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Poissy chasse ses tracteurs pour le PSG
jeudi, 16 mai 2013 / Alexandra Bogaert

Le PSG se cherche un nouveau centre d’entrainement. Cinq communes des Yvelines sont en concurrence, dont Poissy, qui propose des terres agricoles fertiles pour accueillir les terrains de foot. Au grand dam des agriculteurs.

Ibrahimovic, Ménez et leurs coéquipiers vont bientôt lever le camp. Délogés, les tout nouveaux champions de France ! Dès que Qatar Sport Investment, le groupe propriétaire du PSG, aura trouvé un nouveau terrain pour installer son équipe parisienne, les footballeurs diront bye bye au Camp des Loges. Le vieux centre d’entrainement de Saint-Germain-en-Laye est jugé peu fonctionnel, et pas assez luxueux au regard des standards qataris.

Problème : où s’installer à proximité du Parc des Princes, dans une région où le foncier est rare (et cher, mais là n’est pas vraiment le souci des propriétaires du club) ?

L’embarras du choix

A l’origine, trois communes des Yvelines s’étaient lancées dans la compétition, appuyées par les politiques locaux, flairant la manne financière : Montesson, Louveciennes et Montigny-le-Bretonneux, qui toutes disposent de terrains disponibles. Le Schéma directeur de la région Île-de-France (Sdrif), document d’aménagement et d’urbanisme qui dicte le droit des sols, les avait reconnues comme aptes à accueillir les footeux. Les Qataris n’avaient plus qu’à jeter leur dévolu sur l’une d’elles.

Mais cette liste est venue s’étoffer en octobre dernier, quand « le Sdrif a mis non plus trois mais cinq points, figurés très ironiquement par des marguerites, sur la carte des lieux franciliens pouvant accueillir les footballeurs du PSG. L’une de ces marguerites était située à Saint-Germain-en-Laye, l’autre sur des terres agricoles de la commune de Poissy », se remémore – encore agacé - Christophe Hillairet. Président de la Chambre d’agriculture d’Ile-de-France, il est furieux contre le conseil régional francilien qui a, pour permettre à Poissy d’avoir ses chances de l’emporter, fait déclassifier par un vote, en octobre dernier, 80 hectares d’excellentes terres agricoles du plateau des Alluets, afin de les transformer en « zone de loisir ». Depuis, cette petite partie de l’ancien domaine de chasse des rois de France figure dans le Sdrif comme étant un terrain constructible. Et Poissy apparaît désormais comme le favori dans la course au PSG.

Des terres qui vaudront bientôt de l’or

C’est le propriétaire de la ferme du Poult, où sont les hectares convoités, qui doit se frotter les mains. Il s’appelle Nicolas Desjouis et n’est pas agriculteur, mais promoteur immobilier. « Quand les terres passent d’agricoles à constructibles, leur valeur grimpe de 1 à 100 », maugrée Damien Bignon, agriculteur bio, membre de la Confédération paysanne et voisin de la ferme du Poult. Il explique que ce projet – non confirmé à ce jour par le PSG – d’installer du gazon sur les champs de lin « fait l’unanimité du monde agricole contre lui ».

Du côté de la chambre d’agriculture, Christophe Hillairet rappelle que « l’Ile-de-France est passée récemment sous la barre des 50% de terres agricoles. Les gens veulent manger du local, mais on détruit l’espace agricole, on n’a plus de laiterie francilienne et le premier abattoir est à 400 km. Cécile Duflot, pourtant ministre écologiste (du Logement, ndlr), nous dit qu’elle veut préserver les terres agricoles. Mais elle dit que sa priorité est la construction de 70 000 logements par an. Et comme densifier coûte sept fois plus cher que construire sur un nouveau terrain, l’espace agricole continue à être grignoté ! » Il se dit prêt « à mener le combat, à occuper le terrain comme à Notre-Dame-des-Landes ».

La guerre des fourches aura bien lieu

Fourches contre crampons, qui va gagner ? Nul ne le sait. Les habitants et associations franciliens avaient jusqu’au 15 mai pour déposer leurs avis et commentaires sur le Sdrif, dans le cadre d’une enquête publique. La Confédération paysanne, qui veut croire que tout n’est pas encore perdu, l’a notamment fait.

La destinée des terres fertiles de Poissy est désormais entre les mains d’un commissaire enquêteur, qui va rendre son rapport sur le projet de Sdrif. S’il ne retient pas la demande des opposants de rétablir ces hectares en zone agricole, il ne restera plus qu’à la ville de Poissy à modifier son plan local d’urbanisme pour que les terres soient définitivement déclassées. « Ce qui peut aller très vite », prévient Damien Bignon.

Compenser les terres perdues en montant une Amap

Et ce d’autant plus que le maire socialiste de Poissy, Frédérik Bernard, estimait mardi 14 mai au micro de la chaine télé locale Yvelines Première qu’ « une ville ne peut pas laisser passer la possibilité d’avoir le PSG qui vient avec beaucoup d’argent et des projets qui pourraient enrichir la ville ». Mais, afin de calmer les esprits, il s’engage à compenser la perte de ces terres agricoles par la mise à disposition, par la municipalité, d’autres terrains, dans d’autres secteurs de la commune, sur lesquels une Amap pourrait s’installer, dit-il. « Cette proposition, c’est vraiment du greenwashing ! », déplore Damien Bignon qui redoute déjà de voir les supporters du PSG envahir le chemin de grande randonnée qui jouxte ses terres.

Et si les Qataris boudaient finalement Poissy pour une autre commune ? L’inscription de la ferme du Poult comme zone de loisirs et non plus comme terre agricole permettrait l’installation d’autres entrepreneurs, estime Damien Bignon. Quant à Christophe Hillairet, il est pour le coup un peu plus optimiste. Il dit avoir recueilli « l’engagement politique de David Douillet, conseiller régional et connaissance de M. Desjouis, et de Jean-Paul Huchon, président de la région Ile-de-France : l’un et l’autre retireront la marguerite si les Qataris choisissent au final un autre endroit que Poissy pour y installer leur centre d’entrainement ».

Contacté, le PSG n’a pas répondu dans les temps impartis