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Pourquoi les petits pots ont (souvent) le même goût
mercredi, 5 février 2014
/ Claire Baudiffier
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Sucrés, salés, avec un ingrédient ou plusieurs, les petits pots se déclinent à toutes les sauces. Mais sont souvent critiqués pour leur manque de saveur. Alors les marques innovent et simplifient leurs recettes, déjà largement réglementées.
Ils existent depuis un demi-siècle. Vous en avez forcément goûté au moins une fois. Avant de donner une cuillerée à vos enfants, à vos frères et sœurs, ou aux petits anges que vous gardiez. Et ne nous mentons pas, vous vous êtes – parfois – demandé « Mais pourquoi donc les petits pots ont-ils toujours le même goût ? » Salé ou sucré, aux légumes ou à la pomme, avec du poulet ou du saumon, ce petit goût sucré, pâteux, voire fade, revient, encore et toujours.
Les petits pots – et l’alimentation infantile en général – répondent à une réglementation très stricte, détaillée dans un arrêté du 1er juillet 1976, beaucoup plus contraignante que pour l’alimentation « classique » pour adultes. Pas de colorants, pas de conservateurs, pas d’arômes artificiels… Des taux de résidus de pesticides (pas plus de 0,01 mg/kg) et de nitrates très bas. Tout doit être calculé et vérifié au centième de milligramme près. Ainsi, Blédina annonce réaliser, en tout, entre 200 et 300 contrôles sur les matières premières, puis une centaine sur le produit en cours et en fin de fabrication. Chez Nestlé, 50 points de contrôle sont exercés sur la matière première, 10 sur les produits finis et 5 sur les emballages. « Si les taux de contaminants sont trop élevés, la marchandise passe à la casse », renchérit Ludovic Aujogue, directeur de marque chez Nestlé, qui détient près de 30% des parts de marché de l’alimentation infantile.
Anne-Sophie Vittaz, responsable qualité de Blédina – leader du secteur avec 120 millions de petits pots fabriqués chaque année et près de la moitié des parts du marché de la « babyfood » –, assure, elle, que ses équipes se rendent régulièrement chez les agriculteurs. « En tout, il faut deux ans de travail avant de collaborer durablement avec un producteur. D’abord, nous leur présentons notre cahier des charges, auquel doit satisfaire la matière première, puis ils sont accompagnés deux ans sur leurs pratiques agriculturales », détaille-t-elle. Au final, pour ses fruits, Blédina se fournit à 85% en France et en Italie. 95% des légumes sont européens ; les 5% restants proviennent d’Amérique du Sud (pour les tomates) et les aubergines et poivrons de Turquie. Le bœuf est certifié « VBF » (viande bovine française) tandis que les poissons, toujours sauvages, bénéficient du label MSC (qui garantit, entre autres, le bon état du stock). « Même si nous n’avons pas encore beaucoup communiqué sur le sujet », ajoute Anne-Sophie Vittaz.
Mais alors, bio ? Pas bio ? Pour le pédiatre strasbourgeois Arnault Pfersdorff, « les petits pots sont moins fades qu’ils n’ont pu l’être, mais les parents, depuis quelques années, veulent transmettre le goût des aliments à leurs enfants et prennent davantage le temps de cuisiner ». D’ailleurs, les grandes marques, dont les ventes stagnent ou baissent, l’ont bien compris et s’orientent de plus en plus vers une simplification des recettes. « Dans la mesure du possible, on essaye de ne proposer que les ingrédients indispensables dans la gamme Naturnes, parfois en rajoutant un peu d’amidon transformé de maïs pour épaissir la préparation », explique Ludovic Aujogue. Blédina essaye également, progressivement, de se passer d’amidon de maïs dans ses recettes. Le nom un peu barbare de cette substance, dont l’ajout peut être évité en augmentant les teneurs en légumes, inquiétant parfois les parents. Même chose pour les arômes d’épices et vitamines rajoutés en cours de fabrication, encore largement présentes dans les gammes du géant du secteur.
Et les papas, eux, ne nourrissent pas leurs bébés ?
Du slogan « Blédina, du côté des mamans » à la rubrique « Questions de maman » sur le site de Nestlé, les papas sont les grands oubliés de la communication des marques. Qui, paradoxalement, en sont tout à fait conscientes. « Effectivement, c’est une question qui me taraude aussi, avoue Ludovic Aujogue, mais la réalité des choses, c’est que, même si la part que prennent les pères dans la vie de l’enfant est beaucoup plus importante qu’avant, pour la préparation des repas, c’est encore la maman qui s’y colle la plupart du temps, dans 98% des cas. » Mêmes explications de Blédina, qui précise quand même avoir fait évoluer son slogan en rajoutant « du côté des mamans… et des papas » dans son dernier spot télévisé…