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Tu sais que ton restaurant sert du « fait maison » quand…
mardi, 15 juillet 2014
/ Thibaut Schepman / Non, nous n’avons pas à « sauver la planète ». Elle s’en sort très bien toute seule. C’est nous qui avons besoin d’elle pour nous en sortir. |
Le décret sur le « fait maison » a accouché d’une souris. « Terra eco » vous livre donc quinze indices pour savoir à quelle sauce votre restaurant prépare ses plats. A table !
Le décret sur le « fait maison » finit donc en eau de boudin. Le texte qui devait enfin nous permettre de savoir si les plats servis au restaurant ont été préparés avec amour ou décongelés sans vergogne sera au mieux inutile. Terra eco a donc mis les bouchées doubles pour vous aider à y voir plus clair. Trois spécialistes des bonnes tables nous ont livré leurs secrets pour séparer le bon grain de l’ivraie (sous vide). Voici les quinze conseils de Ariane Grumbach, « diététicienne gourmande », Alain Tortosa, créateur du label « Les restaurants qui font à manger », et Sabrina Charvet, responsable de la communication du label « Les restaurants de qualité ». Plus votre restaurateur respecte les quinze règles ci-dessous, plus vous pouvez le croire quand il assure qu’il se décarcasse :
« Le premier signe, c’est la taille de la carte et le nombre de choix au menu, il faut qu’il y en ait peu ou, s’il y en a beaucoup, que ce soit proportionnel au personnel en cuisine et en salle et au nombre de clients », avance Alain Tortosa.
Une carte plastifiée, écornée et jaunie par le temps est forcément un mauvais signe. Car un restaurateur qui « fait maison » utilise forcément des produits frais et fait donc nécessairement varier son offre tout au long de l’année. A l’inverse, l’ardoise de bistrot où le plat du jour est inscrit à la craie est plutôt un bon signe.
« Le restaurateur qui arrive à 11 heures va forcément devoir passer des choses au micro-ondes. Le “fait maison”, c’est un énorme boulot. Ça implique d’être là tôt le matin aux épluchages », assure Sabrina Charvet.
Les grands classiques des tables françaises ont souvent des goûts et des aspects semblables. Et pour cause, ce sont souvent des produits surgelés vendus par les industriels qui livrent les restaurants, comme le montre notamment le documentaire La république de la malbouffe. Dans la liste des classiques, on trouve notamment les plats en sauce (bœuf bourguignon, cassoulet…), le fondant ou le moelleux au chocolat et le gratin dauphinois. Si la carte d’un restaurant multiplie ce genre de propositions, vous pouvez vous méfier !
« Demandez au serveur de vous servir votre plat et sa sauce séparément. Si ce n’est pas possible, ça doit vous mettre la puce à l’oreille », note Ariane Grumbach.
« C’est tout simple, mais le restaurant qui sert des plats de la région va plus souvent utiliser des produits locaux et non pas des choses toutes préparées », indique Sabrina Charvet.
« Si l’on vous propose des plats aux appellations pompeuses ou vieillottes alors qu’il y a peu de gens en cuisine ou peu de clients, il faut se méfier. Une carte où l’on trouve une petite mousseline d’asperge au fenouil et aux tomates confites et du chevreuil à la sauce grand veneur, ça demande beaucoup de monde en cuisine », conseille Ariane Grumbach.
« Si l’on cuisine à la maison, on a certains impératifs. On va proposer un poisson qu’on n’a pu trouver qu’en petite quantité, on ne va pas pouvoir prévoir de grandes quantités de tous les plats. Là, c’est au consommateur de le comprendre et de ne pas râler quand un plat n’est plus disponible », poursuit la diététicienne.
« Quand il y en a une, c’est toujours intéressant de jeter un œil à la colonne réfrigérée où sont présentés les desserts. Il y a une logique : si c’est un petit établissement, il est étonnant de voir de très nombreuses sortes de desserts. J’ai l’habitude de faire aussi attention aux imperfections sur les desserts, par exemple, des éclairs qui ne font pas tous la même taille, en me disant que c’est signe de “fait maison”. Mais attention, il y a des pâtissiers qui savent faire des desserts sans aucune imperfection, et il faut aussi savoir que les industriels ajoutent des imperfections volontaires dans leurs produits pour simuler le “fait maison” », renseigne Alain Tortosa.
Les labels « Les restaurants qui font à manger » ou « Les restaurants de qualité » indiquent le respect d’une charte et surtout une volonté forte de faire à la main. De même, un restaurant qui s’engage à s’approvisionner auprès de maraîchers du cru, qui se spécialise dans la cuisine végétarienne ou encore veut vous nourrir en bio aura plus de mal, mais aussi moins tendance à vous refiler du surgelé.
« Plus le restaurateur vous répond avec aisance et avec plaisir, plus il a des choses à dire sur l’origine des produits et la manière de les cuisiner, plus c’est bon signe. Beaucoup des restaurants qui pratiquent le “fait maison” seront très heureux de vous en parler, voire de communiquer leurs recettes », ajoute Alain Tortosa.
« Un restaurateur honnête n’a rien à cacher, au contraire. Si vous lui demandez gentiment, il doit accepter, quitte à vous proposer un petit café pour patienter jusqu’à la fin du service pour faire votre visite », défend le fondateur du label « Les restaurants qui font à manger ».
Si la cuisine est remplie de congélateurs débordant de plats sous vide, vous pourrez démasquer votre restaurateur. « Dans certaines cuisines que nous avons visitées, il n’y a même pas de congélateur, ce n’est pas indispensable ! », jure Sabrina Charvet.
Sur le papier, l’état des toilettes ne dit rien du travail du cuisiner. Et pourtant, nombreux sont les spécialistes qui y veillent. « C’est un symbole, ça ne trompe pas : cela montre la rigueur de l’établissement », assure Sabrina Charvet.
Pas forcément, selon nos trois spécialistes. « Un menu “fait maison” à 15 euros, ce n’est pas impossible. A vous de voir en fait la cohérence entre les plats proposés et l’addition », note Sabrina Charvet. « Il y a des restaurants qui pratiquent des tarifs très élevés et qui ne se gênent pas pour proposer de l’industriel », dénonce Alain Tortosa. « C’est sûr qu’une carte “fait maison” bien remplie demande du monde en cuisine et fait grimper les prix », complète en revanche Ariane Grumbach.
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