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26-01-2015
Mots clés
Sciences
Biodiversité
France
Reportage

Comment je n’ai pas vu le roitelet huppé au parc Montsouris

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Comment je n'ai pas vu le roitelet huppé au parc Montsouris
(Crédit photo : Oiseauxvendee - Wikimedia)
 
Ce week-end avait lieu le troisième comptage hivernal des oiseaux des jardins. Une opération de science participative qui permet de récolter des données essentielles pour les chercheurs qui étudient le déclin de certaines espèces.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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La petite bruine neigeuse qui tombe sur le parc Montsouris, dans le XIVe arrondissement de Paris, n’a pas empêché les courageux de venir. Un petit groupe d’une vingtaine de personnes, équipées de bonnes chaussures de marche, de mitaines et de bonnets, écoute les instructions de Mélissa. L’animatrice de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) distribue des jumelles à ceux qui n’en ont pas et explique comment se servir de la fiche de reconnaissance des oiseaux. Car ce samedi matin, point de randonnée au programme. Bien au contraire, on va faire du sur-place, ouvrir grands nos yeux et nos oreilles et compter les pioupious. Pour la troisième année consécutive, le programme de sciences participatives « Oiseaux des jardins », porté par la LPO et le Muséum national d’histoire naturelle, proposait aux particuliers d’aider, le temps d’un week-end, les scientifiques à collecter des données nationales sur la présence des bêtes à plumes. En restant chez soi ou en se rendant dans un parc public, tout était bon, pourvu que le protocole soit respecté. « On compte pendant une heure et on va essayer de ne pas compter deux fois le même oiseau », explique Mélissa à ceux qui, dépourvus de jardin et parfois d’expérience ou désireux d’en savoir plus, suivait la classe verte proposée à cette occasion par la LPO.

(Crédit photo : Cécile Cazenave)


Plus facile à dire qu’à faire. Alors que mon voisin a repéré le merle noir et quatre pinsons des arbres qui sautillent sur la pelouse glacée, mes jumelles n’arrivent à faire le point que sur un joggeur suant. J’ai bien repéré la pie bavarde qui explore une jardinière, mais je sens qu’on sourit gentiment dans mon dos quand je m’exclame à la vue d’une corneille noire qui vient de quitter sa branche, la prenant pour un rapace… « C’est une question d’habitude. A force, vous réussirez même à les identifier à contre-jour ou à leur manière de s’envoler », me rassure Antoine, 24 ans, ancien bénévole de la LPO récemment installé à Paris, à qui la nature manque.

Plus de 900 000 données récoltées

A chaque oiseau repéré, un bâton sous l’image correspondante de l’une des cinquante-deux espèces répertoriées sur la fiche de comptage. A la fin de l’opération, les résultats seront enregistrés en quelques clics sur le site dédié à l’opération. « Il y aura bien sûr des données fausses ou des doubles comptages, explique Marjorie Poitevin, responsable du programme à la LPO. Mais proportionnellement, elles seront noyées sous les vraies données, elles vont se perdre dans la masse. » L’année dernière, plus de 2 874 jardins répartis dans tout l’Hexagone ont participé au comptage d’hiver, signalant 93 478 oiseaux. Depuis sa création en 2012, l’observatoire participatif a permis de collecter plus de 900 000 données. « Les participants sont des vigies particulièrement utiles, ils représentent un nombre très important d’observateurs quand nous, naturalistes, n’avons ni le temps, ni l’argent, ni la possibilité de nous rendre sur tous les terrains, analyse Marjorie Poitevin. Cette pression d’observation sur une surface que nous ne pourrions par couvrir est décisive. »

Il faut dire qu’en France les jardins représentent plus d’un million d’hectares, soit plus de quatre fois la superficie de toutes les réserves naturelles métropolitaines réunies ! Un immense terrain de vie et de jeu pour nos amis à plumes… et d’étude pour nos amis à jumelles. Sur le site de l’observatoire, les particuliers assidus peuvent transmettre leurs informations toute l’année, mais les week-ends de comptage, soumis à un protocole spécifique, ont une valeur particulière. Ils permettent d’obtenir une photographie de la présence des oiseaux à un moment précis, le même chaque année, et d’établir des comparaisons. Ici commence le travail des chercheurs du Muséum national d’histoire naturelle, chez qui atterrissent vos observations de fauvettes à tête noire, troglodytes mignons et gros-becs casse-noyau. « Derrière ces opérations, il y a la recherche, insiste Frédéric Jiguet, ornithologue au Muséum et coordinateur du programme Stoc (Suivi temporel des oiseaux communs). Grâce à la base de données, nous pouvons quantifier, cartographier, établir des variations temporelles et spatiales de la présence des oiseaux : c’est un outil très puissant. »

Les espèces communes ne le sont plus forcément

Le week-end de comptage hivernal 2014 a ainsi fait apparaître une diminution du nombre d’oiseaux. Il en manquait dix-neuf en moyenne par jardin, soit plus d’un tiers de moins par rapport à l’année précédente. Pour expliquer cette hécatombe, deux hypothèses sont en lice. Un printemps 2013 très pluvieux, qui aurait empêché les parents de certaines espèces – rouges-gorges et mésanges charbonnières, en particulier – de trouver la nourriture pour leurs poussins, morts de faim et donc absents l’hiver suivant. Mais aussi un hiver 2014 doux qui aurait permis aux oiseaux migrateurs du nord de l’Europe de rester chez eux sans se geler, au lieu de descendre sous nos latitudes.

Le Muséum a ainsi pu montrer que plus des trois quarts des mésanges bleues et charbonnières n’ont ainsi pas migré à l’automne 2013, ni près des deux tiers des verdiers d’Europe, ainsi qu’une plus modeste proportion de pinsons des arbres. Est-ce grave, docteur ? Difficile à dire. L’observatoire est jeune et promet d’aider à répondre à ces questions, déjà soulevées par d’autres études, dans les années à venir. Mais il montre d’ores et déjà que les espèces que l’on croyait si communes, celles de nos jardins, ne le sont plus forcément. « On a l’impression qu’elles sont toujours abondantes et pourtant, certaines d’entre elles, même s’il reste des milliers de couples, sont en déclin, précise Frédéric Jiguet. Le changement climatique, l’intensification agricole et l’urbanisation sont mis en cause. »

Echec sur le roitelet huppé

Alors que le chardonneret élégant a perdu 44% de ses effectifs en dix ans et la linotte mélodieuse 32%, au parc Montsouris, ce samedi, on a bien cherché le moineau friquet, sans en trouver un seul. Et pour cause, ses effectifs à lui ont chuté de moitié en vingt ans. « C’est vrai que c’est l’une des espèces qui nous a mis la puce à l’oreille, se rappelle Mélissa, l’animatrice de la LPO. Et c’est à ça que servent aussi ces comptages : à sensibiliser les gens à ce qu’il advient de certaines espèces et de la nature autour d’eux. »

Pendant qu’elle explique à une dame en béret vert que les oiseaux sont comme les enfants – il vaut mieux éviter de leur donner du sucre, même s’ils en réclament ! –, nous nous mettons en quête d’un grimpereau des jardins. Son délicat plumage se confond parfaitement avec l’écorce de l’érable sur lequel il sautille. Je n’ai finalement jamais trouvé aux jumelles le roitelet huppé et le pic épeichette sur lesquels tout le groupe s’extasiait quelques secondes avant le gong de fin. Mais j’espère qu’ils seront là l’année prochaine.

A lire aussi sur Terraeco.net :
- « Le climat change, les oiseaux aussi »
- « Aux sciences, citoyens »
- « Une conférence pour voler au secours des oiseaux d’eau migrateurs »
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