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Fraîche et attractive, la nouvelle conserve va-t-elle déboîter ?
mardi, 4 mars 2014
/ Karine Le Loët / Rédactrice en chef à « Terra eco ». |
Plus green, la conserve, et bien meilleure qu’avant, affirment les industriels. Pourtant, la boîte en métal se traîne encore une vilaine réputation qu’ils s’efforcent de changer.
Elle est belle, elle est verte, ma conserve, vantent les industriels. Ni chaîne du froid pour la maintenir consommable, ni transport aérien pour l’acheminer en urgence vers les rayons des supermarchés… La conserve a, pour elle, le luxe du temps. Certes, parce qu’elle est composée d’aluminium ou d’acier pour les boîtes, de verre pour les bocaux – deux matériaux produits à grand renfort d’énergie – son impact sur l’environnement n’est pas nul, loin s’en faut. Sauf que la conserve a un atout de poids : constitué d’un seul matériau, elle est aisément recyclable. Et souvent recyclée : à hauteur de 71% en Europe pour l’acier, 58% pour l’aluminium selon un document publié par l’Union pour la promotion des industries conserve appertisée (Uppia) et 68% pour le verre.
Elle est pas belle, ma conserve ? Les Français ne la boudent pas puisqu’ils en boulottent 50 kg par habitant chaque année. Au palmarès des produits consommés par les ménages : les légumes (63%), les plats cuisinés (15%), les fruits (13%) et les poissons (7%). Mais voilà, ce jour de février, dans une salle perchée dans les étages du salon de l’agriculture, l’institut TNS-Sofres présente les conclusions de son enquête sur la consommation de conserves. Et elles sont loin d’être réjouissantes. « La perspective pour 2017 est un ralentissement de la croissance », souligne l’une des auteurs de l’étude.
Mais plus que la préoccupation sanitaire, ce sont « les qualités nutritionnelles et le goût [qui] restent les principaux freins à l’achat de conserves », souligne l’enquête de TNS-Sofres. Pourtant, les industriels l’affirment haut et fort : il est loin le temps des haricots mous que vous repoussiez d’un doigt de fourchette à la cantine. « Aujourd’hui, les conserves n’ont plus rien à voir. On module les températures pour une moindre détérioration gustative, on a des procédés de vapeur puis de refroidissement sous vide. Et puis, il y a plus de diversité dans les recettes », souligne Laurence Silbert, déléguée générale de l’Uppia. Le souci d’une réputation c’est qu’elle est souvent tenace. Et celle-là ne date pas d’hier.
Mais le succès du procédé viendra surtout au détour de deux autres inventions : la découverte, par Pasteur, des microbes qui en expliquent enfin le fonctionnement, puis le développement de la métallurgie. « La difficulté de Nicolas Appert, c’était de boucher ses bocaux. En bon champenois, il utilisait des bouchons de liège comme pour le champagne mais ce n’était pas parfait. La métallurgie invente la boîte métallique avec un sertissage », précise Agnès Bernardin, directrice d’Unilet, l’interprofession des légumes en conserve et surgelés. Les guerres successives finiront de pousser le succès de la conserve qui devient la meilleure alliée des régiments dans les tranchées. Après l’armée, la conserve gagne le monde civil : « Dans les années 1950, la population urbaine augmente, les activités des femmes se développent. Il faut approvisionner les villes. Alors la conserve se développe partout en Europe », poursuit Agnès Bernardin.
Alors les industriels planchent depuis plusieurs années pour redorer son image. De fraîcheur d’abord pour les poissons ou les légumes. « Depuis dix, quinze ans, on précise que derrière chaque légume, il y a un agriculteur qui travaille, qu’il s’agit d’un bon légume frais, parce qu’on le conserve vite », assure Agnès Bernardin. En effet, la mise en boîte – ou en bocal - doit se faire en moyenne dans les 4 heures suivant la cueillette. Aussi, « les conserves conservent 70% des vitamines, assure Laurence Silbert. Rien ne vaut évidemment un produit frais mais entre le moment où il est récolté et celui où il est stocké en magasin, il peut y avoir une déperdition assez importante. »
Frais mais aussi bon pour l’environnement, assurent encore les industriels. Pour limiter les coûts, pas de serre pour les légumes qui doivent finir en conserve, les produits sont cultivés en saison et en plein champ. Et le bio dans tout ça ? « C’est 2,3%. Ça reste assez confidentiel parce que la demande est moindre », assure Laurence Silbert. Un taux qui pourrait grossir avec la demande de plus en plus importante de la restauration collective – notamment des cantines scolaires – pour le bio.