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Leçon numéro 1 : Les toilettes sèches
jeudi, 27 février 2014 / Bridget Kyoto /

Bridget Kyoto est un double déjanté de Laure Noualhat, journaliste, qui offre chaque semaine une Minute nécessaire sur Internet.

Les liens de Bridget : page Facebook, Youtube

Ça vous effraie, les « W.-C. à litière bio-maîtrisée » ? Pas de panique, petits scarabées, voici les conseils de votre nouveau gourou !

Pour cette première expérience commune, dirigeons-nous vers le petit coin, là où chaque humain tente de masquer son appartenance à la longue et complexe chaîne de la vie. Et si on mettait nos miches au sec en déféquant sans H2O ?

- Première étape : changer son rapport au caca

Isabelle D.g’I est une « écologiste convaincue, pratiquante avec grosses contradictions (presque) assumées ». Sauf que les toilettes sèches incarnent pour elle l’acmé de l’impossible. « C’est grave, docteur coach ? », demande-t-elle, implorante. Bien sûr que non, petit scarabée. Tu es simplement victime de ton conditionnement. Chacun d’entre nous a reçu, du moins en France, une éducation héritée d’habitudes hygiénistes qui nous ont déconnectés de notre simple état de tuyau. Enfant, on t’apprenait que la merde était sale, Isa. Adulte, tu considères que la trimballer au fond du jardin est indigne de toi. Nous devrions nous souvenir que la merde est bourrée de vie. Freud ne disait-il pas que les déjections étaient assimilables à de l’or ? Néanmoins, chère Isabelle, voici quelques trucs pour économiser de l’eau : ne tirer la chasse que tous les trois pipis ou placer un poids mort dans la chasse d’eau pour éviter la formation des chutes du Niagara dans les toilettes.

- Deuxième étape : auditer sa merde !

La toilette à litière bio-maîtrisée se pense en amont, les amis. Comme Samsagace le signale, il faut de l’espace pour composter vos cacas. Au bout de six mois, le composteur de sa « famille de 1,5 adulte (sic) et 1 enfant » était plein à craquer. « Le compost issu de déjections doit mûrir plus d’un an, il aurait fallu trois composteurs pour viabiliser ce système, parce qu’en plus nous compostons nos déchets de cuisine. » Ensuite, il faut s’initier à la loi de base de formation des sols pour éviter de perturber les cycles de l’azote, du carbone, du phosphore et de l’eau. En gros, comprendre comment se forme l’humus. Il faut enfin décider si l’on sépare urines et fèces. Perso, je répondrais non à cette dernière interrogation, petits scarabées : pour faire simple, la clé de la maîtrise des odeurs se trouve précisément dans la réunion du pipi, du caca ET de la litière (de la cellulose made in copeaux et sciure… issus de bois non traités, please !).

- Troisième étape : prendre ses marques

Après cinq années de toilettes sèches, Céline et sa petite famille semblent satisfaits – 38 m3 d’eau économisée par an (bravo !), pas d’odeur… –, à un détail près : la vidange du seau et de son contenu. « Dur dur l’hiver à 19 heures de se rendre compte que le seau est plein. » La solution de Céline ? Des toilettes sèches en bas, des normales au premier étage de sa maison. La mienne ? Tirer à la courte paille pour savoir qui devra s’acquitter de cette désagréable tâche et prévoir une pince à linge. On me pose souvent la même question : comment fais-je, ô coach Bridget, en appartement ? En ville, sans jardin, dans un immeuble ? C’est simple. Vous ou-bli-ez, mes scarabées chéris ! Ou alors, vous retroussez vos manches pour décrocher un rendez-vous en mairie. Et racontez-moi la réaction de vos élus devant votre projet d’assainissement écologique, cela me donnera l’occasion d’une bonne poilade ! Un seul argumentaire à leur soumettre : notre caca n’a rien à faire dans l’eau, 30 % à 40 % de ce qui souille nos égouts sont nos déjections, et une bonne partie de notre système d’assainissement actuel (avec des dominos de stations d’épuration, de dépollution, de traitement…) ne tient qu’à nos étrons.

Plus sérieusement, pour bénéficier de chiottes sèches en habitat collectif, je crains qu’il ne faille déménager en Suède, en Chine ou à Fribourg, en Allemagne, où des expérimentations sont en cours (1). A Cressy, en Suisse, un immeuble de 13 logements est doté de non-water-closets. Des lombrics se régalent des déjections et les transforment en compost. Mais ce type de projets se pense très très en amont de la construction. Tels des ambassadeurs de tri, il faudrait imaginer des ambassadeurs de fiente qui toqueraient dans chaque maison individuelle pour faire œuvre de pédagogie. —

(1) Consultez l’excellent site Toilettes du monde


A vous de jouer ! Cette rubrique vous appartient : vous avez des questions pour Bridget ? Un défi à lui lancer ? Ça se passe ici. Thème du mois prochain : mon premier potager (bio) !

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