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Lipton Yellow, le thé vert ?
lundi, 26 octobre 2009
/ Emmanuelle Walter
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Le leader mondial affiche sa nouvelle mascotte : une grenouille verte. Symbole du label Rainforest Alliance, elle est censée garantir protection des ressources naturelles et qualité de vie des cueilleurs. C’est avant tout un moyen de ne pas perdre la course à l’équitable.
Le Lipton Yellow Label. Oui, le petit sachet jaune ! Numéro un mondial du marché, ce thé grand public et sans grande saveur est acheté au moins une fois par an par 60 % des foyers français. Lipton achète chaque année 12 % du thé noir produit sur la planète. C’est dire l’impact potentiel de la campagne « développement durable » engagée depuis un an et demi par cette filiale d’Unilever.
Objectif ? Faire connaître la labellisation des plantations africaines et asiatiques par l’ONG américaine Rainforest Alliance. Celle-ci exige la protection des ressources naturelles, l’amélioration de la qualité de vie des cueilleurs de thé et la viabilité des exploitations. Pour l’heure, seules 50 % des feuilles contenues dans un sachet de thé proviennent de plantations certifiées ; l’an prochain, pour le marché européen, on passera à 100 %. Et en 2015, tous les paquets vendus dans le monde devraient porter le label Rainforest, une petite grenouille verte.
Plus sophistiqué, le site Internet Lipton for the future est « davantage destiné aux 25-35 ans qui s’intéressent à ces questions, alors que nos consommateurs sont assez âgés », explique Guillaume Voneschen, chef de produit. Ici, on navigue entre interviews lapidaires de cueilleurs (« Combien avez-vous d’enfants ? », « Buvez-vous du thé ? ») et jeux vidéo mettant en scène des petits avatars de salariés des plantations Lipton au Kenya (« Donnez un tablier de protection à chaque travailleur ! », « Accompagnez tous les enfants de la plantation à l’école ! »). Ennuyeux : il n’est question nulle part du salaire des cueilleurs ou du prix du thé au kilo.
Rainforest apparaît donc, a priori, comme une certification peu exigeante, adaptée aux besoins des multinationales. Mais si l’on creuse, on s’aperçoit que ce n’est si simple. Comparons cette fois avec LE label équitable, Fair Trade-Max Havelaar. Surprise : le prix plancher fixé par ce label pour le kilo de thé est actuellement plus bas que les 2,50 dollars payés par Lipton ! En outre, Lipton assure payer ses cueilleurs kenyans trois fois le salaire minimum du pays. Pour la comparaison manichéenne, méchante multinationale contre généreux équitables, c’est un peu raté.
Alors quelle différence entre une grande plantation de thé certifiée Rainforest Alliance et une autre certifiée Fair Trade ? Réponse : la gestion exigée par Rainforest ne bouleverserait pas le management paternaliste des grandes plantations. Les interviews infantilisantes des cueilleurs kényans de Lipton ou cette photo d’un patron avec l’ouvrier en tablier jaune et vert font office d’aveu.
A l’inverse, Fair Trade se veut progressiste : « Nous demandons que des représentants élus des salariés et des comités paritaires soient décisionnaires sur l’utilisation de l’argent versé en plus, la “ prime de développement ”. Quitte à aider les cueilleurs à devenir plus indépendants en développant de petites entreprises parallèles. » Chez Rainforest, on reconnaît l’absence de « comités paritaires ». Mais on assure favoriser la mise en place d’organisations similaires. L’ONG britannique Consumers International, comparant les systèmes, donnait cependant l’avantage à Fair Trade.
« Les informations sont honnêtes, Rainforest est une ONG reconnue et sérieuse, et Lipton est clair sur son point d’étape : seule la moitié du thé est certifiée. On ne peut taxer la marque de greenwashing. Mais la mise en scène publicitaire et le site Internet, comme ce jeu vidéo avec les cueilleurs de thé à qui il faut mettre un petit tablier, renvoient une image virtuelle et aseptisée de l’Afrique, assez inacceptable, qui décrédibilise la démarche. »
Illustrations : DDB
Le collectif Adwiser
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