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Faut-il déneiger les pistes cyclables ?
vendredi, 15 mars 2013 / Thibaut Schepman /

Non, nous n’avons pas à « sauver la planète ». Elle s’en sort très bien toute seule. C’est nous qui avons besoin d’elle pour nous en sortir.

Les pistes cyclables sont souvent la dernière roue de la déneigeuse. Terra eco pose les questions qui fâchent le peloton.

Pour le vélotafeur ou le cycliste urbain occasionnel, la chute de neige est une double punition. Le voilà déjà obligé de sortir ses mitaines, sa cape de pluie, et de croiser les doigts pour ne pas rentrer chez lui des flocons dans les yeux. Mais, bien souvent, il voit en prime ses voies habituelles devenir de vraies pistes de skis... et le rester.

Dans de très nombreuses villes, les pistes cyclables (on parle ici des voies séparées du reste de la route) ne sont pas déneigées. Pour les bandes cyclables (on parle ici des voies incluses dans la chaussée, avec un simple marquage au sol), c’est pire : elles reçoivent la neige et la boue charriées par les déneigeuses et les voitures. Résultat : le cycliste ne peut emprunter son itinéraire habituel, à moins d’avoir des pneus cloutés. Il peut alors choisir de suivre la file des voitures - mais c’est plus risqué et plus long - ou prendre la voiture ou le métro. Dans tous les cas, il a le désagréable sentiment que seuls les nababs motorisés ont le droit au déneigement, et que les vélos comme les piétons sont les grands oubliés.

Pas facile de déneiger sans voiture ?

La tête dans le guidon, une question obsède notre cycliste : « Mais pourquoi diable toute la chaussée n’est-elle pas déneigée » ? A la mairie de Paris, la réponse est catégorique. Si le service de presse ne souhaite pas répondre oralement à nos questions, il nous envoie la réponse suivante par mail : « Répandre du sel sur la chaussée ne suffit pas à faire fondre la neige, c’est le roulage des voitures qui facilite l’action du sel. En roulant les véhicules écrasent le flocon, ce qui permet alors au sel d’accélérer la fonte. On remarque d’ailleurs que lorsque l’on a salé une voie, les traces empruntées par les voitures sont noires alors qu’au milieu et sur les côtés la chaussée reste blanche alors que la voie a été salée sur la largeur totale. C’est la raison pour laquelle, le salage des pistes cyclables pendant l’évènement neigeux serait inutile car les pistes sont alors empruntées par trop peu de vélos qui, à la différence des voitures, ne roulent pas forcement dans les mêmes traces ce qui ne permet pas de faire fondre la neige. »

En gros, déneiger les pistes serait impossible. L’argument est étonnant, puisque d’autres villes ne se privent pas de le faire. C’est le cas notamment de Berlin, comme nous l’apprenait notre confrère Olivier Razemon sur son blog. En France aussi, on déneige les pistes. C’est le cas, au moins partiellement, à Grenoble, toujours selon le blog d’Olivier Razemon. Mais, comme souvent, c’est Strasbourg qui grimpe sur le podium de la ville où il fait le meilleur rouler à vélo. Serge Ascensio, chargé de mission vélo à la communauté urbaine de Strasbourg (CUS), explique : « On a eu des problèmes de déneigement lors d’un gros hiver, il y a deux ans. Depuis, on a décidé de tout remettre à plat, notamment en s’équipant pour déneiger les pistes et en les intégrant dans nos voies à déneiger en priorité. »

Les pistes sont prioritaires à Strasbourg

Romuald Sutter, chef du service Propreté à la CUS, précise : « Nous avons défini une centaine de kilomètres de voies cyclables (sur 560 kilomètres de voies cyclables en tout, ndlr) qui sont classées priorité 2 pour le déneigement, c’est-à-dire juste derrière les axes à déneiger 24h/24 comme les grands axes structurants ou les hôpitaux. Et nous communiquons auprès des usagers pendant les épisodes de neige. » Et comment font-il pour déneiger ? L’agglomération utilise en fait les mêmes machines que pour nettoyer les pistes pendant le reste de l’année : de petites laveuses d’environ 1m de large. Il suffit d’y ajouter des lames pour racler la neige et de remplacer le réservoir d’eau par un réservoir de sel et le tour est joué.

Faut-il pour autant écrire à votre maire pour qu’il se presse d’imiter Strasbourg ? Pas sûr. N’oublions pas tout d’abord que le sel de déneigement a un impact non négligeable sur l’environnement, et qu’aucune alternative crédible n’a été trouvé pour le remplacer. Par ailleurs, certaines pistes sont si étroites qu’elles ne peuvent être déneigées. « Strasbourg est une ville très plate, qui compte beaucoup de pistes larges en sites propres. Il neige régulièrement donc nous avons intérêt à nous équiper, je pense que pour une ville comme Marseille ce n’est pas forcement le cas. Nous ne sommes pas en avance, nous avons eu des facilités pour nous organiser par rapport à d’autres agglomérations », ajoute, modeste, Romuald Sutter. Dans certaines villes et sur certaines pistes, la neige rime donc forcément avec vélo au garage. Reste à savoir si votre ville pourrait/devrait en faire plus contre la neige sur les pistes. Dites-le nous dans les commentaires ci-dessous.