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Quand la chirurgie colle aux vers marins
samedi, 18 juillet 2015 / Camille Chandès

Pour refermer les plaies internes, la société française Gecko Biomedical développe des adhésifs bio-inspirés. Les essais cliniques sur l’homme seront lancés avant la fin de l’année.

Biomimétisme - « L’évolution trouve toujours les meilleures solutions pour résoudre les problèmes », a l’habitude de dire Jeffrey Karp, spécialiste de la bio-inspiration et professeur à la Harvard Medical School, aux Etats-Unis. En l’occurrence, le problème auquel s’attelait le chercheur et son collègue, Robert Langer, professeur à l’Institut de technologie du Massachusetts (MIT), était de trouver une solution pour réparer les malformations du cœur de certains nouveaux-nés, dont deux chambres cardiaques communiquent alors qu’elles ne le devraient pas.

Leur cahier des charges était précis : la future solution devait pouvoir remplacer les chirurgies traumatisantes à cœur ouvert ou la pose d’implants, être non agressive pour le corps humain, « boucher les trous » le temps de la cicatrisation naturelle, travailler en milieu mouillé (à cause de la forte présence de sang), être élastique (à cause des déformations liés aux battements du cœur) et disparaître une fois sa mission accomplie. Pas simple.

Coquillages et étanchéité

« Ils ont analysé les différents principes d’adhésion rencontrés dans la nature dans des situations similaires à celles retrouvées dans le corps humain. Ils ont ensuite développé de manière synthétique un produit possédant ces mêmes propriétés », détaille Christophe Bancel, directeur général de Gecko Biomedical, entreprise française créée en 2013 sur la base de la technologie inventée par les deux chercheurs américains.

Et c’est un ver marin de Californie qui a inspiré les colles chirurgicales biodégradables et biocompatibles développées par la jeune entreprise. Pour se protéger contre les prédateurs et résister aux forces des vagues, Phragmatopoma californica appelé aussi sandcastle worm (« ver château de sable ») fabrique son habitat en sécrétant une substance adhésive. En se solidifiant, celle-ci permet d’agglomérer entre elles les particules de sable et de coquillages. Et ce mucus est résistant à l’eau.

Remarqués par Forbes

Depuis, le projet a fait son chemin : Gecko Biomedical va lancer les essais cliniques sur l’homme d’ici à la fin de l’année, pour une première application en chirurgie vasculaire. Le produit sera utilisé dans les cas où les sutures ne permettent pas d’avoir une étanchéité totale au niveau des artères. « Le produit a la viscosité du miel. Illuminé avec une lumière spéciale bleue, il se polymérise en quelques secondes et forme une protection élastique et étanche. Il se dégrade et disparaît ensuite au bout de trois mois », poursuit Christophe Bancel.

A terme, l’ambition de la start-up est de développer des nouvelles générations de produits qui pourront, dans certains cas, remplacer les sutures, s’adapter à d’autres types de tissus (cœur, poumon, système digestif…) et se présenter sous forme de patch. Elle a levé depuis sa création 9,5 millions d’euros, s’est affichée sur la une du célèbre magazine Science Translational Medicine et sa directrice de recherche, Maria Pereira, a été reconnue en 2015 par le magazine Forbes parmi les trente innovateurs de moins de 30 ans dans le domaine de la santé. Preuves que la bio-inspiration a de beaux jours devant elle.


Création en 2013

Douze salariés


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