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«  Les hypermarchés sont inadaptés à nos modes de vie  »
dimanche, 27 décembre 2009 / Simon Barthélémy

Population vieillissante, en partie sans enfants et en quête de proximité. C’est la fin d’une époque pour la grande distribution, selon Serge Papin, président de Système U. Il parie sur les produits locaux et les petites enseignes.

La prise de conscience écologique signe-t-elle la fin des hypermarchés ?

La France a intensifié sa production agricole pour nourrir ses habitants et exporter, en utilisant massivement engrais et pesticides. La grande distribution s’est bien accommodée de ce modèle, se préoccupant davantage de quantité et de prix que de qualité et de proximité. On a localisé des monocultures intensives de produits suffisamment robustes pour pouvoir être transportés et manipulés sur les étals. Mais c’est la fin d’une époque pour des raisons de respect de l’environnement, de santé, et de recherche de proximité. Aujourd’hui, plus de 30 % de la population française vit seule, de nombreux ménages n’ont pas d’enfants. Les hypers ne correspondent plus à ces modes de vie et au vieillissement de la population. Les budgets sont au fil de l’eau : on achète pour une semaine au supermarché du coin, plutôt que de remplir ses placards de produits de l’hypermarché, où l’on doit en plus aller en voiture. Et les clients préfèrent des magasins à taille humaine, près de chez eux. C’est créateur d’emplois : 2 000 à 3 000 par an chez nous dans nos « petites » enseignes.

Cherchez-vous à vous approvisionner localement ?

Nous tentons de nous organiser autour d’une trentaine de bassins de consommation, dont l’identité est forte : Bretagne, Savoie, Vendée… Nous avons lancé une expérience pilote en Alsace, car on y trouve beaucoup de produits locaux : pâtes, flammekueche, charcuterie, etc. On s’est engagé contractuellement à passer de 10 % à 15 % de notre chiffre d’affaires en produit locaux : 450 producteurs sont concernés. Mais ce n’est pas simple, car certains n’arrivent pas à répondre à la demande. De notre côté, on doit changer les mentalités pour s’ouvrir aux PME, coopérer plutôt que négocier avec elles, et accueillir directement leurs produits dans les magasins. Car si l’on privilégie un circuit direct, sans stockage, on économise 6 %.

Les clients vous suivent-ils ?

Les produits régionaux se vendent de mieux en mieux. Nos produits U réalisés par des PME françaises sont, il est vrai, 28 % moins cher que les marques. Mais les produits de terroir ne sont pas toujours un passeport de vertu, il faut aussi de bons processus de fabrication. Le label bio rassure les gens. Malheureusement, nous importons plus de la moitié des aliments, car la production française est encore insuffisante. L’étiquettage carbone n’y changera rien car les gens ne comprennent pas. Il leur faut des choses plus perceptibles, comme le retour à des produits de saison. —

SYSTEME U EN CHIFFRES

Chiffre d’affaires : 17,92 milliards d’euros (en 2008)

Position : Dans le Top 5 des groupes de distribution alimentaire en France. C’est un groupement de commerçants indépendants travaillant au sein d’une coopérative de commerçants.

Composition : Le groupement possède 26 entrepôts et 900 magasins, dont les enseignes Hyper U, Super U, Marché U et U express

Photo : Frédéric Stucin - MYOP pour Terra eco

- Serge Papin en débat avec le botaniste-écologiste Jean-Marie Pelt dans Consommer moins, consommer mieux (Autrement, 2009).