coût. N’y a t il pas en métropole des gens qui auraient besoin de cette fonction sociale et de ces revenus ?

    5.12 à 10h40 - Répondre - Alerter
    • Concernant l’article, je trouve que c’est une excellente idée d’informer le public sur l’enjeu économique des ONGs, je rejoins d’ailleurs l’avis de Benoît à ce sujet.
      Pour ce qui est de l’opération de MSF, si l’on regarde de manière plus globale :
      - MSF est une association qui a des antennes dans plusieurs pays du monde
      - MSF (et ses adhérents) souhaite(nt) (comme toute ONG qui se respecte) que ses dons profitent au mieux aux opérations sur le terrain, la limitation des coûts de fonctionnement est un des paramètres
      - Le taux de chômage du Maroc est comparable à celui de la France (autour de 9%).

      Etant donné tout ces paramètres, il me semble que l’option choisie par MSF est censée et profite globalement au plus grand monde il me semble.
      Mais ce n’est que mon avis...
      Après, si vous ne souhaitez pas "cautionner" les emplois au Maroc, rien ne vous empêche de faire un don "classique" avec un virement bancaire "classique" de 4/5 euros par mois (soit 1 euro par semaine environ), opération qui existe depuis 5-10 déjà chez MSF...

      Voir en ligne : Don 1 euro par semaine sur le site de MSF...

      13.12 à 10h18 - Répondre - Alerter
  • Je trouve vraiment intéressant de soulever l’enjeu de l’économie des ONG. En effet, je trouve que lorsque l’on parle d’emploi en France on omet systématiquement les créations d’emplois dans ce que les anglo-saxons nomment le tiers secteur.
    Il y a pourtant là un formidablement gisement pour de nouveaux professionnels. Il est possible de faire carrière dans le "non profit".
    Ce constat pourrait également être appliqué à l’univers de l’économie sociale.

    Enfin, tout ça pour dire que la croissance "du bonheur" et des emplois ne doit pas être essentiellement appréhendée sous l’angle des entreprises privées (capitalistes) et donc que les mesures en faveur de l’emploi doivent intégrer toutes les composantes du marché de l’emploi.

    Quand on aura intégrer cela de manière large au plan national on pourra dire qu’il y a un réelle économie des ONG.
    Je pense que c’est une bonne chose. Il faut donc que Terra Economica et d’autres continuent à informer sur les réalités de l’humanitaire, du social et de l’environnement.

    1er.12 à 19h23 - Répondre - Alerter
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