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Avec la Cravate solidaire, l’habit peut faire le job
jeudi, 24 octobre 2013 / Candice Moors

Pour permettre à des chômeurs de passer l’obstacle de l’entretien, une association leur offre relooking et conseils personnalisés.

Les vingt minutes de retard d’Aly lui valent un recadrage : « On calcule large pour le trajet, OK ? » Il faut dire que l’équipe ne dispose que d’une heure et demie pour faire du jeune homme un candidat crédible pour son entretien d’embauche du lendemain, un rendez-vous pour un poste dans la restauration. Gratuite, la séance de relooking est assurée par la Cravate solidaire et vise à aider ce jeune chômeur à marquer des points lors de ses entretiens. L’asso a vu le jour en janvier 2012, après un exercice dans une école de commerce, l’EDC Paris. Jacques-Henri Strubel, Nicolas Gradziel et Yann Lotodé y esquissent alors leur système pour réduire les inégalités vestimentaires.

Cravates de soie

Un nom, un logo, un slogan – « L’habit ne fait pas le moine, mais il y contribue » – et les premières collectes démarrent.Bientôt, ils croulent sous les costumes de grandes marques et les cravates de soie. « Pour éviter de devoir gérer le nettoyage et le repassage, on a très vite opté pour le don plutôt que le prêt ! On a aussi limité l’accompagnement aux seules personnes ayant décroché un entretien et rencontrant des difficultés financières, explique Nicolas Gradziel. En plus du relooking, on offre une véritable séance de coaching avec aide au CV et entretien blanc. » Le bouche à oreille fonctionne, la Mission locale de Paris leur envoie de très jeunes candidats, et le partenariat avec l’association d’insertion La Mie de pain équilibre la balance avec « une population plus précaire et plus âgée », souligne Jacques-Henri Strubel. Au total, une centaine de personnes ont déjà bénéficié des conseils de l’asso.

Poignée de main molle

A la rentrée suivante, le trio s’attache les services – bénévoles – d’une conseillère professionnelle en image, « Mademoiselle Oz », qui ne laisse pas un pli dépasser : « Dans le secteur des services, le moindre détail compte. Mais c’est aussi valable pour un poste de plombier. Il faut prouver qu’on représentera bien l’entreprise auprès des clients. Le costume rassure en entretien. » Enfin, au printemps 2013, une recruteuse indépendante rejoint l’asso. « Dans mon job, je reçois des dizaines de candidats pour un seul poste, avec une contrainte de temps très forte. Une poignée de main un peu molle, des tics de langage, des piercings et c’est terminé… Ici, il est encore temps de rectifier le tir », s’enthousiasme Marie-Laure Lecanu.

Aly, lui, sort de l’entretien ragaillardi par sa « maîtrise totale du nœud de cravate » et promet de donner des nouvelles. « Les résultats obtenus – deux CDD et deux PMP (périodes en milieu professionnel, ndlr) sur 16 jeunes coachés – sont extrêmement motivants. D’autant que ceux-ci n’ont aucun diplôme », explique Alain Guille, de la Mission locale de Paris, qui espère que « l’étape suivante sera de proposer un financement » aux cofondateurs de la Cravate solidaire. Ces derniers rêvent, eux, d’embaucher un jour cordonniers, couturières et blanchisseurs pour valoriser l’intégralité de leurs collectes. —

Impact du projet

Environ 100 candidats conseillés

- Le site de La cravate solidaire