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School on Wheels : une école mobile pour les enfants sans toît
lundi, 21 décembre 2009
/ Anne Sengès / Correspondante de « Terra eco » en Californie, Anne Sengès est l’auteur de « Eco-Tech : moteurs de la croissance verte en Californie et en France », paru en novembre 2009 aux éditions Autrement. |
Les statistiques font peur. L’Amérique compte aujourd’hui 1,6 millions d’enfants sans domicile fixe. Agnès Stevens, la fondatrice de School on Wheels, un programme éducatif qui offre fournitures scolaires et cours particuliers aux enfants sans abris de la région de Los Angeles, s’apprête à parcourir le pays pendant un an pour convaincre le plus grand nombre d’aider ces enfants à obtenir une éducation. Récit.
A 74 ans, Agnès Stevens semble infatigable. D’apparence frêle, elle a une volonté de fer et vient de se fixer un objectif un peu fou : traverser seule au volant de son automobile l’Amérique du nord au sud et d’est en ouest. Son but ? Convaincre ses compatriotes de s’intéresser au destin des enfants homeless : ces gamins constamment trimballés de refuges en abris de fortune, au rythme des déplacements de leurs parents qui ont bien souvent d’autres préoccupations que de se soucier d’envoyer leur progéniture à l’école. Armé d’un blog baptisé « 1,6 millions », Agnès Stevens va raconter ce qu’elle voit sur son passage et espère inciter le plus grand nombre de bons samaritains à s’intéresser au sort des enfants SDF dont la seule lueur d’espoir est bien souvent l’éducation qu’ils peuvent glaner par ci par là.
Pour cette institutrice qui enseignait dans les écoles publiques de Malibu et Santa Monica, communautés aisées de Los Angeles, la lecture d’un livre a fait figure d’électro-choc. « J’ai lu Rachel and her Children, homeless children in America, un ouvrage de Jonathan Kozol (publié en 1988) qui évoquait le sort des gamins new-yorkais sans abris et ce livre m’a totalement bouleversé car j’ai découvert qu’il y avait des enfants SDF aux États-Unis. J’imaginais un peu naïvement que ce phénomène ne concernait que les adultes car il est rare de voir des gamins vivrent dans les rues », raconte-t-elle. Agnès Stevens réalise pourtant vite que Santa Monica, aujourd’hui l’un des coins les plus huppés de Los Angeles, abritait une large population de familles sans domicile fixe qui fréquentaient un parc de la ville. « J’ai donc décidé d’aller à la rencontre de leurs enfants pour leur offrir des cours particuliers car s’ils existent des programmes éducatifs qui accueillent des enfants sans abri (les écoles publiques ne pouvant pas refuser une place à un enfant qui n’a pas d’adresse fixe), il n’y avait cependant aucun programme qui tentait de suivre les gamins au rythme de leurs déplacements. Or la majorité des familles sans abri sont constamment sur la route ».
Aujourd’hui, Agnès Stevens peut se targuer d’avoir aidé des milliers d’enfants et chaque semaine 800 tuteurs (bénévoles) vont à la rencontre de jeunes SDF (âgés de 5 à 18 ans) dans l’espoir de leur redonner le goût d’apprendre. Agnès Stevens a fait le choix de refuser les fonds publics pour faire fonctionner sa school of wheels dont le budget annuel de 800 000 dollars est financé exclusivement par des dons provenant d’individus et d’organisations philanthropiques. « Je voulais que mon association reste apolitique et qu’elle ne dépende pas des sautes d’humeur et des coupures budgétaires des administrations publiques », souligne-t-elle.
Autre belle victoire pour le moins symbolique : la présence sur le plateau d’Oprah Winfrey, la reine du tube cathodique, lors d’une émission récente, d’une jeune femme prénommée Khadijah, enfant de Skid Row, désormais étudiante à Harvard, qui a su prouver à ses paires que même les gamins SDF avaient des chances de s’en sortir à condition d’avoir la possibilité d’étudier. Et Agnès Stevens jure de continuer le combat… 1,6 millions d’enfants SDF comptent sur elle. « Car si l’école est souvent considérée par les gamins comme un second foyer, pour les enfants SDF elle constitue bien souvent le seul et unique foyer ». La date de départ de son voyage destiné à convaincre le reste de l’Amérique du bienfait de sa mission est fixée à fin janvier.
Le site de School on wheels
Photo crédit : School on wheels.