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Des récompenses pour les vaches qui pètent moins
lundi, 18 février 2013
/ Amélie Mougey
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Pour réduire les flatulences bovines, l’association Bleu-Blanc-Cœur récompense les éleveurs qui améliorent l’alimentation de leurs troupeaux. Reste aux laiteries et consommateurs à lui emboîter le pas.
En France, les pets et rots de vaches représentent 5% des émissions de gaz à effet de serre. Sur la liste noire des coupables du réchauffement climatique, l’élevage, responsable de 18% des émissions mondiales, dépasse même les transports. De solides arguments pour les végétariens. Pourtant, même sans réduire la taille des troupeaux, ces quantités de gaz pourraient diminuer. Car, si les vaches sont ballonnées, c’est qu’elles manquent d’oméga 3. A l’origine de cette carence : le très classique cocktail maïs-colza-soja qui compose trop souvent leur alimentation. Un menu auquel il suffirait d’ajouter de la luzerne, du lupin ou du lin pour voir les émissions de méthane diminuer de 15% à 30%. Mais à 700 euros la tonne de lin, l’argument écologique ne suffit pas à convaincre les éleveurs. Alors, des associations telles que Bleu-Blanc-Cœur inventent d’autres incitations.
Désormais, un agriculteur qui nourrit son troupeau avec du lin ou des protéagineux, ces aliments riches en protéines et oméga 3, recevra 100 euros par tonne d’équivalent CO2 épargnée à l’atmosphère. Le dispositif, créé par la société d’alimentation bovine Valorex et soutenu par l’Etat, repose sur une découverte des chercheurs de l’Inra (Institut national de recherche agronomique). Ceux-ci ont établi un lien entre la composition du lait et les flatulences d’une vache. Finies donc les expérimentations avec hublots sur l’estomac, aujourd’hui de simples analyses laitières suffisent à mesurer les gaz rejetés.
En France, 500 éleveurs n’ont pas attendu « la monnaie CO2 » pour changer de régime. Souvent, c’est la santé des animaux qui a dicté leur choix. Dans le Morbihan, Jacques Le Clerc nourrit ses bêtes au lin depuis plus de dix ans. A l’époque, l’effet de serre n’avait rien à voir dans tout ça. « J’ai voulu faire comme mon grand-père, se souvient le producteur de viande, donner du lin pour avoir un meilleur troupeau. » Dans l’auge de ses bêtes, il ajoute alors 1/6 de la portion classique en luzerne ou en lin. Résultat : ses animaux grossissent plus vite et le vétérinaire vient moins souvent. « L’argent qu’on perd sur la nourriture, on le gagne sur la santé », souligne l’éleveur satisfait. Pour les producteurs laitiers aussi, le changement a du bon. Selon la revue Réussir agricole et rural, quand les vaches reçoivent des rations de lin, leur production de lait augmente de 4% à 6%. En bout de chaîne, les éleveurs rentrent dans leur frais.
Mais, pour ces produits haut-de-gamme, la demande reste marginale. Et les éleveurs ne négocient pas sur le prix. « On ne peut pas payer de la nourriture riche en omégas 3 aux vaches et continuer à vendre la viande ou le lait au même prix », soupire Jacques Le Clerc, « ce serait comme faire du bio sans contrepartie ». Alors, entre le prix d’un côté, l’environnement et la qualité de l’autre, c’est à l’acheteur de trancher. « La grande difficulté c’est le consommateur, ce qu’il veut bien acheter, ce qu’il veut bien payer », résume Philippe Determ, directeur général de Nestal. Des Vosges à l’Aisne, son groupe nourrit 300 000 bovins. Au menu ? Ni luzerne, ni lin. Un « choix contraint », explique le chef d’entreprise. Car, pour des produits plus chers, la demande ne suit pas. Dans la région, les initiatives pour inciter les éleveurs à changer leurs pratiques sont balbutiantes. « Ici, il n’y a guère que le label Bleu-Blanc-Cœur pour faire la différence, et encore on ne le voit pas dans tous les supermarchés », déplore Philippe Determ.