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Le leasing : astuce commerciale ou trouvaille écolo ?
mercredi, 5 juin 2013
/ Amélie Mougey
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Après l’automobile, la location avec option d’achat s’attaque aux objets du quotidien. Présentée comme une méthode de consommation raisonnée, cette formule sert aussi de pousse-à-l’achat.
Quel est le point commun entre une Rolex, une boîte de Lego et une machine à café ? Surtout pas le prix, encore moins l’usage, mais un nouveau concept : ces produits se louent... puis s’achètent. Déjà très répandu chez les concessionnaires automobiles, le leasing, forme de location avec option d’achat, part à la conquête de la grande consommation et même du luxe.
L’idée, la jeune femme l’a trouvée dans la chambre de sa fille, face aux coffres à jouets bondés de puzzles boudés. « En location, les mêmes jouets passent dans les mains d’une dizaine d’enfants », se félicite-t-elle « un moyen efficace d’éviter le gaspillage ». Dans ce cas pourquoi l’option d’achat ? « Pour éviter le drame si un enfant s’attache et pour nous permettre de renouveler les stocks, mais ce n’est pas un but en soi. »
« Ce que nous vendons c’est un usage plus qu’un produit », renchérit Jean-Pierre Blanc, le directeur général des cafés Malongo. Pour faire passer l’idée, l’entreprise préfère parler « d’abonnement service » que de leasing. « Notre objectif c’est de rompre avec un système de surconsommation » poursuit le directeur. L’entreprise assure que si un client arrête son abonnement, sa cafetière, entièrement recyclable, retourne dans le circuit de production et que ses pièces en bon état sont utilisées pour composer de nouvelles machines. « On est à l’opposé des stratégies d’obsolescence programmée » , se félicite M.Blanc.
De la même manière, pour 47 euros par mois, chacun peut arborer une montre de grande marque, et s’offrir le caprice d’en changer au bout de deux ans. Pour Grégoire Bardon, fondateur de la start-up leaseawatch, qui propose cette formule, « le leasing ne s’adresse pas qu’aux petits budgets, il permet aussi à la clientèle habituelle de changer plus souvent et de monter en gamme », se réjouit-il. Depuis sa création il y a un an, son entreprise ne cesse de gagner des clients. Les loueurs-vendeurs de sacs à main, de machine à café et de jouets connaissent le même succès. Pour Olivier Fourcadet, cela n’a rien de surprenant : « Le leasing répond à l’envie du tout, tout de suite et sans compter, qui caractérise encore notre manière de consommer » , analyse l’économiste.
De fait, pour les sacs à main de Revolushion, la formule s’apparente plus à une méthode de vente qu’à de la location. À l’issue des quatre mois, près de 100% des « prêts », se soldent par un achat. « Un sac à main de marque est un bel objet, une fois que les clientes l’ont adopté, elles ne veulent plus s’en séparer », s’enthousiasme Amandine Scotti.
Pourtant, tout comme les paiements différés, les coups de cœur l’esprit léger ont un prix. Entre un sac à main payé comptant et le même acheté en leasing, l’écart peut atteindre 15 %, soit 400 euros pour le modèle Yves-Saint-Laurent.« C’est normal puisqu’on avance la trésorerie », assume Amandine Scotti. Le surcoût est le même chez leaseawatch. Les jouets en location sont vendus, eux, 30 % moins cher que leur prix neuf. Mais il faut s’affranchir auparavant du prix de l’abonnement au service. Pour les cafetières Malongo, l’écart n’est que de 6 euros. Mais dans le cas d’une interruption de la location avant la fin des deux ans, le client paiera entre 30 et 50 euros.
Pour Grégoire Baron la question n’est pas là : « Adopter le leasing, c’est avant tout profiter d’un objet sans le posséder ». Sauf que le principe existe déjà et sans option d’achat. Incarné par Michelin qui facture les kilomètres parcourus plutôt que les pneus, ou par l’entreprise Xeros, qui loue, répare et recycle des photocopieuses, ce principe est baptisé « économie de la fonctionnalité ». Et à la différence du leasing dont elle est la cousine, cette formule ne peut être soupçonnée d’inciter à surconsommer.