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La vivisection sur le gril
lundi, 26 avril 2010 / Hélène Duvigneau

A l’occasion de la Journée mondiale des animaux de laboratoire, le collectif International Campaigns dénonce l’augmentation des expérimentations. La France utiliserait ainsi plus de 7 000 animaux chaque jour.

Images-chocs, scandales et polémiques sur son utilité scientifique. Ce week-end, la vivisection était au cœur des débats à l’occasion de la Journée mondiale des animaux de laboratoire. De nombreux blogs, comme celui de Shige Pékin, se font le relais de cette campagne avec des photographies à ne pas mettre sous tous les yeux.

Selon le collectif militant International Campaigns, les expérimentations pratiquées sur les animaux vivants – que l’on appelle communément vivisection – augmenteraient au fil des années. Et ce malgré la règle des 3R – « Réduire le nombre d’animaux utilisés », « Remplacer l’expérimentation sur les animaux par des méthodes substitutives » et « Raffiner l’expérimentation en réduisant au minimum les traumatismes et la douleur » – élaborée en 1959 et fondement de la démarche éthique appliquée à l’expérimentation animale en Europe et en Amérique du Nord

Le retentissant raté de la thalidomide

Utilisée pour étudier l’effet de pathologies sur l’organisme, la vivisection sert aussi à l’industrie des cosmétiques, la recherche spatiale et militaire ainsi que pour la mise sur le marché de produits chimiques. Elle est encadrée et même exigée par la loi pour toute substance potentiellement dangereuse et pour les dossiers de mise sur le marché de nouveaux médicaments. En France, plus de 80% des animaux concernés sont des rongeurs, le reste étant des lapins, des poissons, des cochons et des ovins. Selon International Campaigns, l’Hexagone utiliserait chaque jour plus de 7 000 animaux pour des besoins expérimentaux, soit près de 3 millions chaque année. Dans le monde, l’organisation évalue entre 800 millions et 1 milliard le nombre d’animaux qui seraient utilisés dans les laboratoires.

L’efficacité de la vivisection fait pourtant débat, y compris dans le milieu scientifique dans la mesure où les tests sur l’animal ne permettent pas de qualifier les substances médicamenteuses avant d’avoir effectué des essais comparatifs sur l’homme. L’exemple le plus cité est le retentissant raté de la thalidomide, ce médicament vendu aux femmes enceintes dans les années 1950 à l’origine de malformations chez le fœtus, et ce malgré des expérimentations menées sur des rongeurs.

Les réticences de l’Académie vétérinaire de France

International Campaigns milite pour le développement de méthodes scientifiques de substitution, notamment les tests in vitro sans matières animales, ainsi que la sensibilisation du public aux souffrances et aux sacrifices d’animaux. Répondant, en 2007, à une proposition de loi visant à interdire les l’expérimentation sur animaux vivants, l’Académie vétérinaire de France relevait néanmoins que des difficultés théoriques et pratiques limitaient encore la généralisation de méthodes faisant appel à des modèles informatiques ou à des cultures de cellules ou de tissus. Selon elle, une interdiction pure et simple pourrait provoquer « une élévation importante des risques sanitaires, notamment dans les domaines alimentaire ou environnemental ».

Pour le moment, le projet de révision de la directive européenne 86/609/CEE sur l’encadrement de l’expérimentation animale n’interdit pas la pratique et prévoit toujours de nombreuses exemptions, contrairement à la 1ère version proposée en 2008. L’utilisation de primates pour la recherche fondamentale a été autorisée. Elle exclut la recherche sur les grands singes ou celle susceptible de provoquer une « douleur extrême et prolongée », même si des exceptions existent. Les animaux ne pourront plus être « éliminés » après des recherches causant des « dommages modérés » mais pourront être réutilisés. Tenant compte de la question du bien-être animal, le projet de directive augmente par ailleurs… la taille minimale des cages desdits primates.

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- Photo : Janet Stephens