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Numérique ne rime pas avec écologique
jeudi, 19 juillet 2007
/ Fabrice Flipo
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Notre société numérique consommerait de moins en moins de matières premières. Erreur. Nos ordinateurs et appareils ménagers nécessitent des tonnes de pétrole, des litres d’eau et des quantités croissantes d’énergie.
Notre société est entrée dans une ère où l’information et la communication, jusque-là véhiculées par des moyens reposant sur des ressources relativement renouvelables (papier, parole etc.), utilisent désormais des supports « électroniques ». Tertiarisation, immatérialité de l’économie, coûts nuls de reproduction… ces éléments concourent à laisser penser que l’économie numérique est « plus légère » que les autres. Et ceci à un moment où le souci écologique devient omniprésent. La société de l’information serait une société post-industrielle, basée non plus sur l’industrie lourde, polluante, mais sur les connaissances, dématérialisées.
En effet du point de vue de l’usager l’affichage sur l’écran remplace le poids des livres, le courriel remplace l’envoi de lettres, la visioconférence remplace le déplacement en train ou en avion etc. Du fait de l’apparente légèreté des informations manipulées, les TIC véhiculent une image d’absence de friction qui leur donnent une image de « technologie propre ». Cette image sert aussi avantageusement les intérêts des fabricants car, en cette période de prise de conscience grandissante des impasses générées par notre mode de vie, l’écologie est devenue un puissant argument de vente.
La question de la croissance des quantités de déchets n’a guère été posée, et aucune des structures mises en place ne favorisera l’écoconception – de peur de décourager la frénésie d’achat entretenue par ailleurs auprès des consommateurs qui se trouvent dès lors pris dans des injonctions contradictoires, « consomme où l’économie va chuter ! » et « ne consomme plus ou la planète va mourir ! ».
Les recherches visant à réduire l’énergie consommée par nombre d’opérations semblent toutefois commencer à prendre leur essor. Il est difficile de dire si elles sont motivées par le souci écologique d’économiser l’énergie ou s’il s’agit d’une solution technique pour évacuer la chaleur croissante émise par les appareils ainsi qu’un souci d’augmenter leur portabilité c’est-à-dire leur durée d’usage sur batterie.
Là encore, d’énormes efforts ont été faits par les constructeurs qui ont divisé la consommation des téléviseurs par deux voire davantage. Mais les gains de consommation sont en grande partie compensés par la multiplicité des équipements et l’augmentation de la taille des écrans. Les premiers résultats de l’étude européenne REMODECE laissent entrevoir une forte hausse des consommations, de 160 kWh/an pour un téléviseur ordinaire à 650 kWh/an pour un écran plasma ou LCD. Les écrans les plus petits sont supprimés des catalogues.
Tout indique que ces consommations s’ajoutent aux consommations existantes. L’effet de substitution est partiel. Il semble donc que nous soyons encore loin d’un « découplage ».