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Eric Thybaud, écotoxicologue
dimanche, 24 mars 2013 / La rédaction de Terra eco

Ce responsable du pôle "dangers et impacts sur le vivant" de l’Ineris scrute les rejets des usines à la loupe.

Qu’est-ce que l’écotoxicologie ?

Cette discipline s’intéresse à l’impact de stresseurs, chimiques ou physiques, sur la structure et le fonctionnement des écosystèmes. On se penche depuis longtemps sur l’impact des substances chimiques sur la santé, mais depuis beaucoup moins de temps sur celui qu’elles ont ou auront sur la nature.

Il y aurait aujourd’hui 100 000 substances chimiques sur le marché, allant des colorants aux additifs, en passant par les intermédiaires de synthèse. Mais les scientifiques estiment n’avoir des connaissances de base que pour 10 % de ces substances.

Quel est votre rôle au sein de l’Ineris ?

Je supervise une équipe de 70 personnes.

En amont des réglementations, nous avons un rôle dans la recherche fondamentale. Des chercheurs travaillent sur le mécanisme des substances. Comment se propagent-elles dans les écosystèmes ? Comment se fait la synthèse hormonale ? Comment les polluants interagissent-ils entre eux ?

En aval, nous avons un rôle de gestionnaire. Nous établissons des outils de mesure de ces substances et nous participons à la mise en place des réglementations au plan national, européen ou international.

Quelles sont les perspectives d’avenir pour cette discipline ?

L’écotoxicologie a longtemps été considérée comme une sous-discipline de la toxicologie. Lorsque j’étais en colère, j’avais l’habitude de répondre à ceux qui me reprochaient de ne pas m’intéresser aux hommes que je m’intéressais seulement aux millions d’espèces qui vivaient à côté de lui !

Il y a vingt ans, tant que l’on ne retrouvait pas des centaines de poissons le ventre en l’air, on considérait qu’il n’y avait pas de problème avec les rejets d’une usine. On ne se focalisait que sur la toxicité aiguë. Cette époque est révolue.

Aujourd’hui, les questions de toxicité chronique, sur le long terme, montent en puissance. Avec la mise en place de règlements, comme celui nommé "Reach" et mis en place au sein de l’Union européenne, certaines industries vont sans doute avoir recours à des écotoxicologues.

S’investir dans cette discipline signifie s’impliquer dans des processus qui ont un impact rapide. Le passage de la recherche fondamentale à l’application va vite.

Par exemple, sur les perturbateurs endocriniens, il s’est écoulé à peine une quinzaine d’années entre les premières discussions entre scientifiques et les premiers tests réglementaires.