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Les petits secrets du bilan CO2 de Nicolas Sarkozy et de ses ministres
vendredi, 27 novembre 2009
/ Cécile Cazenave
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Depuis 2007 et le Grenelle de l’environnement, le chef de l’Etat et son gouvernement ne cessent de nous promettre l’exemplarité écologique. En attendant, et à quelques jours de la Conférence de Copenhague sur le climat, on a toujours pas vu l’ombre du moindre bilan CO2.
Ce n’est pas la première fois que Terra eco tente d’évaluer l’impact écologique des déplacements du président de la République. L’an passé, nous avions évalué les émissions de gaz à effet de serre liées à ces derniers, à 7000 tonnes de CO2. Depuis le 1er janvier 2009, Nicolas Sarkozy a émis pour ses seuls transports un minimum de 3800 tonnes de CO2. C’est 475 fois le bilan annuel d’un Français ordinaire. C’est aussi l’équivalent de 560 000 parties de barbecue au charbon de bois.
3800 tonnes contre 7000 il y a un an : le président de la République serait-il devenu écolo ? A vrai dire, non. Et ce, pour au moins deux raisons. La première est liée à l’agenda présidentiel. L’empreinte du chef de l’Etat était en 2008 lourdement plombée par la présidence européenne assurée par la France. Nicolas Sarkozy avait, à cette occasion, beaucoup voyagé. En 2009, pas de présidence de l’Union, donc moins de déplacements et moins d’émissions de gaz à effet de serre. Limpide.
Au-delà de ces chiffres, la question est celle de la transparence. En effet, nous attendons toujours les bilans carbone de l’Elysée et des différents ministères promis pour... 2008. Cette promesse solennelle avait été faite le 25 octobre 2007, lors de la remise des conclusions du Grenelle de l’environnement, en présence d’Al Gore : « l’Etat sera précurseur dès 2008, tous les ministères et toutes les administrations feront leur bilan carbone et engageront un plan pour améliorer de 20% leur efficacité énergétique », disait alors M.Sarkozy.
Le mardi 13 octobre, l’audition de Christian Frémont, directeur de cabinet du Président, sur le projet de budget de la Présidence de la République pour 2010 par la commission des finances de l’Assemblée nationale, nous avait pourtant remplis d’espoirs. En fin d’après-midi, Charles de Courson, Vice-président de la commission, demandait : « Avez-vous réalisé un bilan carbone de la Présidence de la République ? » Et le conseiller de répondre : « Oui ! Nous sommes même en train d’étudier la possibilité de remplacer la chaudière à fioul par une chaudière à bois. Je dois vous préciser que j’ai été directeur de cabinet de deux ministres de l’Écologie successifs, et j’y ai beaucoup appris… » Interrogés, les services du Palais présidentiel n’ont pas souhaité communiquer sur le sujet. Délais trop courts, sujet complexe : visiblement la question ne figure pas en tête des préoccupations du service de presse de l’Elysée.
Les politiques intéressés par la question s’y cassent eux-mêmes les dents. René Dosière, le député (PS) de l’Aisne, qui mord les chevilles de l’Elysée sur la question des dépenses publiques, avait vivement réagi à la publication, en juin dernier, de l’examen du budget 2008 de l’Elysée par la Cour de comptes. « On ignore le détail des dépenses courantes de fonctionnement qui atteignent 26 millions (+ 51%) et recouvrent des postes aussi variés que les réceptions, l’alimentation, le téléphone, le courrier, les carburants, l’électricité, les fournitures administratives et informatiques etc… », écrivait-il sur son blog Autant de données indispensables pour la réalisation d’un bilan carbone. Le député proposait d’ailleurs 10 mesures « pour améliorer la transparence sur le budget de la présidence de la République, car il est temps de faire moins de littérature et plus de mathématiques ». Et la mesure numéro 7 prônée par le député concernait la réalisation d’un bilan carbone annuel...
Alors pourquoi ce silence depuis octobre 2007 ? Un an après le Grenelle de l’environnement, le Premier ministre François Fillon s’était fendu d’une circulaire sur le sujet. Et, trois jours après, le site Internet du gouvernement. précisait même : « lorsqu’il impose des comportements et des règles, l’Etat doit être le premier à s’y soumettre pour être crédible mais aussi pour inciter l’ensemble des acteurs concernés. »
Nous partageons naturellement ce point de vue au sein de la rédaction de Terra eco. « A ce stade, tous les ministères ont entamé une démarche de bilan carbone de leur activité. (…) Ce chantier devrait être clos d’ici à la fin de l’année », nous assurait-on sans sourciller quelques semaines avant la fin 2008.
Et les autres ? « Tous les ministères ont fait le bilan carbone de leur administration centrale, sauf celui des Affaires étrangères », affirme-t-on au Meeddat, chargé de superviser le plan « administration responsable ». Il s’agirait maintenant de les étendre aux services déconcentrés. Question : qui a réalisé ces bilans carbone ? Mystère. Pourquoi les résultats n’ont-ils pas été rendus publics ? Mystère toujours. Rendez-vous l’année prochaine.