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Green Wall Street
mardi, 23 mars 2010 / Anne Sengès /

Correspondante de « Terra eco » en Californie, Anne Sengès est l’auteur de « Eco-Tech : moteurs de la croissance verte en Californie et en France », paru en novembre 2009 aux éditions Autrement.

Alors que se tient cette semaine à New York la 9e édition du Wall Street Green Trading Summit, le grand rendez-vous des investisseurs et banquiers verts, Terra Eco se demande si la couleur verte sied à Wall Street, temple des spéculateurs. Wall Street peut-il seulement prétendre au statut d’écolo ?

Lorsqu’on demande à Peter Fusaro, l’organisateur du Green Trading Summit, ce qui l’a motivé à créer, il y a presque une décennie, une conférence sur le thème du « green trading », il raconte qu’il a simplement voulu montrer aux investisseurs qu’il était temps de s’intéresser à des sujets comme l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables. « Les Etats-Unis n’exerçaient aucun leadership en matière de lutte contre le réchauffement climatique et j’ai pensé que New York, où la conférence se tient chaque année dans un lieu vert (le gratte-ciel du New York Times) car nous pratiquons ce que nous prêchons, serait un lieu idéal pour un forum liant la question de la sauvegarde de l’environnement à la finance », déclare-t-il.

Neuf ans plus tard, les Etats-Unis peinent à voter une loi sur le climat et l’énergie mais Peter Fusaro continue d’évangéliser Wall Street en assurant que la couleur du billet vert mènera à la richesse. « Il est essentiel d’éduquer les Américains sur cette question et de parvenir à les convaincre qu’investir dans les énergies renouvelables a un double bénéfice : celui de créer des emplois et d’améliorer la santé », assure ce consultant, spécialiste des énergies propres, qui a aidé Toyota à développer la Prius.

La couleur de l’argent

«  Lorsque j’ai commencé à parler de « green trading », j’ai voulu montrer qu’il était possible de s’enrichir tout en ayant un impact positif pour l’environnement », poursuit Peter Fusaro. Au temple du profit, le message est donc centré sur l’argent. « Ces nouveaux marchés verts s’imposeront comme la plus grosse source de richesse aux Etats-Unis et dans le monde et malheureusement, les investisseurs du secteur privé ont encore du mal à réaliser cela. La plupart des banques d’investissement ne sont absolument pas vertes dans leurs investissements », regrette-t-il. A la clé du manque d’enthousiasme de Wall Street ? Le fait que le gouvernement américain n’ait pas encore réussi à imposer une taxe carbone digne de ce nom qui permettrait de motiver les investisseurs.

Aujourd’hui, le marché du green trading ne représente aux Etats-Unis que 2,75 milliards de dollars (selon les chiffres de 2009), alors que le pays est pourtant le deuxième pollueur au monde. « Et le marché mondial représente seulement 136 milliards de dollars alors que les experts s’accordent sur le fait qu’il devrait s’agir d’un marché d’au moins 2 trillions de dollars », assure l’organisateur du Green Trading Summit. « Le problème des investisseurs est qu’ils sont à la recherche du Green Google ou de la prochaine technologie qui révolutionnera le marché de l’énergie. Or ils se trompent car il n’y aura ni green Google, ni technologie de rupture. Reste que les marchés de l’énergie propre et de l’efficacité énergétique représentent tout de même la plus grosse opportunité économique du moment », assure Peter Fusaro.

Wall Street, un écolo sans cœur ?

Pour Amy Domini, la papesse américaine de l’investissement socialement responsable, la crise des subprimes et la perte de confiance de l’opinion publique vis-à-vis des banquiers et autres investisseurs ont eu le mérite de prouver que les agissements de Wall Street avaient un impact direct sur la vie des Américains. « Le seul bénéfice de la crise est d’avoir montré que la façon dont nous investissons a un impact direct sur l’humanité et la planète", affirme-t-elle. Mais Wall Street deviendra-t-il pour autant le royaume des écolos ? Amy Domini en doute. « Wall Street ne misera sur le vert que le jour où les investisseurs comprendront qu’ils pourront s’enrichir en finançant l’avènement de technologies propres ou la construction de nouvelles centrales nucléaires. Wall Street sait se mettre au vert au nom du profit, ou encore pour le bien être de la planète (si forcé par la législation), mais n’a pas encore su montrer qu’il pouvait aussi faire preuve d’humanité… ».

Le Wall Street Green Trading Summit se tiendra à New York les 23 et 24 mars :

http://www.wsgts.com/agenda.

Photo : http://www.flickr.com/photos/trygve...