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Dune du Pilat : un nouveau parking en plein site protégé
vendredi, 13 septembre 2013 / Juliette Cottin

Le million et demi de touristes qui déferle chaque année sur les pentes abruptes de la dune du Pilat ont désormais une vue plongeante sur un trou béant.

Quartier du Pyla-sur-Mer, à la Teste-de-Buch. En ce matin de janvier 2013, tout semble tranquille au pied de la dune. Les maisons de style basco-landais, typiques du quartier, s’abritent sous la pinède. Pourtant, sur une parcelle située au pied du versant nord de la dune, des engins s’agitent sur un chantier. « Le samedi, le gérant de l’hôtel me disait qu’aucun arbre n’allait être coupé dans l’aménagement de ce parking. Le mardi, il n’en restait aucun », raconte une riveraine, dont la maison est toute proche du terrain en question. Au total, une soixantaine d’arbres sont abattus en deux jours et les travaux de nivellement d’un parking débutent.

Un parking qui sera réservé aux clients de l’hôtel-restaurant La Co(o)rniche qui, en parallèle, construit 18 nouvelles chambres, dessinées par le célèbre Philippe Starck. Le Plan local d’urbanisme prévoit l’ajout d’une place de stationnement par nouvelle chambre. Jusque-là, rien d’anormal. Le hic ? « C’est que le parking se situe en zone rouge du Plan de prévention des risques (PPR) ; qu’il est en co-visibilité immédiate avec la dune et impacte fortement le paysage ; et que son déboisement élimine la végétation protégeant les zones limitrophes du risque d’avancée dunaire », dénonce Jacques Storelli, le président de l’Association de défense et de promotion de Pyla-sur-Mer (ADPPM). Or, en zone rouge, le PPR énonce un principe d’inconstructibilité qui exclut « la réalisation de tous travaux, constructions, installations, dépôts et activités de quelque nature qu’ils soient. » Même si des exceptions sont prévues, l’aménagement d’un parking privé n’en fait pas partie.

Incompréhensible

« Alors que Le Mont Saint Michel, la Pointe du Raz et même la dune éloignent leurs parkings, il est incompréhensible que l’Etat laisse faire cet aménagement », s’indigne le président de l’association de riverains, qui lutte depuis plus de quarante ans pour préserver l’environnement sur le site. Michel Daverat, président du Syndicat mixte de la dune du Pilat, l’organisme gestionnaire de la dune, est sidéré : « Cet été, dans le cadre du plan grand site et avec le soutien de la préfecture, le Conservatoire du littoral a pu faire démolir deux commerces qui dénaturaient le paysage au pied de la dune côté est. C’est totalement en contradiction avec l’aménagement d’un parking à quelques centaines de mètres ! » L’organisme dénonce également le manque de concertation : « Si nous avions été associés au projet avec l’ADPPM, nous n’en serions pas là aujourd’hui. » Les deux structures, déçues par la gestion du dossier par la commune, ont en effet décidé d’intenter un recours gracieux (soit la demande d’un réexamen du dossier par l’administration), avec l’intention d’aller jusqu’au recours contentieux (devant un juge administratif) si cela s’avérait nécessaire. L’ADPPM l’a déposé en août et le Syndicat mixte projette de le faire d’ici la fin du mois. Pendant ce temps, les travaux ont repris après la trêve estivale.

De leurs côtés, la mairie, qui a délivré le permis, et les services de la préfecture, qui exercent un contrôle de légalité sur ce permis, voient le problème d’un autre œil. Le sous-préfet d’Arcachon, Jean-Pierre Hamon affirme s’être plutôt concentré sur les modifications à apporter au permis de construire concernant les chambres d’hôtel, cherchant à éviter tout impact sur le paysage de la dune. « Ceci dit, ce parking ne me plaît pas plus qu’au maire et je le soutiens dans les actions engagées », précise-t-il. Ces actions visent à imposer au promoteur du chantier une revégétalisation du parking, qui ne sera de toute façon pas goudronné. « Les arbres n’auraient pas dû être coupés, convient Marc Muret, le directeur de cabinet du maire de la commune. Mais ce parking fait partie du projet d’extension de l’hôtel, un atout économique pour la commune. Tant qu’il reste un aménagement léger, je ne vois pas le problème. D’autant que la zone est déjà urbanisée. ».

En tout cas, si les recours déposés n’aboutissent pas, le temps que la végétation ne reprenne ses droits, les milliers de visiteurs de la dune auront vue sur ce parking. Sans compter les désagréments pour les habitants du quartier qui ne peuvent que déplorer la perte de leur tranquillité. « Quand nous sommes arrivés il y a quinze ans, nous avions l’impression d’arriver au bout du monde, raconte une riveraine. En très haute saison, depuis la rénovation de l’hôtel il y a trois ans, le restaurant sert plus de 1000 couverts par jour et entre 600 et 1000 voitures convergent ici. C’est devenu l’enfer. »

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