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Poznan : "L’Europe doit être leader"
lundi, 1er décembre 2008 / Lucile Brizais

La conférence sur le climat de Poznan (Pologne) s’est ouverte le 1er décembre. Morgane Créach du "Réseau action climat" fait le point au soir d’une première journée de négociations.

Planète Terra : Quelles sont vos attentes alors que la conférence de Poznan vient de s’ouvrir ?

Morgane Créach : Il faut tout d’abord absolument garder l’objectif de 30% de réduction des gaz à effet de serre d’ici à 2020. C’est une priorité absolue. On ne peut pas se permettre de reculer sur ce chiffre, sinon cela remettrait en cause tout ce qui a été fait en matière de politique climatique depuis Kyoto. Quand on voit certains pays comme l’ Italie ou l’Allemagne reculer sur des acquis, on peut avoir des craintes. L’autre sujet crucial, c’est le financement. Une politique climatique forte demande des moyens, tant pour limiter les émissions que pour assumer le poids économique des transformations opérées par cette nouvelle politique. La priorité, c’est d’apporter un soutien financier pour les pays en voie de développement. L’Union européenne doit tenir son rôle d’exemplarité pour ces pays et leur donner des garanties.

En quoi l’Europe a un rôle important dans cette conférence ?

Il y a énormément d’attente, de pression sur les épaules des 27. L’Europe doit faire la différence et tenir son rôle de leader. Sa position a toujours été prédominante en ce qui concerne les discussions sur le climat sur la scène internationale. Ce n’est pas le moment de se désengager.

Et pourquoi pas les États-Unis ?

Même si l’élection d’Obama a replacé les États-Unis au premier plan en matière d’écologie, tout ne va pas changer en un jour. Il ne prendra ses fonctions qu’en janvier. Ici, c’est donc la délégation de Georges W. Bush qui représente les Etats-Unis et ses représentants ne sont pas décidés à bouger. L’Union Européenne est donc la seule puissance pour mener l’avancée vers Copenhague.

Vous ne semblez pas convaincue que l’Union européenne puisse tenir ce rôle : pourquoi ?

Pour être un exemple, l’Europe doit avant tout se prononcer pour une politique climatique ambitieuse en interne. Or c’est loin d’être le cas. Le paquet dit "énergie/climat" décidé en janvier 2008 a sans arrêt été revu à la baisse et vidé de sa substance. On abaisse les quotas, on assouplit les règles, on fait des exceptions. La présidence française de l’Union veut contenter tout le monde, donc elle cède pour faire avancer rapidement les négociations. Nicolas Sarkozy veut faire adopter ce texte en première lecture, c’est une question de prestige, même si cela a pour conséquence un recul en matière environnemental. Ce retour en arrière est catastrophique pour l’Europe mais aussi pour le monde. Nombre de pays se cachent derrière la crise pour faire diminuer les contraintes. L’Italie ou le Canada, réticents aux changements, vont se servir de cet échec pour réduire leurs efforts. Ce sont des craintes que nous partageons avec les autres ONG européennes et internationales.