https://www.terraeco.net/spip.php?article5219
|
Le stylo
lundi, 31 août 2009
/ Louise Allavoine
,
/ Simon Astié
|
On les use jusqu’à plus soif, on les mordille, puis on les jette… Les stylos se consomment comme des petits pains. Fière de son plastique recyclé, notre plume moderne serait-elle à la pointe de l’écologie ?
Sortez vos crayons – verts – et prenez note du problème suivant : « sachant qu’un stylo ne se recycle pas et que plus de 90 % de son impact environnemental provient de ses matières premières, essentiellement plastiques, quelles tactiques adopteriez-vous pour mettre fin à son illetrisme écologique ? »
Le numéro un mondial des instruments d’écriture n’est pas obsédé par la page blanche, mais par un mot : optimisation. Il a donc développé un outil d’écoconception afin de mesurer l’impact environnemental de ses produits avant leur fabrication. « Cela permet de savoir, dès la conception, ce qui se passe si on utilise telle matière, si on produit dans telle usine… », détaille Christine Desbois. Mais l’outil magique est coûteux, alors Bic ne l’utilise pas pour tous ses produits. Le groupe refuse en effet de répercuter ce montant sur l’étiquette : cela irait à l’encontre de sa success story basée sur des prix abordables.
Pour que ses performances environnementales sautent encore plus aux yeux des consommateurs, le japonais propose, depuis janvier 2009, un stylo à la silhouette striée et à la couleur azur d’une bouteille d’eau. Normal, il est fabriqué à 89 % à base de plastique recyclé dont les deux tiers sont du PET, le plastique issu du tri effectué par les consommateurs. Avec une bouteille, Pilot fabrique 4 stylos de la gamme B2P – prononcez « bitoupi » –, acronyme signifiant « from bottle to pen », soit « depuis la bouteille jusqu’au crayon ». Cette année, 4,5 millions de B2P devraient sortir de l’usine savoyarde de Pilot qui les fabrique. Une goutte d’encre comparée aux 20 millions de Frixion, le modèle le plus vendu par la marque. « Le Frixion existe déjà depuis trois ans alors que le B2P n’a pas encore un an », se défend Mathias Ringeard.
Mais pourquoi les matières premières recyclées ne se généraliseraient-elles pas à tous les crayons de la marque, à commencer par les plus vendus ? Le groupe évoque lui-même cette possibilité sur son site Internet : « Si tous les stylos produits dans les principaux pays d’Europe en une année étaient en plastique recyclé, cela permettrait d’économiser au moins 78000 tonnes de plastique, soit l’équivalent d’un mois de carburant pour l’ensemble du parc automobile parisien. » Alors, qu’est ce qu’on attend ? « A terme, on aimerait bien généraliser cette méthode à tous les stylos Pilot, mais la matière première suffisante n’est pas disponible. Seulement 50 % des bouteilles sont recyclées en France. Et encore, c’est une bonne moyenne par rapport à d’autres pays », justifie Mathias Ringeard. Chez le français Bic, qui s’est mis lui aussi au plastique de seconde main, on avance le même argument. Les stylos Ecolutions contiennent entre 50 % et 75 % de matériaux recyclés. Mais la gamme ne compte pour le moment que six produits.
Bic ne mise pas sur la stratégie de la recharge, qu’elle ne croit pas la meilleure. Tout d’abord, parce que le consommateur ne ravitaille pas les fameux produits rechargeables. Selon les chiffres de Bic, à peine une recharge serait vendue pour dix produits concernés. Question de sous : le client ne recharge que lorsque le produit est cher. En outre, « des mesures effectuées [par Bic] montrent que la distinction rechargeable/jetable ne permet pas de déterminer a priori la performance environnementale du produit », peut-on lire dans le rapport annuel du groupe. Autrement dit : le jetable peut être durable. « Comparez un Bic Cristal qui pèse 5,6 g et écrit 2 km à un produit de 15 g pour 1,5 km par exemple. Combien de fois faudra-t-il recharger le second pour obtenir la même performance ? », lance Christine Desbois comme un défi de calcul mental. Ramassage des copies le mois prochain. —
La réponse de Pilot : « Il faudrait, en plus, que tous les stylos soient fabriqués dans la même matière. Or, techniquement, c’est impossible. Le plus simple consiste donc à fabriquer des stylos rechargeables. »
Illustration : Simon Astié - Six monstres
Le développement durable chez Pilot
JPEG - 62.8 ko 238 x 330 pixels |