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A vélo, dans un parc ou à la campagne : guide de survie au pic d’ozone
mardi, 23 juillet 2013 / Amélie Mougey

Polluant et irritant, comme chaque été, l’ozone fait son retour en France. Aucun coin ensoleillé ne saurait lui échapper, mais pour s’en protéger, on peut ruser. Voici quelques conseils.

L’été, saison de toutes les envolées. Le thermomètre grimpe, Bison futé voit rouge et la pollution suit la tendance. Depuis quelques semaines, le taux d’ozone en Ile-de-France dépasse régulièrement le premier seuil d’alerte. En plein après-midi, lorsque le pic de pollution atteint son sommet, un mètre cube d’air francilien contient 215 microgrammes d’ozone, selon Airparif, l’association régionale de surveillance de la qualité de l’air. C’est plus du double du taux limite préconisé par l’Union européenne (120 µg/m3). Et le phénomène est national.

La molécule a déjà été déclarée responsable d’une « qualité de l’air médiocre » en Charente. Plus au sud, Lyon (Rhône) et Toulouse (Haute-Garonne) suffoquent depuis la semaine dernière. Quels sont les risques ? En ville ou à la plage, peut-on échapper aux dangers de cette pollution ? « Terra eco » fait le point.

« L’ozone est la pollution des beaux jours », rappelle Karine Léger, ingénieure à Airparif. « Il ne sort pas directement de nos pots d’échappements mais provient d’une réaction chimique qui se déclenche avec chaleur et UV. » Les automobilistes ne sont pas disculpés pour autant : l’ozone naît, sous le soleil donc, de la rencontre des gaz d’échappement (dioxyde d’azote, dioxyde de souffre, benzène...) avec des hydrocarbures (vapeurs d’essence non brûlée, colles, solvants et autres émanations d’ateliers de peintures industriels).

Tandis que les particules fines se glissent dans nos poumons sans qu’on s’en aperçoive, l’ozone annonce sa présence par un grattement au fond de la gorge. Mais la molécule provoque plus que des désagréments. Sur la dernière période étudiée (2004-2006), l’Institut national de veille sanitaire (InVS) dénombre, dans neuf villes de France, 65 morts prématurées directement liées à l’ozone. Œdème pulmonaire, asthme, insuffisance respiratoire…, « l’ozone touche surtout des personnes déjà fragiles, précise Agnès Lefranc, directrice du département santé-environnement de l’InVS, mais il y a de fortes présomptions qu’une exposition chronique joue aussi un rôle dans l’apparition même de ces pathologies. » Pire, l’ozone s’ajoute aux autres polluants sortant directement de nos pots d’échappement. « Les effets négatifs se cumulent, et il se pourrait même qu’ils s’exacerbent mutuellement, souligne la directrice, l’existence de ce potentiel "effet cocktail" est actuellement à l’étude. »

On ne peut pas être allergique à l’ozone lui-même, pas plus qu’aux particules fines ou qu’au dioxyde d’azote. Mais tous ces polluants « catalysent les réactions allergiques » selon Bernard Jomier, médecin généraliste à l’initiative de l’appel des médecins de Paris sur la qualité de l’air. En clair, ces substances accentuent les symptômes, voire les provoquent. Ainsi, quand les taux d’ozone augmentent, les chatouilleux du pollen peuvent avoir le rhume des foins presque sans foin.

Plus on respire, plus on ingère de pollution. Puisque le cycliste fait plus d’efforts que le piéton, il est donc plus exposé. Paradoxalement, il reste plus épargné que l’automobiliste, qui pourtant ne s’essouffle pas à pédaler. A condition de rester sur la piste cyclable. « Quand un cycliste sort du flux de circulation pour rouler quelques mètres à côté, le taux d’exposition est divisé par deux ou trois », affirme Karine Léger qui conseille également aux deux-roues de privilégier les ruelles aux grands axes. L’automobiliste, lui, ne peut pas faire de pas de côté. « Or, la voiture ne protège pas du tout de la pollution, renchérit Agnès Lefranc, au contraire, selon la disposition des aérations, l’air dans l’habitacle peut être plus pollué qu’à l’extérieur. » C’est donc le piéton qui est le moins mal loti.

Contre l’ozone, le masque blanc qui commence à faire son apparition sur le visage des cyclistes ne sert à rien. « Comme leur nom l’indique, seuls les masques à gaz filtrent les gaz », explique Karine Léger. Quant aux particules, les plus fines, qui sont également les plus dangereuses, traversent sans problème le tissu. « Et les plus grosses seraient de toute manière arrêtées par le nez », poursuit l’ingénieure d’Airparif.

L’ozone est partout, même dans les espaces verts. « En fait, c’est au bord du périphérique qu’il est le moins présent », s’amuse Karine Léger. « Au contact des gaz d’échappement, une nouvelle réaction se produit et l’ozone est consommé. » Mais oubliez la promenade de santé sur la bande d’arrêt d’urgence, le nouveau composé chimique obtenu, le dioxyde d’azote, est tout aussi nocif. Les espaces verts restent donc un moindre mal. Car s’ils ne sont pas préservés de l’ozone, « ils ont au moins le mérite d’écarter le promeneur des polluants de proximité », conclut Karine Léger.

Le matin à la fraîche, avant que la chaleur et les UV ne fassent grimper les niveaux de pollution. A titre d’exemple, lundi, la concentration d’ozone est passée de 90 microgrammes par mètre cube d’air au lever du jour à plus de 200 microgrammes dans l’après-midi. Le moment le plus dangereux se situe entre 15 et 16 heures. Mais Karine Léger, d’Airparif, conseille d’attendre au moins 20 heures pour faire de l’exercice. « En fin d’après-midi, la reprise du trafic booste la production d’ozone et les taux repartent à la hausse », constate-t-elle. Et même au milieu de la nuit, l’air n’est jamais complétement purifié. Alors, pour les personnes sensibles, toute activité sportive est déconseillée quelle que soit l’heure de la journée.

Oui. Rester à l’intérieur est un des meilleurs moyens de limiter l’exposition. Afin que l’air d’une habitation soit le moins pollué possible, la solution la plus efficace consiste à aérer dans la matinée quand les taux d’ozone sont les plus bas, et ensuite garder ses fenêtres fermées l’après-midi. Oui oui, même par 36 degrés.

Même pas. L’ozone, présent dans les basses couches de l’atmosphère, se déplace vite. « La majorité de l’ozone contenu dans l’air est importé par des courants qui nous viennent d’Europe du Nord ou de l’Est », souligne Karine Léger. « L’ozone produit sur place, lié à l’industrie et au trafic routier, ne fait qu’accentuer le phénomène. » Ainsi, on pourra trouver de l’air qui contient des taux d’ozone supérieur au seuil préconisé par l’Union européenne au beau milieu des Cévennes. Les zones touristiques sont elles aussi fortement touchées. Dans le midi de la France ou dans le sud-ouest, la circulation importante et les fortes chaleurs garantissent aux estivants des taux d’ozone proches de ceux de Lyon ou de Paris. En Ile-de-France, ce sont d’ailleurs les zones rurales qui sont les plus touchées. « Inutile donc se réfugier dans la forêt de Fontainebleau pour fuir la pollution », soupire Bernard Jomier. Entre les arbres, on échappera certes aux particules fines mais l’ozone lui ne se laissera pas distancer.