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Loi américaine sur le climat : un effort modeste
lundi, 29 juin 2009 / Karine Le Loët /

Rédactrice en chef à « Terra eco ».

Pour la première fois, le Congrès américain a adopté une loi pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Si le vote est historique, l’engagement est minimal comparé aux promesses des autres pays développés.

Vendredi 26 juin est à marquer d’une pierre blanche. Ce jour-là, les Etats-Unis se sont engagés pour la première fois dans la lutte planétaire contre le réchauffement climatique. La scène se passait au Congrès. Par une très courte majorité (219 voix contre 212), la Chambre des représentants s’est déclarée favorable à la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 17% en 2020 par rapport au niveau de 2005. La loi pour "l’énergie propre et la sécurité américaine" prône aussi l’émergence d’un marché de droits d’émissions et l’obligation pour les fournisseurs d’énergie de s’alimenter à 15% au robinet renouvelable. Ailleurs, l’efficacité des bâtiments neufs devra être améliorée de 30% en 2012 et de 50% en 2016 tandis qu’une "banque verte" dotée de 7,5 milliards de dollars ( 5,3 milliards d’euros) mettra l’énergie propre au goût du jour.

Une pléiade de mesures historiques. D’autant que l’administration Bush n’avait, pour ainsi dire, rien fait sur le terrain de l’environnement, niant même l’implication de l’homme dans le changement climatique. Un bel effort. Certes. Mais frileux comparé aux engagements des autres pays développés. Car si l’Union européenne a promis de réduire de 20% ses émissions en 2020, elle a pris pour niveau de référence les émissions de 1990, bien inférieures à celles de 2005. Si les États-Unis prenaient la même date pour référence, la baisse d’émissions qu’ils promettent aujourd’hui atteindrait... 0%. Pourquoi ? Simplement parce que réduire le taux d’émission de 17% par rapport à 2005 équivaut en fait à revenir aux niveaux de 1990. Le véritable effort américain devra attendre 2020. L’État fédéral s’est en effet engagé par la même loi à réduire de 83% ses émissions par rapport à 2005 (soit 79,5% par rapport à 1990). Problème : un effort trop tardif risque d’aggraver la concentration d’émissions dans les prochaines années, alors que la communauté d’experts préconise de ne pas dépasser 350 particules par millions de CO2 dans l’atmosphère.

Compensation carbone

Et la loi comprend d’autres points faibles. "Les mesures de cette loi risquent de ne même pas compenser les émissions liées au papier sur lequel elles sont imprimées", écrit sur son blog George Monbiot, du quotidien britannique The Guardian et spécialiste des questions environnementales. Le journaliste rappelle que le texte américain promet de ne pas enquêter plus avant sur l’impact environnemental des biocarburants ou autorise l’industrie à compenser 2 milliards de tonnes de carbone par an. "Si toutes ces compensations venaient à être utilisées, souligne Monbiot, l’industrie américaine pourrait ne pas réduire ses émissions avant 2026. Enfin, dans le système d’échange de quotas de CO2 instauré au détour de la loi, seuls 15% des permis seront achetés, tandis que le reste sera distribué gratuitement.

On est encore loin de friser avec l’idéal vert outre-Atlantique. Mais c’est déjà ça, semble souligner les environnementalistes américains, à l’affût de toute forme de progrès. Reste qu’ils ne sont pas au bout de leur peine. La loi devra encore passer l’épreuve du Sénat avant de s’appliquer dans les faits.

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[L’article sur le blog de George Montbiot → http://www.guardian.co.uk/environme...]

Photo : Jurvetson