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La récession, c’est grave docteur ?
mardi, 18 novembre 2008
/ Etienne Burkel
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On entend les mots crise et récession partout, sauf en France où les termes semblent tabous. Mais la récession, c’est grave docteur ?
Qu’est-ce qu’une récession ?
Techniquement, il n’existe pas de définition de la récession en Europe, sinon la signification simple d’une contraction de la production. Reste la question de la durée. Aux États-Unis, le NBER [1] définit la récession comme une évolution négative du PIB pendant au moins deux trimestre consécutifs. Mais même sur cette base, l’institution ne prononce le terme tant redouté que lorsque le ralentissement est corroboré par une hausse du chômage ou d’autres indicateurs forts de la conjoncture économique.
"Le taux de chômage, ou l’évolution du PIB par habitant sont de bien meilleurs indicateurs de la santé de l’économie que le simple PIB", explique Xavier Timbeau de l’OFCE [2]. "En effet, l’impact d’une évolution du PIB égale à zéro est bien plus fort sur un pays à forte croissance démographique que sur un pays dont la population stagne".
Jean-Marc Daniel, professeur à l’ESCP-EAP, estime quant à lui que seule l’Italie est aujourd’hui en récession. La grande-Bretagne et l’Espagne ne devraient pas tarder, suivies par l’ensemble de la zone euro d’ici à avril 2009. France comprise. Les États-Unis devraient y échapper en dépensant de l’argent dans des emplois publics. Un système de cache-misère, pour échapper à la récession technique.
Pour Xavier Timbeau, elle vient d’une "crise de maturité du capitalisme". Il y a un manque de règles claires imposées aux banques ou aux marchés boursiers. Il en résulte des comportements trop risqués. Tout ce qui n’est pas interdit est autorisé, et la finance internationale prend trop de libertés. Lorsque les banques perdent de l’argent, les entreprises ne peuvent plus emprunter et ne produisent plus, les consommateurs prennent peur et n’achètent plus.
Jean-Marc Daniel juge quant à lui que l’argent ne fait pas défaut. C’est la circulation de la monnaie dans le circuit économique, entre les banques, les entreprises et les consommateurs, qui est grippée. En ce sens, la bonne comparaison est celle à faire avec la crise asiatique de 1997.
"Pas du tout", réplique Jean-Marc Daniel, "il y a au contraire trop de règles". Si les banques américaines ont en premier lieu contracté des crédits risqués qui ont entrainé la crise des subprimes, c’est parce que l’État américain les y avaient forcé. Il faut donner plus d’indépendance à la banque centrale américaine, la Fed. Comme la Banque centrale européenne, son gouverneur ne doit pas avoir de compte à rendre aux politiques.