Sur TF1, le ministère du Développement durable a dégainé son quiz de la biodiversité. Un jeu de questions/réponses pour apprendre à mieux connaître la faune et la flore qui nous entoure. Bien. Mais fallait-il vraiment récompenser le super gagnant par un voyage en Guadeloupe ?

Il y a des gens qui ont de drôles d’idées. Tenez, le ministère du Développement durable par exemple. Pour célébrer l’année de la biodiversité, le cabinet de Jean-Louis Borloo a décidé d’organiser un quiz sur le sujet. A priori l’intention est louable. « On aurait pu lancer une campagne d’affichage mais on s’est dit qu’on toucherait davantage la sensibilité des gens, en les faisant participer à un jeu », précise-t-on au service de presse du ministère. Et pour faire résonner son message, le ministère s’est offert les services d’un poids lourd : TF1. Depuis le 22 mars, sur le site de la chaîne, les internautes peuvent soumettre leurs cerveaux à une salve de dix questions. Certaines enfantines (« La seule fonction d’une forêt est d’accueillir la plus grande biodiversité ? Vrai ou faux ? ») d’autres plus casse-tête (« Quelle est la durée de gestation chez la femelle du renard roux : 33, 43 ou 53 jours ? »).

Un vol pour la Guadeloupe, oui mais compensé svp

Tout jeu a sa carotte. Dans le cas du quiz de la biodiversité, ceux qui décrochent un 10 sur 10 au questionnaire gagnent une chance – à condition d’être tiré au sort - de montrer leur bobine sur un plateau télé. Une minute chrono de question/réponse diffusée chaque vendredi soir à 20h40 sur TF1. Les candidats peuvent aussi gagner un voyage pour deux à Port-Cros ou en Guadeloupe. Là, on est un peu pantois. Certes, le ministère n’a pas sorti les destinations de son chapeau : « Ce sont deux parcs nationaux, deux endroits en France remarquables en terme de biodiversité. L’idée c’est que les gens rencontrent sur le terrain ce qu’ils essaient de préserver ». Oui, mais pourquoi aller jusqu’en Guadeloupe, en avion ?

A en croire le calculateur de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), un vol pour la Guadeloupe c’est 926 kilos de CO2 par passager (1 852 pour les deux). Sans compter la voiture de location. CO2 et biodiversité, quel rapport ? En fait, la croissance des émissions de CO2 - qui contribuent au changement climatique - menacent la survie des espèces, en affectant leurs ressources, leur habitat... Pour autant, on n’impose à personne de rejoindre les caraïbes en pédalo. D’accord, mais pour un concours organisé par le gouvernement et censé protéger la biodiversité, on pouvait s’attendre à autre chose comme gros lot. Et ce, même si le ministère promet de "compenser" les vols offerts par son partenaire Air France.

Découverte des espèces protégées en option

Après tout, préserver la biodiversité, c’est aussi choyer le coq de Bruyère et la chauve-souris du Poitou, le vautour des Pyrénées et la tortue d’Aquitaine ? Conscient de cette réalité, le ministère lui même a fait l’effort d’englober tous les animaux dans son quiz : « Quand on parle biodiversité aujourd’hui, on pense souvent aux animaux exotiques... Nous, on ne voulait pas seulement parler de la biodiversité remarquable. Mais aussi des lézards et des animaux communs ». Insistons, donc. Pourquoi donc emmener des gens jusqu’en Guadeloupe ? « On s’est posé la question. Mais on s’est dit que l’Outre-mer était la grande oubliée alors que c’est le principal réservoir de biodiversité en France », réplique-t-on au service de presse. Les gagnants apprendront-ils vraiment le bienfait des espèces multiples en terre de Guadeloupe ? On peut en douter. Il y a bien au programme – en option - une randonnée en forêt tropicale, une balade en bateau ou une plongée sous-marine, mais ça paraît un peu maigre...

L’initiative du ministère n’est pas isolée. Au même nom de la biodiversité, d’autres organisations offrent des voyages. Samedi prochain, la salle de concert l’Alhambra à Paris organise par exemple une soirée à l’honneur de « l’Homme et l’Environnement », une ONG aidant la population malgache à gérer leurs ressources dans le respect de l’environnement. Avec à la clé un voyage à Madagascar à gagner. « Mais pas n’importe quel voyage. Celui-là est organisé par Jacaranda – une agence de voyage spécialisée dans l’écotourisme, se défend Cyrille Totozafy, co-directeur du projet « J’veux du live » Ce n’est pas comme si on envoyait les gens aux Seychelles dans un hôtel 5 étoiles et puis c’est tout. Les gens seront appelés à planter des arbres et ils passeront une nuit et une journée dans la réserve de Vohimana. » C’est vrai qu’à regarder le programme mis à disposition dans le règlement, les heureux élus ne se contenteront pas se dorer la pilule. Pour les gagnants du quiz de TF1, on en est moins sûr.

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