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Joël Moulin, pédologue
dimanche, 24 mars 2013 / La rédaction de Terra eco

Son truc à lui, c’est la terre. Ce pédologue a passé plus de vingt ans à "casser des cailloux" afin de cartographier les terres de son département.

"Je suis tombé dedans quand j’étais tout petit" a l’habitude de dire Joël Moulin. On imagine une marmite de potion magique. C’est de la terre qu’il s’agit. Ou plutôt des terres et de leur infinie variété.

Car Joël Moulin est pédologue : un spécialiste du sol, cette fine couche meuble sans laquelle rien n’est possible pour l’homme – ni cultures, ni aménagements.

Discipline rare et méconnue, la pédologie est paradoxalement au coeur des préoccupations du moment : "Nous sommes peu nombreux. Pourtant, les besoins en connaissance du sol sont de plus en plus importants, pour l’agriculture et pour l’environnement."

Connaître les terres pour comparer et échanger

Un diagnostic pour appliquer une directive sur les zones humides ? Un plan d’épandage dans une commune rurale ? C’est le sol qui doit donner son verdict, dire quelles sont ses caractéristiques, ce qu’il peut recevoir ou non. "Une goutte d’eau tombe du ciel et transite par le sol avant d’atteindre l’aquifère. Le sol est un filtre, une épaisseur très mince qui pompe tout !"

La chance de Joël Moulin fut de tomber, à l’orée des années 1980, sur une équipe de l’Institut national de recherche agronomique (Inra) d’Orléans qui se jetait dans un projet titanesque : inventorier l’intégralité des sols des régions Centre et Poitou-Charentes.

"A cette époque, l’esprit était à l’intensification agricole, l’objectif était de drainer les terres humides et de remembrer, se rappelle-t-il. Or, pour que les agriculteurs échangent des parcelles, il fallait pouvoir les comparer entre elles, connaître la qualité de leurs terres."

"Vingt ans de recherche, plus de 1 500 profils de sols plus tard, une carte existe."

Un BTS d’agronomie en poche, il rejoint l’équipe pour le compte de la chambre d’agriculture de l’Indre et se forme à la pédologie, sur le terrain, en autodidacte. Pendant plus de vingt ans, Joël Moulin et ses collègues ont cassé des cailloux, récolté des plantes, pris des échantillons de terre, relevé la toponymie qui transmet tant d’informations précieuses...

Plusieurs dizaines de milliers de sondages et plus de 1 500 profils de sols plus tard, une carte existe. "La technologie a évolué, nous avons créé une base de données numérique, précise Joël Moulin. Elle sert à tout le monde."

Aux agriculteurs désireux d’introduire de nouveaux types de culture, aux pouvoirs publics qui tentent de circonscrire un nouveau périmètre de captage d’eau potable, au parc régional de la Brenne qui veut identifier les zones de ponte d’un petit batracien… Les pionniers ont fait des émules.