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"Le commerce équitable doit se pratiquer tous les jours !"
mercredi, 7 avril 2010 / Tristan Lecomte (Alter Eco) /

Né en 1973 à Reims (Marne), Tristan est diplômé de HEC. Il a fondé Alter Eco en 1998. En 2008 il lance Pur Projet. Tristan vit en Thaïlande près de Chiang Mai depuis 2010 et chronique pour Terra eco depuis 2009.

Dans un mois, la quinzaine du commerce équitable suscitera comme chaque année d’innombrables débats sur la portée de ce type d’échanges économiques. Tristan Lecomte, pédégé d’Alter Eco, voit plus loin.

La quinzaine du commerce équitable a lieu chaque année début mai, depuis près de 10 ans. Elle a eu le mérite de faire connaitre ce mouvement au plus grand nombre, la notoriété du commerce équitable est ainsi passée de 10 à 90% en l’espace de 7 ans en France, et les ventes ont commencé à décoller.

En concentrant l’effort de communication de tous les acteurs sur une même période, les médias relaient massivement l’information et le concept émerge. Néanmoins, Il ne faut pas que la concentration des moyens à cette période nous fasse oublier l’impérieuse nécessité d’agir tous les jours de l’année pour les petits producteurs du commerce équitable. Ces petits producteurs sont plus d’un milliard sur Terre et ils représentent avec leurs familles plus de 4 milliards d’individus, soit plus de 2/3 de la population mondiale.

Le commerce équitable qui entend participer à leur développement n’est donc pas un épiphénomène, mais bien un enjeu majeur, tout comme le réchauffement climatique. Pour l’instant le CE n’aide qu’un million de ce milliard d’agriculteurs, soit à peine un sur mille.

Il ne faut pas parler et acheter équitable une seule fois par an, mais bien tous les jours de l’année, car les conditions du commerce international sont bien totalement injustes au quotidien pour ces producteurs oubliés du système. Ces petits producteurs ne reçoivent comme rémunération en moyenne que 30 à 50% du coût réel de production de leur produit, ils sont surexploités et sans aucun moyen pour faire face à ces inégalités : pas de moyen financiers, de communication, pas de formation, ni même de terre pour certains. Ils gagnent en moyenne 200 à 500 euros par an, dans des sociétés de plus en plus ouvertes aux marchés mondiaux et où tous les prix flambent.

C’est pourquoi l’enjeu est à présent d’intégrer l’achat équitable au maximum comme un achat de tous les jours, un acte d’achat banal, et non pas exceptionnel, une fois l’an lors de la quinzaine du commerce équitable (du 8 au 23 mai cette année). Il en va de la cohérence du mouvement et de la survie de ces familles. On a souvent tendance à minimiser ou ostraciser les mouvements comme l’agriculture biologique ou le commerce équitable, peut-être parce qu’on se culpabilise. On préfère croire en effet que ces systèmes sont marginaux, bancals, voire douteux.

Non, l’agriculture biologique c’est tout simplement la manière la plus naturelle de produire nos denrées alimentaires, et le commerce équitable la manière dont nous aurions toujours dû faire du commerce, par respect pour la Nature et les Hommes. Tout simplement par respect pour soi-même. Car ne pas respecter l’autre c’est avant tout se manquer de respect. Nous avons perdu ces notions au profit d’un égoïsme sans borne et d’un développement aveugle et sans perspective. Il ne s’agit pas de s’en affranchir 15 jours par an, mais de changer radicalement notre vision et nos actes de tous les jours. Pour notre propre bien être, celui de la Planète et surtout celui de nos enfants.

- Le site d’Alter Eco