https://www.terraeco.net/spip.php?article9734
Des OGM sur un plateau… de fromages
jeudi, 15 avril 2010 / Noëlle Guillon

Des organismes génétiquement modifiés dans un livarot coulant ou un munster 100% alsacien, tous deux étiquetés AOC ? Vous n’y pensez pas ! Et pourtant… Tandis que Greenpeace mène campagne, Terra eco s’est mis sur la piste d’un frometon vraiment naturel.

Si vous ne voulez pas pas d’OGM, vous pouvez compter sur le comté. Et sur le rocamadour, le morbier et plus d’une quinzaine d’autres fromages. C’est le message envoyé à grands renforts de costumes tachetés façon vache laitière par les militants de Greenpeace samedi 10 avril. L’organisation entendait ainsi protester contre la présence potentielle d’organismes génétiquement modifiés dans les fromages, y compris ceux porteurs de la précieuse appellation d’origine contrôlée (AOC), en passe de devenir appellation d’origine protégée (AOP).

Or selon l’ONG, sur 46 fromages porteurs de l’appellation, seuls 21, classés verts, excluent systématiquement l’usage d’OGM dans l’alimentation animale. Dix autres s’apprêteraient à en faire de même. Pour les 15 producteurs restants [1], chacun est libre de faire comme il l’entend. « Cela ne veut pas dire que ponctuellement, certains ne se sont pas engagés à exclure les OGM », précise Sarah Pecas, chargée de campagne chez Greenpeace, « mais que l’appellation ne l’a pas intégré à son cahier des charges ».

Moins de 0,9% d’OGM chez les producteurs responsables

Dans les faits, pour certaines appellations classées vertes par Greenpeace, ce sont directement les producteurs et non pas l’AOC qui ont pris la décision d’exclure les OGM. « Intégrer cette mention au cahier des charges aurait pris trop de temps », explique Robert Glandières, vice-président de la confédération générale des producteurs de lait de brebis et des industriels de Roquefort. « Nous avons décidé de la mettre dans la charte de l’inter-profession, qui concerne les 2 080 exploitations de Roquefort. » A quoi s’engagent ces producteurs responsables ? A garantir un taux d’OGM inférieur à 0,9%. « Avec ce chiffre, correspondant à la réglementation européenne, nous certifions qu’aucun producteur n’a délibérément utilisé d’OGM. Par contre nous ne pouvons pas exclure de très faibles contaminations croisées. Mais pour limiter les risques, on utilise du colza ou du tournesol pour nourrir les bêtes plutôt que du soja, dont la majorité de la production est OGM. »

Comment faire le tri au pays des 300 fromages ? Pour les filières AOC, facile : cahiers des charges, bordereaux de livraisons, Greenpeace a pu avoir accès à un certain nombre de preuves. Pour les autres, autant chercher une aiguille dans une meule de foin. « Le guide a été établi sur la base de la déclaration des producteurs, nous n’avons pas les moyens de tout tester », regrette Sarah Pecas.

Greenpeace soutient l’étiquetage volontaire

Que faire alors ? Faire adopter l’étiquetage OGM obligatoire des produits dérivés du lait, préconise Greenpeace. Pour le moment, la présence d’OGM dans un produit alimentaire, au-delà des fameux 0,9%, doit être précisée en France sur les emballages sauf pour les produits laitiers et la viande. La raison à cette exception qui fait toujours débat ? D’après le site interministériel sur les OGM, « il faut rappeler que les données scientifiques actuelles indiquent que la présence d’OGM dans l’alimentation animale ne modifie en rien les caractéristiques des produits animaux ». Greenpeace en prend acte et n’a d’ailleurs pas axé sa campagne sur le risque de santé publique pour le consommateur, qui n’est pas avéré. Mais en rappelant que 80% de l’alimentation animale contient des OGM, l’ONG en fait une question de principe.

Si vous préférez assumer votre position anti-OGM, achetez donc dans la liste des AOC vérifiées, ou mieux encore, achetez bio, préconise l’ONG. A noter que figure dans leur liste un seul géant de la distribution, Carrefour et ses produits distributeur « engagement qualité Carrefour ». A défaut d’un étiquetage obligatoire pour les produits contenant des OGM, Greenpeace soutient aussi l’étiquetage volontaire de ceux qui n’en contiennent pas, une façon de faciliter la tâche des prudents. Pour les producteurs, cette démarche ne tombe pas sous le sens. « Nous devons déjà afficher de nombreuses informations, le label AOC, le Label rouge… », estime Robert Glandières, « Le risque est de rendre le message confus ». Et peut-être de jeter un doute sérieux sur la présence d’OGM dans toute la filière, alors que dans l’esprit du consommateur, quand il pense fromage, il ne pense pas (encore) OGM. 

- Le guide des produits laitiers de Greenpeace
- Le guide des produits avec ou sans OGM (tous produits alimentaires) de Greenpeace
- L’étiquetage sur le site interministériel sur les OGM