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Marcher, c’est leur quotidien
jeudi, 27 mars 2014 / David Solon /

Président de l’association des Amis de Terra eco Ancien directeur de la rédaction de Terra eco

, / Claire Baudiffier , / Julien Ropert /

Des gazons de Ligue 1 à Terra eco, la couleur ne change pas.

Serveuse, facteur, ancien détenu. Ils ont un rapport à la marche particulier et quotidien. Voici leurs témoignages.

Ingrid, serveuse

« Je ne sais pas combien de kilomètres je fais chaque jour, mais en treize ans, avec la salle à l’étage, j’ai dû monter l’Everest et le mont Blanc ! Tu multiplies les déplacements et tu le sens dans les pattes. Mais je m’y suis habituée, et ça me fait même du bien. C’est du sport intégré au travail… sans payer la salle de sport ! C’est vrai que, quand je rentre chez moi, je suis rincée. Le week-end, je ne m’amuse pas à faire de longues balades. Par contre, en vacances, il faut que je bouge, à vélo ou à pied. Je suis incapable de rester allongée sur la plage, donc je la parcours d’un bout à l’autre. Les gens doivent me prendre pour une folle. En ville, quand je suis avec des amis, je marche aussi hyper vite. Le rythme est complètement intégré. D’ailleurs, c’est au retour des vacances que je me rends le plus compte de la pénibilité du métier. Pendant les deux ou trois premiers services, je le sens, j’ai les jambes lourdes. » — Recueilli par J.R.


Jorge, ancien détenu

« J’ai été interné huit mois dans un centre de rééducation à Sancti Spíritus, à Cuba. On m’a déjà parlé de sécurité, de bouffe, de santé, mais de marche en prison… Je n’y avais jamais réfléchi avant. Moi, entre quatre murs, j’ai tout fait, sauf du surplace. J’ai été actif, fait de la gym. J’ai marché devant moi, j’ai fait gaffe à ma démarche, eu les yeux dans le dos pour surveiller les autres… Bon, je ne suis pas quelqu’un de classique, j’ai tendance à positiver. Mais on peut parfaitement être enfermé et avancer dans sa tête, ou bien être libre et tourner en rond… Ce qui est certain, c’est que ce passage en prison a été pour moi le point de départ d’un tour du monde. En franchissant la porte à ma sortie, je n’ai même pas eu envie de courir. Juste de garder le même rythme. Et je me suis mis à marcher, marcher, marcher. Aujourd’hui, j’ai 41 ans et je ne suis pas près d’arrêter. » — Recueilli par D.S.


Jacky, facteur

« Je fais mes tournées à pied ou à vélo depuis trente-huit ans. Depuis neuf ans, je distribue le courrier dans un quartier du centre-ville de Nantes. C’est chaque jour le même trajet : on ne peut pas changer de chemin, car il faut récupérer du courrier dans les dépôts, etc. Je pars de la Poste centrale en tram avec mon chariot, avec ma tenue spécifique et mes chaussures de sécurité, puis je marche 7 km en tout, pendant environ trois heures. J’aime beaucoup ça, même si, quand il pleut, c’est moins drôle, évidemment ! En tout cas, ça entretient physiquement, c’est certain ! J’ai d’ailleurs un petit peu réduit le sport à côté, mais je continue à jouer au foot et ne suis pas pour autant fatigué le soir. Cela dit, quand je suis en vacances, je ne marche quasiment pas, c’est repos ! Et je profiterai de la retraite, dans quelques années, pour faire plein d’autres choses que marcher ! » Recueilli par C.B.