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Notre-Dame-des-Landes : Bruxelles douche les antis
jeudi, 19 septembre 2013
/ Karine Le Loët / Rédactrice en chef à « Terra eco ». |
Ce mardi, la Commission européenne a décidé de ne pas ouvrir de procédure d’infraction à l’égard de la France sur le projet d’aéroport près de Nantes. Un camouflet pour les antis. Explications.
Dans la longue liste des recours qui entravent la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), une piste vient peut-être de s’effondrer. Ce mardi, la Commission européenne a déclaré qu’elle n’ouvrirait pas, pour l’instant, de procédure d’infraction à l’égard de la France sur ce dossier. Les antis gardent espoir, les pros se réjouissent. Qui a raison ? Terra eco décrypte ce nouvel épisode de la bataille de l’aéroport nantais.
Reste une troisième pétition, déposée en réaction aux deux premières. Celle-là est signée du nom de l’Acipran (aujourd’hui « Des Ailes pour le grand ouest ») et est largement favorable au projet. Dans son texte, l’association estime que « l’aéroport actuel est proche de la saturation (…), que le nouvel aéroport permettrait d’éviter le survol du lac de Grandlieu (classé en zone Natura 2000), qu’il réduirait considérablement le nombre de personnes exposées aux nuisances sonores et qu’il procurerait beaucoup d’autres avantages ».
Plutôt optimistes au départ
Pourtant, les opposants au projet d’aéroport croyaient fort au drapeau rouge européen. Le 19 février dernier, les pétitionnaires avait d’ailleurs été reçus par la direction générale de l’environnement de la Commission européenne. La députée européenne Sandrine Bélier (EELV) qui les accompagnait avait alors assuré au Monde que Bruxelles « partageait [notre] analyse d’une potentielle violation du droit communautaire ». Interrogée par Terra eco, elle confie encore : « Oui, je comptais dessus. Je pensais que la Commission prendrait une décision en totale objectivité sur l’état de conformité du projet vis-à-vis des directives européennes. Alors, oui je suis déçue. » Si la déclaration de la Commission a douché les espoirs des antis, elle a regonflé l’espérance des pros : « Le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes décolle enfin », a estimé l’eurodéputé français Philippe Boulland (UMP-PPE) à l’issue de l’audition. « C’est un projet de croissance intelligent, respectueux des règles européennes qui a par ailleurs reçu un avis favorable des commissions locales de l’eau concernées », a pour sa part souligné Alain Cadec, député européen (UMP) sur son blog.
La prudence de la Commission s’explique néanmoins : « C’était compliqué pour elle de faire autrement, précise Sandrine Bélier. La Commission n’est jamais très encline à embarquer les Etats membres devant la Cour de justice. Avant d’en arriver là, elle tente de résoudre les manquements. Mais je suis quand même déçue par la forme. Ils ont pris beaucoup de pincettes. »
Si, au bout du compte, il était avéré que l’Etat français viole bel et bien les directives européennes, la Commission entamera une procédure d’infraction qui pourrait mener Paris, à terme, devant la Cour de justice. « La France pourrait alors encourir des sanctions financières », explique-t-on à la Commission des pétitions.
Mais ce n’est pas demain la veille. Car les procédures prennent leur temps. C’est le cas d’un contentieux déposé en 2009 contre la France par la Commission au motif qu’elle ne respecte pas la directive européenne sur les impacts des projets stratégiques. Celle-ci exige qu’un projet d’envergure fasse l’objet d’un seul et même dossier pour assurer sa clarté. Or, dans le cas de Notre-Dame-des-Landes comme d’autres projets, l’enquête publique a « saucissonné » les études d’impact sur les activités connectées à l’aéroport (routes, tram-train, zones d’activité…), rendant le tout difficilement lisible, a reconnu Karl Falkenberg, lors de l’audition. Problème, « la procédure a été entamée en 2009, on est en 2013…, souligne quand même Françoise Verchère. Est-ce qu’elle aura le temps d’aboutir avant la fin de notre affaire (en clair avant que l’aéroport ne voit le jour, ndlr), ça je ne sais pas. » Avant d’ajouter : « Je suis persuadée que l’Etat français veut aller vite et mettre tout le monde devant le fait accompli. Qu’est-ce qu’on pourra faire quand tout sera déjà réalisé ? »
(1) Nommé par le ministère de l’Agriculture, ce comité d’experts scientifiques était chargé d’évaluer la compensation des zones humides – environ 98% de la surface du futur aéroport. Son rapport, publié le 9 avril 2013, remet largement en question la validité de la méthode utilisée (critères retenus, modes de calcul) et en ont pointé les risques d’échec.
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