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Gauloises lance le mégot biodégradable : une idée fumeuse ?
vendredi, 22 novembre 2013
/ Karine Le Loët / Rédactrice en chef à « Terra eco ». |
Les mégots envahissent nos trottoirs et nos plages ? Pas de souci, Gauloises vient d’en inventer un biodégradable. Problème : pas sûr qu’il se dégrade sur le bitume ou dans le sable.
La cigarette, c’est mauvais pour la santé. On le sait depuis longtemps. Les mégots qu’elle laisse derrière elle, c’est mal aussi, on l’a appris après. Alors les cigarettiers planchent pour faire mieux, ou moins pire. Ce mois-ci Seita, la branche française d’Imperial Tobacco, lance « la première cigarette à filtre biodégradable ». En clair, un embout « entièrement composé de matières naturelles, tabac compressé et finement roulé », tandis que ses cousins sont traditionnellement formés d’acétate de cellulose, un type de plastique. Le nouveau filtre relève d’une technique « très simple et à la fois très complexe », souligne la société en charge de la communication pour Seita. Il a quand même fallu « trois ans de recherche et développement pour que ce filtre ne change pas le goût, qu’il soit compatible avec le reste de la cigarette », précise-t-on encore. En fin de course, le groupe a déposé un « brevet mondial ».
Biodégradable, le mégot de la nouvelle Gauloise ? Voyons voir. Le filtre obéit à la norme OECD 301-B, « la référence en matière de biodégradabilité », souligne la plaquette. Pas si sûr. En réalité, les normes en matière de biodégradabilité des matériaux ce sont plutôt les EN 14995 et 13432. Celles-ci sont utilisées pour certifier qu’un emballage ou un plastique se décompose « par compostage en milieu industriel ». Pour les matériaux enfouis dans le sol – de type paillage pour l’agriculture – c’est plutôt les contraintes de la NFU 52001 qu’il faudra suivre. Chacune de ces trois normes visent à contrôler que certaines substances sont absentes dans le produit (PCB, produits œstrogènes…), que le matériau se dégrade dans différents milieux (eau, sable, etc), qu’il n’est pas nocif pour la faune alentour. « Ce sont des normes utilisées dans le monde entier, sur lesquelles on est d’accord en Chine comme en Australie », explique Guy César, président de l’association de conseil Serpbio, spécialiste des matériaux biodégradables.
Mais surtout, selon Guy César, si le test est satisfaisant dans les conditions de laboratoire « que se passe-t-il si le mégot, au lieu d’être dans l’eau, se retrouve dans la terre, comme c’est souvent le cas, ou dans le sable ? Vous avez sûrement vu comme moi des plages pleines de mégots de cigarettes », souligne-t-il. Or, « les mégots laissés dans la nature peuvent très bien rencontrer de fortes difficultés à se dégrader s’ils n’entrent pas en contact avec des milieux aqueux suffisamment chargés en microflore ou s’ils sont dans des sols, des sables qui peuvent servir de milieu d’incubation. » Au service de communication du cigarettier, on explique que de nouveaux tests sont en cours pour tester la biodégradation dans des milieux divers. « Nous savons que les rejets de ce filtre ne sont pas annulés à 100% mais c’est quand même beaucoup mieux que l’acétate de cellulose », précise-t-on.
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