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Contrôle des billets verts, s’il vous plaît !
dimanche, 28 février 2010
/ Karine Le Loët / Rédactrice en chef à « Terra eco ». |
Guillaume Pepy s’est mis sur les rails dans les années 1990. Après avoir connecté le géant ferroviaire au Web, le président de la SNCF n’a désormais qu’une obsession : mettre son entreprise au vélo ou à la voiture électrique. Au rythme de l’écomobilité.
Enveloppé dans une doudoune sombre, il serre des mains sur un quai de la gare du Nord. En ce matin de décembre, Guillaume Pepy s’apprête à grimper à bord d’un Paris-Bruxelles affrété par la SNCF pour emmener journalistes et militants vers Copenhague. L’entreprise ferroviaire apporte ainsi sa pierre au périlleux édifice d’un sommet sur le climat. Depuis quelques années, la vieille dame septuagénaire s’est peu à peu mise au vert. A elle, les joies des écogestes, la fierté des uniformes tissés aux lois de l’équitable ou les vertus de l’écoconduite. Dans les gares, pousse ici un mur végétal, là un panneau photovoltaïque, les voyageurs s’essaient au tri sélectif ou au bilan carbone… Coïncidence ? Non. Le patron, arrivé à la tête de la SNCF en 2008, y est, dit-on, pour beaucoup. L’homme a troqué la voiture de fonction pour un scooter électrique. Préfère le RER aux taxis et, le week-end, hisser son vélo dans un TER plutôt que se joindre au flot des automobiles en route vers l’air pur. Dans son bureau du 12e étage d’un immeuble parisien, il récite sa leçon avec application : « Paris-Genève en train et Paris-Genève en avion, c’est un rapport de 1 à 15 en énergie et en CO2 ». « Les embouteillages en Ile-de-France émettent 7 fois plus de carbone que la totalité du transport ferroviaire en France. »
Son dada tient en un mot : l’écomobilité. A l’écouter, buste en avant et verbe résolu, c’est aussi évident qu’un Paris-Marseille en trois petites heures. En clair, il s’agit de ne plus prendre le voyageur sur un quai pour le débarquer, valise à la main, sur un autre. « Il est rare d’aller de gare en gare, s’amuse Guillaume Pepy. Les gens vont plutôt de quelque part à quelque part. » L’écomobilité pour les voyageurs se traduit par des parcs de voitures et de vélos dans les gares, des plans de signalisation des quartiers d’arrivée. Et pour les marchandises ? Un jeu de relais entre camions, navires et trains. Du coup, pour déployer ses nouvelles fonctions, la SNCF a acquis le transporteur routier Geodis et répondu à l’appel d’offres pour l’Autolib’ – un service de voitures électriques en libre service – à Paris. Les syndicats dénoncent le démantèlement de l’entreprise publique. Qu’importe. « Si vous voulez faire grandir le train, il faut repousser les murs, réplique le patron. Plus on travaille le bout en bout, plus les gens prendront le train. L’écomobilité est un relais de croissance. »
Parce que le principe est peu rentable, Guillaume Pepy a peu à peu abandonné le principe des wagons isolés – ces groupements de chargements desservant les petites gares. Les syndicats hurlent à la contradiction. « Depuis 2002, un million de camions ont été remis sur la route », calcule Alain Cambi, secrétaire fédéral de Sud-Rail. « Le wagon isolé n’est pas l’arme anti-camion, se défend le boss. C’est une technique formidable, mais une technique de détail. Nous, nous sommes faits pour faire de l’industrie. » Sur le chemin d’une SNCF plus verte restent encore quelques chantiers à quai. « On n’a pas fini d’installer des panneaux photovoltaïques sur nos gares et nos ateliers pour produire une partie de notre électricité. On commence à peine le recyclage des trains », énumère Guillaume Pepy. Et lui ? « Moi, je ne suis pas économe en électricité. Pour moi, la lumière, les appareils électriques ont un pouvoir infini. » Le patron de la SNCF n’a pas encore atteint le terminus. —
1989-1990 : Directeur de cabinet de Jacques Fournier, président de la SNCF
1990-1993 : Directeur de cabinet de Michel Durafour, ministre de la Fonction publique, puis de Martine Aubry, ministre du Travail
1996 : Directeur général adjoint du groupe Sofres
1997-2003 : Directeur Grandes lignes, puis Clientèles de la SNCF
2003 : Directeur général éxécutif
27 février 2008 : Président
Son geste vert : Il roule en scooter électrique
Photo : RAPHAËL DAUTIGNY - LUCE PHOTO / pour « Terra eco »