https://www.terraeco.net/spip.php?article56381
|
Pourquoi Volvic, Coca et Uhu s’enflamment pour le bioplastique
mercredi, 10 septembre 2014
/ Amélie Mougey
|
Toutes ces marques ont choisi le plastoc issu de la canne à sucre ou du maïs pour leurs nouveaux emballages. Idée choc ou en toc ?
Dans nos rayons apparaissent des produits caméléons. En janvier, la boîte rose du sucre Daddy a viré au vert. A la rentrée, la colle Uhu est devenue bicolore. Le responsable de cette métamorphose : le plastique végétal, ou bioplastique, qui les emballe. En 2011, Tetra Pak était l’un des premiers, avec Nestlé, à snober le pétrole pour la canne à sucre. Puis Volvic et même Coca-Cola se sont, en partie, convertis, quand Danone optait pour l’amidon de maïs. Trois ans plus tard, le plastique végétal plafonne à 1 % de la production mondiale, mais l’association European Bioplastic table sur une croissance de 400 % d’ici à 2017. Faut-il s’en réjouir ?
Reste la canne à sucre, utilisée par Tetra Pak, Volvic ou Uhu. François-Régis Goebel, agronome chargé de la canne à sucre au Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) est convaincu de son potentiel : « Elle résiste aux conditions extrêmes, au manque d’eau, aux ouragans. » Pour lui, cette plante peut produire du plastique sans dommages pour l’environnement, « à condition de rester hors d’un système intensif ».
Pour l’heure, la plupart des marques se fournissent chez Braskem, le leader brésilien de la pétrochimie. Depuis qu’il s’est lancé dans le plastique « vert », son siège est le théâtre de manifestations de paysans sans terres qui l’accusent d’accaparement et dénoncent l’usage de pesticides et d’OGM. Ses 200 000 tonnes annuelles d’agroplastique concurrenceraient la production alimentaire. « La culture de canne à sucre occupe 8 millions d’hectares au Brésil, rétorque Alexandre Elias, porte-parole de Braskem. Il en reste 65 millions identifiés comme propices. » Ainsi, la canne à sucre peut devenir polyéthylène « sans que cela n’ait d’impact sur les écosystèmes ou prenne la place d’autres cultures », assure Tetra Pak. La méthode ? Planter sur des terres « marginales », « dégradées » ou en jachère. Un concept qui fait tiquer Sylvain Angerand, des Amis de la Terre. « C’est l’argument classique des agrocarburants, qui oublie que des gens vivent sur ces “ terres marginales ” et partent défricher la forêt quand ils sont délogés. »
Tous ces plastiques permettent surtout d’emballer l’esprit. Ainsi, des pommes estampillées « Demain La Terre », une asso de producteurs qui travaillent en agriculture raisonnée, ont chacune leur emballage en bioplastique ! « Comme nous avons peu de budget pour communiquer sur nos efforts, les emballages servent de support », confie Guillaume Floch, chargé de produit au Verger de la Blottière, une des entreprises membres. L’illustration des limites du bioplastique, selon Christian Berdot : « En se focalisant sur la composition, on oublie la question de fond : celle du besoin. » —
A vous de jouer !
Cette rubrique vous appartient : envoyez-nous les déclarations, les arguments ou les pubs qui vous font sortir de vos gonds et Terra eco démêlera le vrai du faux !
agir@terraeco.net