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JC Decaux m’a tuer (Mémoires d’un cycliste repenti) - Episode 2
mardi, 23 mars 2010 / Edouard FLAM

Le vélo en libre-service est une brillante idée. Ce qu’en fait JC Decaux est une calamité. Témoignage, à charge, d’un pionnier désabusé.

(...) Au commencement, j’étais utilisateur lambda, non abonné, désireux de recourir au service de façon occasionnelle. Par une curiosité locale qu’il faudra qu’on m’explique, à Nantes, JC Decaux a réussi à jouer a minima : toutes les stations ne sont pas munies de dispositif de paiement par carte bancaire. A vue de nez, une station sur quatre seulement en dispose. Or sans carte bancaire, impossible d’acheter un ticket de courte durée (un jour ou une semaine). Par un heureux hasard, les stations non équipées de carte bancaire ne sont pas non plus dotées d’écran de contrôle. Sans ce dernier, impossible d’obtenir le plan des stations voisines.

Conclusion, n’étant pas abonné, j’ai dû marcher au hasard, parfois près d’une heure, en plein cagnard, pour trouver, après plusieurs tentatives couronnées d’échec, une malheureuse station équipée d’un lecteur de carte bancaire. Alors, c’était toujours une immense joie qui m’envahissait. Frayant avec inquiétude dans les méandres de l’écran de contrôle, il me fallait en moyenne cinq minutes pour toucher du doigt le sésame de l’ « abonné temporaire » et tutoyer l’extase.

Suis-je vraiment masochiste ?

Encore dois-je préciser, au risque de passer pour un couillon, qu’à plusieurs reprises, le ticket n’est jamais venu. Ma carte bancaire a, elle, bien été débitée. Ce n’est qu’au bout de quelques mois que j’ai découvert qu’un numéro de « ligne chaude » - « hotline » pour les intimes - était affiché, non pas sur la borne des stations, mais en tout petits caractères sur la base du guidon des vélos.

Au terme de plusieurs semaines d’utilisation occasionnelle d’un tel service, j’en suis arrivé à l’évidente conclusion que celui-ci était uniquement destiné aux masochistes et aux athlètes en phase intensive de préparation physique pour une prochaine session de Fort Boyard. Pour toute personne normalement constituée et pas spécialement fondue de vélo, impossible de compter sur un dispositif de cette qualité si l’on veut arriver à l’heure à un rendez-vous, gagner du temps, vivre des journées sans stress et sans contrariété, ne pas perdre d’argent, etc. En clair, je me suis dit que cette expérience était une invitation en lettres d’or à en rester là. Ciao cher utilisateur, JC Decaux n’a pas besoin de toi. Y’a pas marqué « écomobilité » ici. Passe ton chemin.

Bon. Je dois être un peu masochiste. Car malgré ces amuse-bouche au goût amer, j’ai signé pour un an en entonnant le refrain béat du pionnier enjoué : « sans doute faut-il être abonné pour goûter à la plénitude du service », « Decaux c’est comme le vin, il faut apprendre à l’apprécier », « essuyer les plâtres c’est normal », « on n’a rien sans rien », « c’est ici que se dessine l’écomobilité de demain », « et puis ces vélos ne sont pas si mal entretenus, tout de même ». (...)


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