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Copenhague : surenchère ou dynamique de groupe ?
lundi, 7 décembre 2009 / Walter Bouvais /

Cofondateur et directeur de la publication du magazine Terra eco et du quotidien électronique Terraeco.net

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Première journée étonnante pour la conférence sur le climat. Après des semaines de déprime, les officiels veulent croire à un accord ambitieux. En attendant Obama, les ONG font du bruit et le français Jean-Louis Borloo s’incruste à la tribune.

Un trompettiste et une harpiste. Un choeur d’enfants, et l’appel d’une jeune fille – dans un film projeté d’entrée de jeu – : « Aidez-nous à sauver la planète » (voir la vidéo en bas de cette page). La cérémonie d’ouverture du sommet de Copenhague – on dit officiellement la « 15e conférence des parties » - plante le décor. Un peu maladroitement sans doute, le ton reflète une immense attente de la société civile.

Les officiels qui se serrent à la tribune en ce premier jour du sommet l’ont compris. Leurs discours appellent à un accord ambitieux, contraignant, et à des actes concrets. Le premier ministre Rasmussen du Danemark, la mairesse de Copenhague – et ses 36% de citoyens se déplaçant à vélo –, Rajendra Pachauri le président du GIEC (Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat) et Yvo de Boer, le secrétaire exécutif de l’UNFCC [1], disent tour à tour leur souhait que la communauté internationale prenne ses responsabilités.

Le compte à rebours est terminé

« Le compte à rebours est terminé. Après deux ans de négociations, le temps des actes est venu. (…) Copenhague ne sera un succès que si nous aboutissons à des actes immédiats, qui se déploient le jour même de la fin de la conférence », avertit ainsi Yvo de Boer.

Au-delà de ces effets d’estrade, on peut dire que cette première journée confirme la tendance des tout derniers jours : le front de la lutte contre le changement climatique est subitement passé de la déprime à l’espoir d’un accord de haute tenue.

Plusieurs faits se sont succédé depuis 10 jours, justifiant objectivement un retour à l’optimisme. Tout d’abord, l’annonce par le président américain Barack Obama selon laquelle les Etats-Unis s’engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et acceptent le principe d’une contribution au financement de l’adaptation dans les pays du Sud. Ensuite, les pays dits « grands émergents » (Chine, Inde, Brésil et Afrique du Sud) ont emboîté le pas à Obama et se disent prêts à leur tour à réduire leurs émissions de GES à l’horizon 2020. Pour l’expert Pierre Radanne, il est aujourd’hui « presque acquis » qu’un accord international sur la réduction des émissions de GES est à portée, ici à Copenhague.

Jean-Louis Borloo s’invite

Se pose, toutefois, la question du financement de l’adaptation dans les pays du Sud. Le changement climatique coûte déjà cher, socialement et économiquement, aux pays les plus pauvres, souvent les plus exposés aux dérèglements du ciel. Ceux-là attendent un chèque de 150 milliards de dollars environ (100 milliards d’euros) par an pour s’adapter et développer leurs économies « proprement ».

Jean-Louis Borloo, ministre français de l’écologie et du développement durable, dont l’intervention n’était pas prévue, est parvenu au forceps à prendre la parole à la tribune lundi après-midi pour y présenter la position de la France. Il rappelle que l’Europe devra se caler sur une réduction de 30% de ses émissions de GES si un accord est signé à Copenhague. Il milite toujours pour la création d’un fonds « Justice Climat » pour les pays les plus pauvres (600 milliards de dollars sur 10 ou 20 ans) : « Bangladesh, Laos, Cambodge, l’essentiel de l’Afrique et quelques grandes régions du monde particulièrement sinistrées ». Ce fonds serait « automatique », « prévisible », « sur fonds publics » et s’additionnerait aux 100 milliards de dollars annuels réclamés par l’ensemble des pays en développement. Montant de l’addition : 150 milliards de dollars annuels (100 milliards d’euros). Dans le camp des ONG, le WWF applaudit.

Il y a pourtant un problème : si annoncer un chiffre ne coûte rien, la question du financement reste entière. Et à ce jour sans réponse claire. Elle constitue probablement le principal enjeu de la discussion de Copenhague. Sur ce point, on voit mal comment les délégations pourraient prendre des engagements avant la venue de leurs « grands patrons », dans une dizaine de jours : Barck Obama, Hu Jintao, Lula, Angela Merkel, Gordon Brown et Nicolas Sarkozy.

Conclusion : ne nous emballons pas. Le plus difficile reste à faire.