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Un pied de nez à la pollution
jeudi, 10 mars 2005 / Caroline Montaigne , / X

Pour combattre sa mauvaise réputation en matière d’odeurs, l’agglomération lyonnaise met en place un "réseau de nez". Un dispositif presque rudimentaire, mais qui a déjà fait ses preuves.

Ils sont 260, tous bénévoles, répartis sur une cinquantaine de communes de l’agglomération lyonnaise. Leur mission : humer l’air et retranscrire quotidiennement leurs impressions. "Nous voulions un maillage géographique homogène mais finalement c’est surtout au sud de Lyon que nous avons le plus de volontaires", explique Gérard Berne, responsable du SPIRAL, l’association qui gère le dispositif. Hasard ou coïncidence ? C’est dans cette zone que se concentrent les industries de chimie et de pétrochimie. Ce projet était dans les cartons depuis un moment quand, en mai 2002, l’air lyonnais se mit à empester sans qu’on puisse en déterminer la cause. La préfecture du Rhône décidé alors de lancer les opérations.

Fragrance de chou et œuf pourri

Ne devient pas "veilleur d’odeurs" qui veut. Les bénévoles ont dû passer des tests pour mesurer leur degré de sensibilité olfactive. "Il fallait que tout le monde soit à peu près au même niveau pour recueillir des observations fiables", poursuit Gérard Berne. Puis, les "nez retenus" ont suivi une formation en "mauvaises odeurs", en fait une séance de reniflement de flacons aux parfums subtils : la "fragrance de chou", qui s’apparente à celle de composés de produits pétroliers ; des odeurs d’égout et de pot d’échappement ; de l’œuf pourri, un grand classique des rejets de l’industrie chimique.

Le nez en l’air

Le nez en l’air, les bénévoles ont pour rôle de signaler toute odeur suspecte, même agréable. "Si on sent fortement la rose alors qu’il n’y a pas de culture de fleurs sur 10 kilomètres à la ronde, c’est qu’il y a un problème", explique Bernard, un surveillant-volontaire de la partie sud de Vénissieux. Les observations sont recueillies une fois par semaine et centralisées dans une base de données. L’objectif est double. D’abord, établir une cartographie des odeurs, pour identifier les villes les plus touchées. Ensuite, remonter aux sources. Sont-elles liées à l’activité urbaine ? Proviennent-elles d’une usine ? Pour le savoir, il faut croiser les données météo : le degré d’ensoleillement, le sens du vent...

Industriels réticents

Les industriels l’ont bien compris, ils sont les premiers visés. D’où, au début, leurs réticences à prendre part au SPIRAL. Cette structure aujourd’hui collégiale est financée par l’Etat, la Communauté urbaine de Lyon et quelques industriels du cru. "C’est vrai que les industriels n’étaient pas très demandeurs, reconnaît Gérard Berne. Mais ils ont fini par admettre qu’ils avaient besoin de savoir si leurs usines présentaient des dysfonctionnements". Il suffit parfois d’un rien. Une expérience similaire est menée depuis trois ans dans les Bouches-du-Rhône. 250 bénévoles y réalisent plusieurs observations par jour. Début mars, plusieurs d’entre eux ont relevé une anomalie à Rognac, une commune située à proximité de l’Etang de Berre. Très vite, la source fut identifiée : un simple transporteur qui nettoyait une citerne. "Il a suffi de déplacer l’un de ses bassins pour que la gêne diminue. Ca ne lui a presque rien coûté", explique Boualem Mesbah, ingénieur à Airfobep, le réseau de surveillance de l’air des Bouches-du-Rhône.

La floraison des nez

Signe que ces initiatives font des émules, l’agglomération de Dunkerque doit, elle aussi, se doter d’un "réseau de sentinelles", avant l’été. Une première expérience avait été menée il y a 10 ans mais elle avait été trop succincte pour déterminer d’où provenaient les odeurs gênantes. Cette fois-ci, un inventaire a été dressé de tous les produits rejetés par les usines. Les industriels sont prévenus.

Le réseau de nez du SPIRAL

Le réseau de surveillance de l’air des Bouches-du-Rhône


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