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Arbres à terre, C02 en l’air
jeudi, 19 février 2009 / Pauline Vinatier

Une forêt qui disparaît et c’est du carbone qui est déstocké. Problème : les statistiques internationales sur le climat ne prennent pas intégralement en compte ces rejets. Explications d’Emmanuelle Neyroumande du WWF.

Klaus va faire du mal au climat. Les dégâts liés à la tempête auraient produit des émissions équivalentes à 7% des émissions françaises de CO2 en 1990. Pourtant, elles ne laisseront guère de trace dans le bilan français carbone. L’occasion pour Emmanuelle Neyroumande du WWF de critiquer les règles issues du protocole de Kyoto.

Comment les arbres peuvent-ils dégager de telles quantités de CO2 ?

Emmanuelle Neyroumande : Les arbres stockent du carbone mais une fois coupés, seule une faible proportion est transformée, pour l’ameublement par exemple. Le reste se décompose ou est brûlé. Dans les deux cas du C02 est dégagé. C’est vrai que dans l’absolu, ce C02 n’est pas produit par la forêt elle-même. Mais la question est davantage politique : les règles issues de Kyoto considèrent les forêts comme un stock, donc si par la suite, à cause d’une exploitation abusive (coupes, déforestation), elles rejettent massivement, il faut aussi le prendre en compte.

Y-a-t-il un danger de surexploitation en France ?

E.N. : Non, pour l’instant, la forêt est plutôt en croissance, en phase de stockage. Le risque de surexploitation est très localisé

Alors pourquoi avoir lancé l’alerte ?

E.N. : Les règles existantes rendent potentiellement possible une surexploitation forestière. Kyoto a prévu de mesurer les émissions forestières à partir d’un solde émission/stockage plafonné à 3,2 millions de tonnes équivalent CO2 (éq. CO2), le but étant d’éviter que les pays très forestiers ne fassent aucun effort, ou que les autres sources de réductions des émissions comme l’industrie soient négligées. Mais à 3,2 millions de tonnes ce plafond est très bas. Pour exemple, chaque année en France, le solde global du CO2 stocké et émis par les forêts atteint environ les 60 millions de tonnes éq. CO2. Donc une coupe massive de bois, à cause d’aléas climatiques comme Klaus ou via la gestion forestière, ne rentre nulle part dans les calculs. Pire, ce bois si il est utilisé pour le chauffage ou l’électricité (biomasse) serait comptabilisé comme une réduction d’émissions.

Que préconisez-vous alors ?

E.N. : Il faut une méthode qui prenne en compte le stock global de la forêt et qui corrige les effets pervers de ce plafond. Par exemple, on pourrait suivre l’évolution de la forêt par rapport à une une année de référence. Ainsi, on éviterait de comptabiliser positivement ce qui en réalité est négatif en termes d’émissions. C’est un point qui doit être rediscuté lors des négociations post-Kyoto.

Le site du WWF