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L’économie relocalisée
jeudi, 8 juillet 2004 / ponofob (illustration) , / David Solon /

Président de l’association des Amis de Terra eco Ancien directeur de la rédaction de Terra eco

Vous trouvez les livrets d’épargne démodés, l’investissement en Bourse déconnecté de la vie économique ? Il existe - bien dissimulés dans la jungle financière - des investissements hors du commun. Quand placement rime avec militant.

Tout est parti d’un ras-le-bol collectif il y a plus de vingt ans. L’économie du pays basque souffre alors le martyr, comme mise à l’écart des circuits de l’investissement. Sur place, quelques personnalités décident de s’organiser. Objectif : canaliser une partie de l’épargne de la région afin de soutenir l’emploi et de dynamiser la création d’entreprise. Herrikoa - "Du pays", en français - société de capital-risque pour le développement économique en Pays basque, vient de naître.

La méfiance des premiers temps

Les débuts sont difficiles. "Collecter des fonds à l’époque, relevait du défi", explique Marie-Claire Salaberry, militante de la première heure et désormais salariée permanente d’Herrikoa. "Il n’existait quasiment aucune structure financière non-bancaire dans la région, nous étions en 1980, et nous étions des pionniers. Les gens étaient très méfiants, d’ailleurs beaucoup ont attendu la seconde ouverture du capital pour nous rejoindre". 24 ans plus tard, Herrikoa présente un bilan très positif : 4100 actionnaires (dont 3200 sont des investisseurs individuels), 5 millions d’euros investis dans 179 entreprises et plus de 2300 emplois créés.

Profs, curés, élus...

"L’idée consiste à donner une vraie alternative aux entreprises locales", estime Marie-Claire Salaberry. "A la différence du capital-risque traditionnel qui vise plutôt les fortes plus-values avec des tickets d’entrée souvent importants, Herrikoa concentre son activité sur des projets aux montants modestes voire très modestes", poursuit Pierre Mendiboure, le président d’Herrikoa. Les entreprises visées ? Jeunes, souvent au premier stade de développement, issues de tous les secteurs économiques (imprimerie, informatique, agoralimentaire, artisanat, culture). Et, bien entendu, implantées au Pays-Basque.

La méthode Herrikoa a fait des émules. En Corse notamment est née la société de capital-risque Femu Qui en 1992 (En français, "faisons ici"). L’objectif est similaire : permettre aux citoyens qui le souhaitent de s’investir dans l’économie de leur région en soutenant les entreprises locales. Femu Qui intervient sur des projets nécessitant entre 30000 et 150000 euros, et créateurs d’emplois en Corse. Au total, ce fonds d’investissement détient un portefeuille de plus de 2000 actionnaires privés dont des professeurs, des chefs d’entreprise, des élus.

L’économie autrement

L’entreprise Pietra, qui brasse la bière du même nom et vient de lancer sur le marché le Corsica Cola, a "accueilli" Femu Qui dans son capital trois ans après sa création en 1999. "Faire entrer Femu Qui chez nous constituait un objectif symbolique", explique Dominique Sialelli le pédégé de Pietra (chiffre d’affaires, 6 millions d’euros. "Même si un euro est un euro, nous tenions beaucoup à cette dimension identitaire Corse. C’était un peu comme prouver que notre économie pouvait fonctionner à partir du terreau local."

Femu Qui a récemment intégré l’association européenne Fébéa (Fédération Européenne des banques Ethiques et Alternatives) qui regroupe 14 membres. Histoire d’échanger d’autres expériences, et se connecter à de nouveaux réseaux. Histoire aussi de vivre l’économie différemment.

Liens de l’article :
Le site Internet de Femu Qui

Le site Internet d’Herrikoa


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