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Jean-Marc Jancovici : "C’est maintenant !"
mardi, 24 février 2009 / Louise Allavoine

Fin janvier, Jean-Marc Jancovici sortait un nouveau livre intitulé « C’est maintenant ! Trois ans pour sauver le monde ». Dans cet essai, co-écrit avec l’économiste Alain Grandjean, l’ingénieur spécialiste du climat et de l’énergie est très alarmiste quant aux risques que la planète encourt. Objectif : provoquer un électrochoc. Interview.

- Vous nous donnez trois ans pour sauver le monde, pourquoi seulement trois ?

Admettons que vous ayez un enfant de 18 ans qui a commencé à fumer à quinze ans, et que vous considériez que fumer est mauvais pour la santé. Vaut-il mieux le laisser fumer encore trois ans avant de faire quelque chose, ou commencer à vous en occuper tout de suite ? Il est évident que trois ans de plus ne seront pas anodins dans l’addition finale. Pour l’énergie et le climat, nous sommes exactement dans le même paradigme. Si nous ne faisons rien de significatif dans les trois ans qui viennent, le passif supplémentaire que nous allons prendre sur les épaules risque d’être extrêmement lourd. Les échelles de temps devant nous sont très courtes, notamment en ce qui concerne l’approvisionnement en pétrole.

- Nous avons atteint le pic de production ?

Si ce n’est pas maintenant, c’est de toute façon dans les années qui viennent. La production devrait rester à peu près stable pendant 10 à 15 ans, et puis elle va se mettre à décroître significativement. Et comme toutes les énergies de substitution sont globalement plus chères que le pétrole, et/ou posent des problèmes majeurs pour fournir une offre en quantité équivalente, on va se retrouver dans un monde où l’approvisionnement énergétique va devenir de plus en plus contraint. Or, l’énergie est à la base de toutes les transformations du monde qui nous entoure, et donc de toutes les activités économiques. Dire que nous allons peut-être connaître une époque où toutes les transformations physiques seront freinées, c’est dire que, d’ici peu, l’évolution structurelle du pouvoir d’achat pourrait fort bien être de baisser. Comme l’essentiel de mes concitoyens ne considèrent pas cette évolution comme normale à l’avenir, je vous laisse imaginer le genre d’incompréhensions que cela va amener.

- Que risque-t-on si on ne passe pas à l’action dès maintenant ?

Même si nous commencons à prendre le problème à bras le corps tout de suite, nous n’éviterons pas une partie de la claque. C’est très clair. Mais plus vite on s’y mettra, moins il y aura de malentendus et plus la stabilité politique aura de chance de se maintenir. Parce que si nous n’imprimons pas une direction très forte au monde dans les quelques années qui viennent, les conséquences du problème risquent de dynamiter les institutions. Le véritable enjeu est là. Une crise des ressources pourrait avoir raison de beaucoup de choses que nous considérons aujourd’hui comme acquises pour l’éternité, dont la démocratie, la paix… Personnellement, je ne suis pas très pressé de vivre l’expérience !

- Vous êtes extrêmement alarmiste.

Oui, mais il est temps d’avoir extrêmement peur. Nous avons tous bien rigolé jusqu’ici, mais à « crédit environnemental ». Maintenant il va falloir commencer à payer la facture. Et plus nous attendons, et plus elle va être lourde.

Lire la 2ème partie de l’interview de Jean-Marc Jancovici

Recueilli le 5 février par Louise Allavoine

"C’est maintenant !" Éditions du Seuil, 279 p. 19,50 €